Morgana Delore a fondé le groupe "GJ Cabana" | © Raphaël Zbinden
Dossier

Morgana Delore: «J'ai envie de bousculer les façons de penser»

8

Morgana Delore, 27 ans, dirige un groupe de jeunes très dynamique à Saint-Prex (VD). En passe de devenir agente pastorale dans sa région, elle rêve d’une Eglise où les jeunes pourraient réellement prendre leur place et revitaliser les anciennes structures.

Par Raphaël Zbinden

Morgana n’imagine ainsi vivre sa foi que dans cette dimension communautaire, qui allie joie et partage. Une foi dans laquelle elle a toujours «un peu baigné», explique-t-elle. Rien d’étonnant, avec des parents très impliqués dans la vie paroissiale. Sa maman a été très longtemps catéchiste et son papa, pendant douze ans, président de la paroisse de Saint-Prex.

Confirmation de joie

Mais ce n’est pas cette imprégnation catholique qui a mené en premier lieu Morgana à sa vocation au service du Christ. «Mon envie d’engagement est venue surtout après ma confirmation. J’ai intégré un groupe de jeunes formé avec tous les confirmands de la région. Cela m’a donné une vision différente de l’Eglise, de celle que j’avais rencontrée jusque-là».

«L’Eglise fait parfois juste semblant d’être à l’écoute des jeunes»

Elle se rend donc avec une grande motivation aux rencontres de ce groupe, tous les premiers vendredis du mois. Plus que la cérémonie à l’Eglise, c’est l’échange avec ces autres jeunes qui confirme sa foi. «J’étais émerveillée par la joie qui émanait de tous ces jeunes qui vivaient leur foi ensemble». L’équipe se soude encore davantage dans l’expérience des JMJ de Madrid, en 2013. Mais le groupe, qui a été créé dans cet objectif précis, cesse alors d’exister.

La cabane du bonheur

Morgana cherche immédiatement à en créer un nouveau. Elle approche alors, avec quelques autres jeunes, la paroisse, pour lui faire part du projet. Notamment d’aménager une cabane au fond du jardin de la cure, qui sert de débarras, afin d’y faire un endroit pour le groupe.

La paroisse apporte alors pleinement son soutien au projet et des paroissiens les aident même dans l’aménagement de leur nouveau «QG», en offrant notamment des meubles.

Le «QG» de «GJ Cabana», à St-Prex | © Raphaël Zbinden

Une fois la cabane aménagée, le groupe se donne le nom de «GJ (Groupe Jeunes) Cabana«, eu égard à ce lieu qui marque son identité. L’initiative remporte un franc succès dans le secteur de Saint-Prex. Beaucoup de jeunes croyants viennent se greffer au noyau central. Actuellement, ce sont près de 40 jeunes qui fréquentent la cabane. Les échanges se sont au fil des ans intensifiés, également avec des jeunes d’autres paroisses vaudoises et même d’autres cantons.

Chanter pour Dieu

Dans ce groupe, loué par tous pour son dynamisme, la musique représente un aspect essentiel. «GJ Cabana» a commencé à animer des messes à Saint-Prex. Morgana y participe par le chant. «C’est un moyen privilégié pour exprimer ce que je ressens pour Dieu». Lors de ces performances musicales, aussi réalisées à présent dans des paroisses voisines, elle se sent particulièrement en union avec les autres jeunes du groupe.

«GJ Cabana» participe à d’autres activités en lien avec la musique, notamment des camps liés à des festivals chrétiens, comme Metanoia et Open Sky, en Valais, Paray-le-Monial, en France, ou Adoray, à Zoug.

Le groupe est ainsi un élément central dans la vie de Morgana. Il a notamment été «un point de repère» lorsqu’elle a subi de plein fouet la dureté du monde du travail. Après des études d’employée de commerce, elle a en effet occupé divers postes dans le domaine du secrétariat. Des fonctions dans lesquelles elle ne s’est jamais sentie comblée.

Dans ces moments, le fait de pouvoir se «reconnecter» avec ses amis a été d’une grande aide. De cette expérience, elle a toutefois acquis la conviction que sa place était ailleurs, au service à la fois des jeunes et du Christ. C’est ainsi qu’elle a commencé, il y a quelques années, une formation au Centre catholique romand de formation en Eglise (CCRFE), à Fribourg. Elle est sur le point d’achever ses études pour devenir agente pastorale dans le domaine de la jeunesse. «Je suis aujourd’hui convaincue d’être sur la bonne voie, celle sur laquelle le Seigneur m’a appelée».

Morgana a depuis petite «baigné» dans la foi | © Raphaël Zbinden

Pour une Eglise vraiment à l’écoute

Morgana espère, dans cette activité, être en mesure de promouvoir la place des jeunes dans l’Eglise. «Je constate que l’Eglise est en marche, elle commence à s’ouvrir, à explorer, à laisser davantage de place aux jeunes». Une prise en compte qui reste néanmoins difficile.

«A Saint-Prex, nous nous sommes faits notre place assez naturellement. Mais nous nous sommes aussi heurtés, parfois, à des murs». Elle a l’impression que l’Eglise fait ainsi parfois «juste semblant» d’être à l’écoute des jeunes. «A GJ Cabana, nous nous sommes souvent posé la question de comment faire pour pouvoir exprimer notre foi comme nous le ressentons vraiment».

Une envie d’indépendance qui ne rime pourtant pas avec détachement. «Nous ne voulons pas être des électrons libres, pour nous le rattachement à l’Eglise institutionnelle est très important».

La future agente pastorale est certaine qu’un équilibre peut être trouvé, bien qu’elle ne cache pas son envie de «bousculer les façons de penser de certaines personnes». Nul doute qu’elle saura assouplir et reverdir, par la vitalité qui la caractérise, certaines vieilles branches rigides de l’Eglise. (cath.ch/rz)

Suite