Réunis à Orsières pour une autre finale
Orsières, 30 mai 2011 (Apic) Plus de 2’000 personnes se sont rassemblées à Orsières, en Valais, le 29 mai 2011, pour les ordinations sacerdotales de deux enfants du pays, Grégoire Dumoulin et Yves Sarrasin. «Nous voilà donc en finale… de cette ordination», a lancé le Conseiller d’Etat Maurice Tornay. Retour sur l’événement.
Les gens étaient très nombreux à prendre la route qui conduit au Grand-Saint-Bernard, le 29 mai. 1’700 personnes inscrites, sans compter les gens des paroisses d’Orsières et de Bagnes. L’évènement était d’importance: la dernière ordination sacerdotale remonte à 1985, celle du chanoine Jean-Pascal Genoud. Or, «nous avons besoin de prêtres pour renouveler le monde», a rappelé Mgr Dominique Rey, évêque de Fréjus-Toulon en France, qui a ordonné Grégoire Dumoulin et Yves Sarrasin. Il était entouré de Mgr Jean-Marie Lovey, Prévôt du Grand-Saint-Bernard, et d’un important groupe de prêtres venus témoigner leur attachement aux ordinants et à la fraternité Eucharistein.
Le geste de prostration dans lequel le futur prêtre est allongé sur le sol face contre terre est une mise à mort à soi-même. Saisi par l’Esprit-Saint, le prêtre est désormais au service de Dieu par tous les sens de son corps. C’est par ces paroles que Mgr Dominique Rey a débuté son homélie, articulée autour des cinq sens.
Le prêtre doit vivre de la charité de Jésus. Cette charité ou amour est «l’attention pure à l’existence d’autrui», a rappelé l’évêque, citant le philosophe Bernard Clavel. Elle s’exprime par la vue. Et d’apporter le témoignage d’un paysan au sujet de l’Eucharistie: «Je le toise et il me toise», ce qui signifie dans le langage biblique: «Je le sonde et il me sonde». La pédagogie du prêtre est de «faire découvrir toutes choses dans le regard du Christ», a insisté Mgr Rey. Il est investi d’une mission prophétique, celle de «regarder les êtres à partir de ce que Dieu a déjà fait et fait encore en l’homme».
Deuxième sens: l’ouïe. Le peuple de Dieu a une vocation indissociable de l’écoute. Déjà dans l’Ancien Testament, Dieu l’interpelle par ces paroles: «Ecoute Israël». C’est pourquoi le prêtre est d’abord un familier du silence, pour mieux écouter Dieu lui parler. «Dieu parle très bas, à hauteur du cœur», a précisé l’évêque. Alors, le prêtre saura, dans les deux dimensions de notre vie que sont l’agir et l’écoute, accorder la première place à l’écoute, comme Marie dans l’évangile de Luc.
Le prêtre doit aussi mettre le croyant en contact direct, physique, avec le Christ, par le toucher, dans les sacrements. «Dans l’Eucharistie, Jésus touche notre corps». Ce geste du toucher révèle la proximité, a expliqué Mgr Rey. Mais le contact ne doit jamais emprisonner l’autre dans une dépendance affective. Allusion à la chasteté du prêtre, qui appartient d’abord à Dieu seul.
La bouche du prêtre doit être remplie de la parole de Dieu, lue chaque jour dans la prière des offices. Elle a également le goût du pain. L’Eucharistie est le sommet de la journée du prêtre. Lors de sa célébration, «le ministère du prêtre se renouvelle à chaque messe», a témoigné l’évêque français.
Enfin, chaque liturgie solennelle utilise l’encens. Dieu s’éprouve aussi dans l’odorat. L’encens est le symbole de la prière, qui monte vers le trône du Seigneur.
«Vous porterez le beau nom de Père, a conclu Mgr Rey. La grâce du Christ passera par tous vos sens, et même par vos fragilités, pas selon votre mesure mais selon la démesure de la miséricorde de Dieu». Et d’insister: «Cette grâce, l’homme d’aujourd’hui en a le plus besoin pour vivre selon sa vraie humanité».
Au terme de la célébration, le Conseiller d’Etat Maurice Tornay, en charge du département des finances, des institutions et de la santé du Canton du Valais, a invité l’assemblée à oser ces valeurs d’avenir, qui «ont fait notre société, notre Valais et même la France», s’adressant tout particulièrement à Mgr Rey et provoquant les rires de l’assemblée. Comme responsable du département de la santé, il est reconnaissant d’avoir gardé et transmis ces valeurs, permettant ainsi à l’Etat de faire des économies. Et de conclure: «Le Valais reste une terre d’humanité, dans laquelle, Seigneur, ta parole est semée et porte du fruit».
Jean-Maurice Tornay, président du comité d’organisation, a été frappé par la ferveur de l’assemblée, durant près de trois heures sous une chaleur étouffante. Les chorales d’Entremont, renforcées par le chœur de l’Institut Philanthropos à Bourguillon/Fribourg et par la communauté Eucharistein, ont contribué au recueillement et à l’animation de la cérémonie.
Si la fraternité Eucharistein est la première bénéficiaire de ce don de Dieu, la région partage cette reconnaissance. Cela s’est traduit dans les plus petits détails d’une organisation parfaite, où 600 bénévoles ont apporté leur contribution. Après la profession de foi des ordinants, qui ont exprimé leur attachement et leur fidélité envers l’Eglise et leur évêque Mgr Rey, le clergé, les futurs prêtres, les proches, accompagnés des deux fanfares du lieu, ont défilé dans les rues d’Orsières, pour rejoindre le lieu-dit «Les Ides». Sur le parcours, on pouvait même lire «Merci à Dieu pour Yves et Grégoire».
La finale a été belle. Les personnes interrogées l’ont toutes vécue avec émotion. Elle a même eu une suite, avec la célébration des professions religieuses des frères Johannes d’Autriche et Didier Berthod, à 17h à l’église d’Orsières.
Grégoire Dumoulin, 32 ans, est cuisinier de formation. Lors d’un tour de Suisse en vélo, il s’arrête à la fraternité Eucharistein à Epinassey, pour ne plus la quitter. En juin 2000, il fait son postulat, suivi de deux ans de noviciat. De 2003 à 2009, frère Grégoire accomplit des études de théologie en vue du sacerdoce, à l’Université de Fribourg. Il a également des responsabilités au sein du groupe de jeunes «Only All For Jesus».
Yves Sarrasin, 27 ans, s’est toujours impliqué dans la vie paroissiale. Il devient membre du Tiers-Ordre séculier de la fraternité Eucharistein en 2004. Après une école de commerce, il entreprend en 2005 des études de théologie à l’Université de Fribourg. Dès 2005, il est représentant de la jeunesse suisse pour la liturgie lors des Journées Mondiales de la Jeunesse (JMJ).
«Un nouveau printemps suscité par l’Esprit-Saint»
La fraternité Eucharistein a vu le jour en 1996, à Saint-Maurice en Valais. Elle est, selon le jargon de l’Eglise, une communauté nouvelle, une expression providentielle «du nouveau printemps suscité par l’Esprit-Saint avec le Concile Vatican II», comme aimait le dire Jean Paul II.
Quatre maisons accueillent une vingtaine de frères et sœurs, engagés à la suite du Christ, peut-on lire sur le site de la fraternité. La maison mère à Epinassey, sur le territoire de l’Abbaye de Saint-Maurice; Bourguillon/Fribourg (Suisse); la maison de Château Rima, lieu de formation de la fraternité, sur le diocèse de Fréjus-Toulon en France; et la maison de Saint-Jeoire sur le diocèse d’Annecy.
Reconnue comme une association publique de fidèles en 2003, la fraternité a reçu de Mgr Dominique Rey, évêque de Fréjus-Toulon, l’approbation officielle de ses nouvelles constitutions en mai 2008, en vue d’être reconnue comme Famille ecclésiale diocésaine de Vie consacrée.
Une vie centrée sur le Christ-Eucharistie
La vie de la fraternité est centrée sur le Christ-Eucharistie, rapporte le site. D’une part, Jésus est reçu et adoré dans le Saint-Sacrement. D’autre part, Il est reconnu et servi dans le frère et la sœur qui souffrent.
Concrètement, la fraternité vit l’adoration eucharistique perpétuelle, 24h sur 24. Elle y puise la force pour accueillir des personnes marquées par la vie, qui y viennent pour un temps de reconstruction.
La vie quotidienne de la fraternité s’inspire de grandes figures spirituelles. La simplicité évangélique, le travail manuel et la vie de prière sont repris de François d’Assise. Pierre Julien Eymard modèle leur vie eucharistique, Teresa de Calcutta façonne leur attention au prochain, et François de Sales leur dimension missionnaire.
L’évangélisation occupe une grande place dans la vie de la fraternité. Elle anime de nombreuses veillées de prière, accueille des groupes, travaille auprès des jeunes et des familles, et s’investit dans des missions paroissiales.
Le sens du verbe «Eucharistein»
«Eucharistein» est un verbe grec qui signifie «rendre grâce». Il reflète l’attitude du Christ à l’égard de son Père, à qui il donne sa vie. Saint Paul a suivi ce chemin. Il nous invite à le parcourir, à notre tour: «En tout temps et à tout propos, rendez grâces à Dieu le Père, au nom de notre Seigneur Jésus-Christ» (Ep 5, 20). (apic/ggc)
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