Une source d’inspiration pour un monde plus juste, selon le pasteur Altmann
Genève, 20 novembre 2009 (Apic) Quarante ans après avoir été présentée sur la scène internationale, la théologie de la libération reste une source d’inspiration pour des gens souhaitant créer un monde plus juste. Et ceci, en dépit des critiques affirmant que cette théorie est dépassée, déclare le président du Comité central du COE Walter Altmann.
Pour déterminer si elle est encore pertinente, il faut se demander «si les perspectives et aspirations fondamentales de la théologie de la libération sont encore en vie», a déclaré le pasteur luthérien brésilien Altmann, lors d’une interview accordée à l’agence œcuménique ENI. Dans un article publié sur le site web du COE, le pasteur Altmann a constaté que la plupart de ceux qui ont raillé la théologie de la libération «l’ont fait parce qu’ils la voyaient comme une apologie du socialisme soviétique d’autrefois. Il semble cependant que ces observateurs soient allés un peu vite en besogne.»
En août dernier, Walter Altmann a rappelé au Comité central, principal organe directeur du COE, que la théologie de la libération est née en Amérique latine dans les années 1960 en tant que mouvement mettant l’accent sur le fait que le christianisme doit être vécu selon le point de vue des pauvres. «Les préoccupations pastorales exigeaient de nouvelles réflexions théologiques», a-t-il expliqué. «La pauvreté représentait un obstacle énorme pour la conscience chrétienne et le témoignage des Eglises.»
Ces préoccupations ont trouvé un public plus large en novembre 1969, lors d’un colloque organisé près de Genève par le Comité mixte sur la société, le développement et la paix (SODEPAX) de l’Eglise catholique romaine et du COE. C’est à cette occasion que Gustavo Gutiérrez, un théologien catholique romain du Pérou, a présenté ses «Notes sur une théologie de la libération», généralement considérées comme un document fondateur du mouvement. «L’Amérique latine», affirme le Père Gutiérrez dans ce document, «ne sortira pas de sa situation actuelle à moins qu’un profond changement ait lieu, une révolution sociale qui y modifierait radicalement les conditions de vie.» Seule une rupture avec un ordre social injuste auquel l’Eglise est liée, indique-t-il, «permettra au peuple latino-américain de croire au message d’amour, dont l’Eglise est le vecteur.» Un appel similaire a été lancé pendant le colloque par Rubem Alves, un théologien protestant du Brésil.
Dans les années qui ont suivi, le mouvement a affirmé son influence non seulement en Amérique latine, mais également dans d’autres régions du monde. Le pasteur Altmann lui-même, dans son ouvrage paru en 1982 «Luther et la libération», établissait des corrélations entre les enseignements de Martin Luther et la théologie de la libération. Le COE et les personnes influencées par la théologie de la libération ont joué un «rôle décisif» dans le renversement des dictatures militaires en Amérique latine dans les années 1980, a souligné le pasteur Altmann au correspondant de l’agence ENI.
Pourtant, le mouvement a également été confronté à des critiques en raison des concepts marxistes utilisés par certains de ses partisans. Et avec la chute du communisme en Europe de l’Est, on s’est mis à considérer que la théologie de la libération avait perdu sa pertinence. «La plus grande difficulté, c’est que beaucoup de gens ont vu dans la chute du mur de Berlin le triomphe du capitalisme et l’avènement du meilleur des mondes possibles», a expliqué le pasteur Altmann. «Il est désormais assez évident que ce n’est pas le cas», a-t-il affirmé, évoquant la crise financière mondiale de ces derniers mois.
«Par ailleurs, nous devons également dire que bien que la théologie de la libération ait effectivement employé la terminologie du socialisme comme modèle possible pour la société, nous n’avions jamais eu l’intention de l’assimiler au système qui existait dans l’ex-Union soviétique ou dans la République démocratique allemande», a affirmé le théologien brésilien, qui est, depuis 2002, le président de l’Eglise évangélique de la confession luthérienne au Brésil. «L’idée a toujours été de donner la priorité aux pauvres, aux personnes souffrant de l’injustice, afin de leur donner un espace pour être politiquement actives», a souligné le pasteur Altmann. «Bien que l’époque soit différente, il s’agit là d’un objectif qu’on doit bien sûr encore chercher à atteindre.» (apic/eni/bb)
webmaster@kath.ch
Portail catholique suisse