Pourquoi le mariage religieux séduit encore
Fribourg, 24 mai 2011 (Apic) Pourquoi se marier à l’Eglise? Par vérité et authenticité, selon une enquête menée dans le diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg. Si le mariage civil en Suisse connaît une augmentation de 2,1% en 2010, les mariages religieux sont à ’la traîne’. Il n’empêche que c’est en connaissance de cause et en toute liberté que les couples franchissent les portes de l’Eglise.
«Les personnes se sentent libres de se marier à l’Eglise. Cela a un double effet, moins de mariages, mais un plus grand engagement», affirme l’abbé Jean-Pascal Vacher, responsable de la préparation aux mariages en ville de Fribourg. Les nouvelles générations, marquées par le contexte social des divorces et des familles éclatées, «hésitent devant l’obstacle» stigmatisé dans le mariage, précise Patrick de Laubier, professeur émérite de sociologie à l’Université de Genève. C’est un souci de vérité et de sincérité qui invite les couples à se positionner, avant de prononcer le «oui» à l’autel.
Pour les pratiquants réguliers, «se marier devant Dieu a du sens», rappelle l’abbé François-Xavier Amherdt, professeur de théologie pastorale, pédagogie religieuse et homilétique à l’Université de Fribourg. Dieu «consacre, scelle et bénit» leur union. Pour les pratiquants occasionnels, «le mariage sacramentel reste le vrai mariage» et l’Eglise «le seul lieu où on se dit oui pour toujours». Car la dimension sacrée permet de dépasser le simplement humain. Certains pressentent dans le mariage religieux un «plus», du mystérieux (le mot sacrement vient du grec mysterion, ndlr) «dont ils ont besoin», ajoute le théologien. Les athées aussi, qui disent ne pas croire en Dieu, recourent aux mêmes critères de vérité et d’authenticité.
La sécularisation, les mariages mixtes en augmentation et les familles biconfessionnelles font que l’on transmet de moins en moins la religion aux nouvelles générations. Le mariage religieux est du coup discrédité et relégué au second plan. D’autant que «depuis mai 1968, une partie du clergé a développé une attitude de ’permissivité canonique’ à l’égard des règles de l’Eglise», rapporte le professeur de Laubier. Et de poursuivre: «L’intention était d’adapter et d’assouplir les règles, dans l’espoir de retenir le gros du troupeau qui s’en allait. Mais l’effondrement de la pratique prouve, aujourd’hui, que l’on s’est trompé».
Relevons encore que la cohabitation remplace aujourd’hui le temps des fiançailles. L’engagement pour toujours intervient après le ’test’ de la vie en commun. «On se donne ainsi une garantie supplémentaire», explique l’abbé Amherdt. Au final, ceux qui choisissent de se marier, à l’Eglise ou non, le font parce qu’ils peuvent «prendre à présent cet engagement de responsabilité et de maturité, en connaissance de cause», témoignent de futurs mariés.
Cependant, les valeurs contenues dans le mariage sacramentel font peur. En réponse à l’engagement pour toujours, que l’on craint de ne pouvoir honorer, «certains vont jusqu’à suggérer que la société propose des contrats de mariage à durée limitée», rapporte l’abbé Amherdt. La «perspective de se séparer à l’amiable» convient mieux à de nombreux couples, conclut le théologien. Ce que l’engagement sacramentel rend impossible. La fidélité absolue inquiète également. «L’image d’une sexualité ’hyper-érotisée’, tournée vers l’extérieur» et souvent mal maîtrisée, constate l’abbé Vacher, fait qu’on préfère les libertés que permet le mariage civil. Enfin, la modification du statut de la femme a bouleversé l’équilibre familial. Hier, elle dépendait économiquement de son mari. Mieux assurée financièrement aujourd’hui, c’est la femme, qui, «les trois-quarts du temps demande le divorce», rapporte le professeur de Laubier.
Bref, les changements sociaux malmènent l’Eglise. L’étude du Fonds national de recherche scientifique de mars 2011 démontre une prise de distance vis-à-vis des Eglises institutionnelles. Depuis une décennie, le mariage religieux a diminué presque de moitié, indiquent les statistiques du diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg (1’503 mariages dans l’Eglise catholique en 2000 et 855 en 2010). Par contre, le phénomène religieux est en expansion. Comme en témoigne le recours à «des célébrants indépendants, pour bâtir des cérémonies laïques ou profanes, non ecclésiales, ’sur mesure’», relève l’abbé Amherdt.
En définitive, l’Eglise doit, au nom de cette recherche de la vérité et de l’authenticité, inviter la génération actuelle à dépasser, selon l’expression du professeur de Laubier, une «franchise candide». Elle traduit leur bonne foi, mais elle ne suffit pas à rendre compte de la dimension sacrée et éternelle du mariage. «Dans le oui que les futurs conjoints prononcent à l’Eglise, Dieu se donne. Il s’engage comme troisième partenaire», confie un futur marié. C’est la définition du mariage sacramentel. Voilà de quoi répondre au souci de vérité et d’authenticité, au besoin de transcendance et de sacré, ancrés dans le cœur de tout homme. (apic/ggc)
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