Bientôt des Noël sans sapin, sans crèche. et sans Jésus?

Au nom de la laïcité. et d’un «Noël politiquement correct»

Pierre Rottet, de l’Apic

Fribourg, 23 décembre 2004 (Apic) Le monde chrétien s’apprête à fêter Noël. Un Noël vidé peu à peu, sinon de son sens religieux, du moins de certains de ses symboles, pourtant puisés dans la tradition. Le «politiquement correct» ne les veut plus, à l’heure où la laïcité prend la forme d’une nouvelle religion. Etrange comportement, qui interroge un évêque britannique: «On nous dit que c’est pour respecter les gens qui ont d’autres convictions religieuses». Or, constate-t-il, vous entendez rarement des personnes d’autres confessions que la foi chrétienne se plaindre de Noël».

Le débat sur l’interdiction du foulard dans les écoles publiques en France s’est aujourd’hui étendu à Noël et à ses symboles, y compris en Grande-Bretagne, en Italie ou aux Etats-Unis. Cela, au nom du «respect» de la laïcité à tout prix. Poésies et chants de Noël passent à la trappe dans certaines écoles, tout comme sont évités les crèches, le papa Noël cher aux enfants, et même le sapin de Noël.

Récemment, au grand étonnement de la majorité des élèves d’un lycée de Lagny-sur-Marne, en France, un sapin de Noël a ainsi été retiré, avant d’être réinstallé, après la grogne de la plupart des élèves. Raison invoquée par le recteur de l’établissement: la présence de ce sapin était contestée. «Des élèves s’étonnaient du non respect, selon eux, du principe de laïcité. J’ai donc décidé de retirer le sapin afin d’avoir un débat avec tous les élèves et leur expliquer qu’il s’agit d’un symbole festif et non religieux», a expliqué le proviseur Thierry Vieusses. «Débile», ont rétorqué la plupart des étudiants, hostiles au retrait de ce sapin. Ce dernier a été rétabli. Mais dans le réfectoire, et non dans le hall d’entrée où il avait été dressé.

Le sapin n’est plus le «roi des forêts» non plus aux Etats-Unis, du moins dans la localité de Pasco, en Floride, où les autorités ont interdit la présence du sapin dans les édifices publics. Le procureur ayant conclu le plus sérieusement du monde que l’objet du litige constituait un symbole religieux.

En France toujours, la loi sur la laïcité s’était déjà invitée lors de la traditionnelle fête de la Saint-Nicolas. Les enseignants de l’école maternelle de Coudekerque-Branche (Nord), n’ont voulu ni de la fête ni de la figurine en chocolat, destinée aux enfants. Surtout que le personnage de Saint-Nicolas était surmonté de la mitre de l’évêque, sous laquelle se trouvait une petite croix, grattées par les éducateurs. Les dignes éducateurs ayant considéré que la croix et le missel du personnage étaient contraires à la loi sur la laïcité.

Même Jésus est de trop

Les enseignants français ne sont cependant pas les seuls à être atteints de la «laïcitémania». Rejoints qu’ils sont dans l’absurde par une enseignante de Côme, dans le nord de l’Italie. Qui n’a rien trouvé de mieux que de biffer le nom de Jésus d’un chant de Noël, par égard, a-t-elle assuré, aux musulmans de sa classe. Alors que les parents, de leur propre aveu, n’avaient jamais rien demandé. Les élèves ont été avisés que lors du concert de Noël de cette année, le nom de «Jésus» sera remplacé par «vertu» dans le chant populaire «Buon Natale in allegria» (Joyeux Noël dans la gaîté). D’autres écoles italiennes ont suivi cet exemple. En renonçant tout simplement aux crèches et aux chants de Noël.

La Grande-Bretagne n’est pas en reste avec sa notion d’un Noël politiquement correct. Qui fait toutefois grincer des dents les Britanniques. Les tentatives pour expurger toute référence au christianisme dans les célébrations de Noël, prétendument pour ne pas offusquer les autres religions, suscitent en effet un beau tollé dans le pays. Tout a commencé par la décision du Premier ministre Tony Blair de faire imprimer deux cartes de voeux cette année: l’une, destinée aux non-chrétiens, était accompagné du message «Meilleurs voeux pour la Nouvelle Année», omettant toute référence à Noël. L’autre, destinée aux chrétiens, portait la mention traditionnelle: «Meilleurs voeux de Noël et de Nouvel An».

Les dirigeants de la bibliothèque de High Wycombe, à l’ouest de Londres, ont pour leur part refusé des affiches annonçant un concert de cantiques de Noël. Motif: cela peut déranger les autres religions. Problème: la même bibliothèque a organisé une fête pour célébrer l’Aïd al- Fitr, marquant la fin du ramadan, le mois sacré du jeûne musulman. Même la Croix Rouge du pays n’échappe pas à ce «politiquement correct». Puisqu’elle a décidé de ne pas vendre dans ses boutiques des calendriers de l’Avent qui contiendraient des représentations de Marie ou Joseph.

Ecoliers pénalisés

Les anecdotes sont nombreuses: ainsi un repas de Noël de bureau a été rebaptisé «repas de fête». et jusqu’à une rue de Londres où les illuminations ne portent plus le mot «Noël»… Des écoles publiques dans le pays ont aussi été gagnées par le phénomène. Nombre d’entre elles auraient également renoncé à organiser les fameuses «Nativity Plays», des pièces de théâtre mettant en scène les écoliers qui rejouent l’histoire de Noël, déguisés en bergers, anges, Marie et Joseph, devant un auditoire de parents attendris. Des spectacles éliminés. de peur qu’ils n’embarrassent les enfants musulmans, juifs ou hindous. Dans l’esprit des censeurs, il va sans dire.

Un avis que partage l’évêque de Lichfield, Mgr Jonathan Gledhill: si certains «ont un problème avec le mot Noël, ce n’est pas le cas des gens appartenant à d’autres religions, qui n’y trouvent rien à redire. On nous dit que c’est pour respecter les gens ayant d’autres religions. Mais c’est étrange, parce que vous entendez rarement des personnes d’autres confessions que la foi chrétienne se plaindre de Noël».

A Washington même, Noël est devenu un mot à utiliser avec prudence, y compris du côté du pouvoir, donc du président Bush, lui qui n’a pourtant pas hésité à parler de croisade chrétienne, du bien contre le mal pour aller guerroyer en Afghanistan puis en Irak. Aujourd’hui, il prend des gants pour parler de Noël. En terminant l’autre jour sa conférence de presse de fin d’année, il a souhaité aux journalistes «Joyeuses vacances» et non «Joyeux Noël». Une expression désormais à éviter pour ne pas froisser les susceptibilités.

Vantée comme la période de la concorde, Noël est en effet devenue, ces dernières années aux Etats-Unis, un sujet de discorde et de débat sur la manière de célébrer les fêtes de fin d’année sans promouvoir la religion au détriment des non-chrétiens. Des grands magasins, comme Macy’s, offrent ces temps des décorations proclamant de «Joyeuses Vacances» ou de «Meilleures fêtes». Mais pas de «Joyeux Noël». Le système éducatif public emboîte le pas. Des écoles du New Jersey (nord-est) ont ainsi banni toutes les chansons de Noël, même instrumentales. Les organisateurs d’une fête de fin d’année à Wichita (Kansas) allant jusqu’à rebaptiser leur sapin de Noël en «arbre de la Communauté». (apic/pr)

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