Lucerne : Le Prix Caritas a été remis à la Philippine Cecilia Flores-Oebanda

Pour son engagement contre l’exploitation des jeunes filles et des femmes

Lucerne, 22 juin 2011 (Apic) Le Prix Caritas 2011 a été remis le 22 juin à la militante philippine Cecilia Flores-Oebanda. La lauréate a été récompensée pour son engagement auprès des femmes et des jeunes filles victimes du trafic d’êtres humains, d’exploitation sexuelle et autres formes de violence.

La cérémonie de remise du Prix, doté d’une valeur de 10’000 francs, s’est déroulée au Centre de culture et de congrès(KKL) à Lucerne devant près de 630 personnes, essentiellement des représentants d’organisations, autorités et donateurs de Caritas Suisse. Ce montant profitera à la fondation Visayan Forum qui prodigue une aide concrète aux victimes et réalise un travail de prévention sociale et politique pour empêcher toute forme d’esclavage et d’exploitation sexuelle.

Un film réalisé aux Philippines par Caritas et par Tele 1 a montré les actions préventives menées par cette organisation : distribution de tracts dans les aéroports et les ports maritimes, présence dans les rues des quartiers miséreux de Manille, … Les participants ont également découvert les visages épanouis des filles recueillies dans les centres de Visayan Forum. Celles-ci peuvent enfin vivre une véritable enfance, avec une éducation, un enseignement, une attention et des activités qui correspondent à leur âge.

L’ambassadeur Martin Dahinden, directeur de la DDC (Direction du Développement et de la Coopération) à la Confédération, a rendu hommage à l’engagement de la lauréate. Il a souligné dans son discours que Cecilia Flores-Oebanda s’est engagée depuis 20 ans pour les droits des femmes précarisées et des enfants. « Vous avez consacré votre vie à la population pauvre des quartiers miséreux des villes des Philippines, aux petits paysans dans les campagnes ou aux travailleurs dans les grandes plantations de cannes à sucre, aux femmes défavorisées et maltraitées, aux jeunes et aux enfants marginaux. C’est pourquoi vous avez logiquement fondé avec des citoyennes et des citoyens qui partagent vos convictions le Forum Visayan, qui s’engage en priorité en faveur des victimes du trafic d’êtres humains, de l’exploitation et de la prostitution », a lancé Martin Dahinden.

Depuis ses débuts, Cecilia Flores-Oebanda a aidé plus de 40’000 enfants et adolescents défavorisés et leur a donné une chance de se construire un meilleur avenir. C’est pourquoi, elle a plus que mérité ce Prix Caritas pour l’humanité, a lancé le directeur de la DDC.

Aucune alternative à cet engagement contre la traite humaine

Même si la traite humaine reste une réalité qui ne peut être éradiquée, « il n’y a moralement aucune alternative à votre activité contre l’exploitation de l’homme par l’homme. Votre engagement est l’expression de votre option conséquente et durable qui consiste à lutter aux côtés des exclus et des marginaux. Votre engagement suscite notre émerveillement sans limites et notre profond respect », a affirmé Martin Dahinden. « Mais pas seulement. Votre engagement nécessite également notre soutien inconditionnel – personnel, politique, social. Car, en fin de compte, la vérité de notre société est simplement – et ceci représente un défi : Un monde dans lequel un enfant souffre moins est un monde meilleur ».

Très émue, avec parfois des interruptions dans son discours, la lauréate a exprimé sa joie de recevoir cette distinction, qui constitue pour elle un encouragement dans sa lutte pour la dignité humaine dans son pays. « Je voudrais profiter de cette occasion pour remercier Caritas Suisse pour sa confiance et son soutien », a-t-elle lancé. « Grâce à cela, nous parvenons à changer le destin de femmes et d’enfants aux Philippines et à contribuer à leur procurer une vie équitable. Cet engagement touche en particulier des femmes et des enfants issus de communautés pauvres, touchés par la traite humaine et d’autres formes d’abus, et dont la situation s’est empirée à cause de circonstances malheureuses ou de catastrophes », a-t-elle ajouté.

« Nous ne nous arrêterons pas »

«Grâce à ce prix, je vous promets que nous allons intensifier notre lutte contre le trafic d’êtres humains. Des milliers parmi nos enfants et nos femmes sont vendus pour la prostitution, contraints aux travaux forcés et à l’esclavage à cause de leurs dettes. Nous ne nous arrêterons pas jusqu’à ce que notre peuple puisse vivre en liberté, dans la justice et la dignité. Nous ne voulons pas nous arrêter avant que chaque enfant des Philippines obtienne ses droits – comme chaque enfant dans le monde – qu’il soit libre et qu’il puisse saisir sa chance sans encourir un danger, qu’il ne soit ni maltraité, ni vendu, ni réduit à l’esclavage », a assuré la lauréate. Des applaudissements nourris ont accompagné autant la remise du prix que la fin du discours de Cecilia Flores-Oebanda.

L’organisation Visayan Forum est implantée dans plus de 20 villes à travers les Philippines. Elle assure une aide concrète aux enfants des rues, aux travailleurs domestiques, ainsi qu’aux femmes et enfants victimes de trafic. Elle leur offre un abri pour se protéger avec des mesures d’hygiène et de santé, ainsi que de l’aide alimentaire de base. Le Visayan Forum leur offre également une assistance juridique ainsi qu’une formation scolaire ou professionnelle.

En plus de cette aide concrète, Cecilia Flores-Oebanda soutient également les mouvements de la société civile des Philippines qui luttent pour faire connaître le phénomène de l’exploitation et des abus, afin que leurs auteurs soient poursuivis juridiquement. Elle tente également de combattre les racines de ces phénomènes. Dans ce but, elle collabore avec le gouvernement et des entreprises, notamment des compagnies aériennes, des opérateurs touristiques ou des agences de voyage. Elle œuvre également à la mise en place d’un réseau international pour l’abolition du trafic d’êtres humains et de l’esclavage.

Encadré :

Le long combat de Cecilia Flores-Oebanda pour la justice

L’histoire de Cecilia Flores-Oebanda est un long combat pour la justice. Elle a commencé à travailler à l’âge de 5 ans parallèlement à sa scolarité, en vendant du poisson sur les marchés. À l’âge de 17 ans, son engagement contre le régime Marcos l’oblige à fuir dans les montagnes. Elle passe ensuite quatre ans en prison. Après la chute de la dictature, Cecilia Flores-Oebanda continue sa lutte: «A mes yeux, mon engagement actuel contre le trafic d’êtres humains est la suite logique de mes combats précédents. Je conçois mon travail comme un instrument du développement social», affirme-t-elle.

Durant ces dix dernières années, avec Visayan Forum, Cecilia Flores-Oebanda a aidé plus de 60’000 victimes du trafic d’êtres humains, leur offrant protection et conseil, souligne Caritas Suisse dans un communiqué. Des milliers de personnes ont trouvé au Visayan Forum une possibilité de se former afin d’informer la population, les autorités et le personnel des aéroports et des ports maritimes des agissements des trafiquants d›êtres humains. Malgré de nombreuses menaces de mort, cette combattante de la liberté âgée de 51 ans n’arrête pas de soumettre de nouveaux cas au jugement des tribunaux.

« Pour pouvoir gagner la guerre contre le trafic d’êtres humains, nous avons besoin de lois de protection des enfants plus efficaces qui permettront de faire jeter ces trafiquants en prison», dit cette mère de quatre enfants.

L’infatigable engagement de cette Philippine est soutenu depuis plus de 20 ans par Caritas Suisse.

Encadré :

Visayan Forum lutte contre l’exploitation des enfants et le trafic humain

«J’ai été offerte à des hommes d’ici et à des étrangers.» En quelques mots, cette jeune Philippine raconte son histoire devant la caméra. Un homme de la ville est arrivé dans son village. Il proposait un emploi dans un hôtel. Elle et ses parents ont cru que c’était la chance de sa vie. Elle est partie. Et elle s’est retrouvée dans une filière de trafiquants d’êtres humains. À peine arrivée en ville, elle a été revendue à des propriétaires qui l’ont violentée, droguée et forcée à se prostituer.

Des destins comme celui-là, Cecilia Flores-Oebanda, fondatrice de Visayan Forum, en croise tous les jours. La jeune fille a attendu des mois avant de raconter son histoire devant une caméra, pour informer d’autres enfants et jeunes ainsi que leurs parents des agissements des trafiquants d’êtres humains. Grâce à Visayan Forum, la jeune fille va désormais pouvoir commencer une vie plus digne.

Visayan Forum lutte contre l’exploitation des enfants et le trafic d’êtres humains. Les victimes de violence et d’exploitation sexuelle trouvent une protection et un conseil ainsi qu’un accompagnement lors de leur réintégration dans la société. Visayan Forum effectue aussi un important travail de prévention de l’exploitation et du trafic d’êtres humains. Ce travail est rendu possible par un réseautage efficace à différents niveaux dans tout le pays.

(apic/bb)

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