Sida : que fait l’Eglise catholique en Suisse romande (281189)

APIC-Dossier

1er décembre 1989 : Journée mondiale du sida

Fribourg, 28novembre(APIC/Bernadette Dubois) Le 1er décembre a été proclamé Journée mondiale du sida par l’Organisation mondiale de la santé

(OMS), et cette année, la Journée est centrée sur le thème : «Les jeunes et

le sida». La terrible maladie fait en effet toujours plus de ravages :

182’463 cas de sida ont déjà été recensés dans 152 pays depuis son apparition en 1979 jusqu’au 1er octobre 1989, mais on estime à trois fois plus le

nombre de personnes qui ont été ou sont atteintes du virus. En Suisse, pays

particulièrement touché par la maladie, 921 cas avaient déjà été enregistrés au 30 juin de cette année.

Dans notre pays, de nombreuses actions sont entreprises en faveur des

malades mais également en matière de prévention, notamment par l’Office fédéral de la Santé publique (OFSP) et l’Aide Suisse contre le Sida. L’Eglise

catholique elle-même se sent interpellée. Elle vient d’organiser au Vatican

une conférence internationale sur le sida où l’on a insisté en particulier

sur l’importance de l’aide morale et spirituelle aux sidéens. En Suisse,

comme le souligne Hans-Peter Röthlin, porte-parole de la Conférence des

évêques (CES), «nous devons tous faire quelque chose, et l’Eglise aussi !».

Ainsi, des discussions ont lieu régulièrement entre les Eglises et

l’OFSP. Les Eglises ont apporté à cette occasion une contribution importante : elles soulignent la nécessité de tenir compte des aspects éthico-moraux de la problématique du sida, de former les consciences et de ne pas

simplement combattre les symptômes de la maladie (et de faire croire qu’il

n’y aurait plus de dangers du simple fait d’utiliser le préservatif ou des

seringues neuves). Les Eglises mettent notamment en avant des valeurs comme

la fidélité et l’amour conjugal, mais elles se refusent à voir dans la terrible maladie un quelconque «châtiment de Dieu».

Devant l’avancée de la maladie et pour une meilleure assistance morale

des malades, l’Eglise en Suisse romande n’est pas restée les bras croisés

face aux sidéens. L’année dernière à Genève, par exemple, même si les Eglises n’étaient pas en tant que telles au premier plan dans la lutte contre

le sida, un groupe d’ecclésiastiques s’est constitué pour s’occuper plus

spécialement des sidéens. Les membres de cette équipe sont deux pasteurs

(Bernard Buunk et Dominique Roulin), un prêtre catholique (Gérard Barone),

un curé catholique-chrétien (Franz Murbach) et un rabbin (François Garai)

de la communauté israélite libérale.

Malheureusement, cette année, le groupe s’est partiellement disloqué,

faute de temps. Mais tous travaillent, à titre personnel ou dans le cadre

de la maison pour sidéens de «Sid’accueil», auprès des malades du sida. De

plus, certains prendront part à la conférence de presse organisée le 1er

décembre à Genève par le groupe «Sid’accueil».

A Neuchâtel, même si aucun aumônier pour les sidéens n’a été nommé pour

le moment, les responsables de l’Eglise catholique ont un très grand souci

de ces malades et participent à de nombreuses activités organisées par des

organismes privés ou publics en faveur des sidéens. A Fribourg, en Valais

et dans le Jura, personne n’a été chargé de l’accompagnement de ces malades. Ce sont pour le moment les aumôniers des hôpitaux, ceux des prisons ou

bien ceux qui s’occupent plus précisément des toxicomanes qui assistent les

sidéens.

Dans le canton de Vaud, par contre, un prêtre catholique de rite maronite, l’Abbé Maroun Tarabay a été nommé cet été par Mgr Pierre Mamie, évêque

de Lausanne, Genève et Fribourg, pour «un ministère d’accompagnement des

personnes touchées par le sida». Il a reçu une formation spéciale pour cette tâche qu’il assume au CHUV, au Centre du Levant, spécialisé dans la lutte contre la toxicomanie, ou encore, dans la maison pour malades du sida

qui vient de s’ouvrir ce mois-ci à Lausanne.

Chaque malade est différent : seul le regard de la foi…

Pour l’abbé Tarabay, chaque sidéen est différent. La solitude du malade

et l’attitude de l’entourage et de la famille sont diverses, et dépendent

notamment de l’origine du sida pour le malade. En effet, si le malade est

toxicomane, la rupture avec l’entourage a été antérieure à la maladie et

causée par la consommation de drogues. Par contre, l’homosexuel est nettement plus entouré : les homosexuels ont d’ailleurs été les premiers à prendre des mesures de prévention contre la propagation de la maladie.

Le vicariat épiscopal vaudois a déclaré, lors de la nomination de l’abbé

Tarabay, que l’»accompagnement spirituel par des personnes particulièrement

compétentes ne dispense pas de nous situer chrétiennement face à celles et

ceux qui sont atteints par le sida, tout particulièrement lorsque leur durée de vie est comptée. Dans les rapports humains de chaque jour, qu’il

s’agisse de la profession, des loisirs, de l’habitat, regarder le sidéen

comme un être à part entière évitera à notre société de créer un nouveau

ghetto. Le regarder comme une personne ayant aux yeux de Dieu la pleine

dignité d’homme… Cela relève de la foi».

De leur côté, l’Institut d’éthique sociale de la Fédération des Eglises

protestantes de la Suisse et la Commission nationale suisse Justice et Paix

de l’Eglise catholique romaine ont publié ensemble l’an dernier une brochure intitulé «Sida – Le retour de l’angoisse?» (1). Elle traite la notion de

SIDA comme «signe des temps», l’analyse afin de mettre en évidence les problèmes de société liés à cette maladie et de proposer des orientations éthiques pour y faire face. (apic/bd)

La brochure «SIDA – Le retour de l’angoisse» compte 76 pages et peut être

obtenue au prix de 10 francs (+ port) à l’Institut d’éthique sociale de la

FEPS (Terreaux 10, 1003 Lausanne) ou auprès de la Commission Justice et

Paix (CP 1669, 3001 Berne).

Encadré

Caritas Suisse aide à combattre le sida dans le tiers-monde

La situation des malades du sida est bien plus dramatique dans le tiersmonde qu’en Europe, note l’oeuvre d’entraide catholique Caritas Suisse. Elle collabore ainsi à la mise sur pied d’ateliers de réflexion sur le sida

dans les pays en voie de développement comme le Brésil, le Togo et l’Ouganda. Elle appuye des projets et des programme de soutien à des mesures intégrées de lutte contre le sida. Caritas participe financièrement à des projets au Brésil (7538 cas déclarés de sida en 1989), au Chili (125 cas), en

Ouganda (7375 cas), en se souvenant que les cas déclarés ne sont que la

partie visible de l’iceberg. Du point de vue financier, Caritas Suisse a

soutenu un programme de lutte contre le sida pour un montant de 25’000

francs, au Chili pour 99’800 francs, en Ouganda pour 244’000 francs.

Dans les pays du tiers-monde, c’est dans les régions les plus pauvres où

les médias classiques ne pénètrent pratiquement pas que la population reste

dans l’ignorance, dans les villes comme dans les campagnes. Pourtant les

Eglises locales et les communautés, de même que les organisations villageoises auxquelles les collaborateurs ecclésiaux ont accès, participent aux

campagnes de conscientisation sur le sida et bénéficient de ce fait du soutien des oeuvres d’entraide. Les Eglises locales offrent une éducation qui

place plus haut la valeur de la relation familiale que l’idée suggérant

qu’une plus grande sécurité dans la promiscuité suffirait à protéger la vie

menacée, note Caritas Suisse.

L’oeuvre d’entraide catholique rappelle finalement – sur la base des expériences vécues dans des ateliers de réflexion sur le sida – que le sida

«n’est ni importé d’Afrique, ni limité aux «homos», «junkies» et hémophiles, mais représente une tragédie qui nous concerne tous, indépendamment du

sexe, de la race, de la classe sociale, de l’âge, des tendances sexuelles

ou de l’état civil…». (apic/bd)

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