Buenos Aires: La dernière «Marche» des Mères de la Place de Mai

Mais la page ne se tourne pas pour autant

Buenos Aires, 29 janvier 2006 Les Mères de la Place de Mai ont fait leur dernière «Marche de la résistance» jeudi à Buenos Aires, en Argentine. La marche des «folles de la Plaza de Mayo», était devenue au fil des ans, depuis 25 ans tous les jeudis, la protestation la plus emblématique contre la dictature militaire de 1976-1983.

A 18h, en fin d’après-midi, la présidente des «Madres», Hebe de Bonafini, a prononcé son discours final sur la Plaza de Mayo, située devant la casa Rosada, siège du gouvernement. Un vent d’optimisme soufflait jeudi à Buenos Aires, mais aussi de revendications et de mécontentement, à l’égard de l’ancien président Menem, particulièrement complaisant avec les tortionnaires sous le régime de la dictature.

La première marche remonte au 30 avril 1977 quand 14 femmes se réunirent Place de Mai pour demander des nouvelles de leurs enfants disparus ; face aux intimidations de la police, elles commencèrent à marcher. A partir de 1981, ce rendez-vous devint hebdomadaire. Depuis, 1’500 Marches se sont déroulées, ponctuellement, chaque jeudi.

«Nous avons toujours marché contre le pouvoir, contre ceux qui nous ont trompées, trahies. Aujourd’hui, le président Nestor Kirchner est un ami des Mères, il fait beaucoup de choses auxquelles nous ne nous attendions pas. La décision de suspendre la marche est due à un changement de scénario politique, non seulement en Argentine mais également dans toute l’Amérique Latine» a déclaré Mme Bonafini à Radio Mitre, à la veille de la manifestation.

«Nous avons beaucoup souffert ces dernières années sans savoir où étaient passés nos enfants. Nous avons perdu nos êtres chers, mais nous en avons trouvé d’autres, qui continuent à lutter à nos côtés» a déclaré une autre mère, Maria de Domínguez.

Cette décision n’a toutefois pas été bien vue de tous: Estela Carlotto, présidente des Grand Mères de Plaza de Mayo, estime qu’il faut poursuivre la mobilisation parce que, dit-elle, ’on ignore le sort de 30’000 disparus et tous les assassins ne sont pas en prison. Parce qu’aussi 500 enfants, dont on ignore le sort, ont été enlevés à leurs mères détenues.

La fin de la Marche de la résistance, a précisé Mme Bonafini, ne signifie pas l’abandon de la recherche de la justice : tous les jeudis, les mères – âgées de 70 à 90 ans – continueront à se réunir et à marcher une demi-heure autour de l’obélisque de la place.

Depuis son investiture en mai 2003, le président Kirchner a lancé une série de réformes dans le secteur des droits de l’Homme, en promouvant notamment l’abolition des «lois de pardon» dont ont bénéficié des centaines de militaires accusés de crimes de lèse humanité. Comme geste symbolique, Kirchner a également transformé en Musée de la mémoire l’école de mécanique de la Marine, l’un des plus célèbres centres de torture. (apic/misna/pr)

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