Irak: Les oulémas sunnites accusent des dirigeants chiites de «purification ethnique»

Guerre larvée entre sunnites et chiites et influence de l’Iran

Bagdad, 3 septembre 2003 (Apic) L’assassinat vendredi dernier à Nadjaf du dignitaire chiite Mohammed Bakr al-Hakim, tué dans un attentat sanglant à la voiture piégée, a fait encore monter la tension entre sunnites et chiites irakiens, qui se livrent une guerre de moins en moins larvée.

Signe parmi d’autres de cette vieille opposition entre chiites (60% de la population) et sunnites: la destruction de banderoles de deuil posées en l’honneur de l’ayatollah Bakr al-Hakim dans la mosquée Saddam de Tikrit, fief des sympathisants de Saddam Hussein, incendiées mardi soir par des inconnus.

Ali Khamenei accusé de jeter de l’huile sur le feu

Dans une prise de position alarmiste, les oulémas sunnites ont accusé mardi 2 septembre des dirigeants chiites radicaux de pratiquer contre eux la «purification ethnique» et de confisquer leurs mosquées. Ils dénoncent également l’influence grandissante du puissant voisin iranien.

Les oulémas sunnites d’Irak affirment que le guide suprême de la Révolution iranienne, l’ayatollah Ali Khamenei, jette de l’huile sur le feu entre sunnites et chiites en Irak. Leur instrument serait le jeune chef radical Moqtada Sadr, fils de Mohammad Al Sadr, haut dignitaire chiite assassiné durant le régime de Saddam Hussein. Les chefs de la plus importante minorité religieuse musulmane en Irak – longtemps favorisée par le régime de Saddam – dénoncent la «purification ethnique» dont seraient victimes les sunnites de la part de certains chefs chiites.

Une «balkanisation» de l’Irak

Les chefs religieux sunnites déclarent que Moqtada Sadr – figure de proue dans la lutte pour le pouvoir au sein de la communauté chiite – s’est radicalisé depuis sa dernière rencontre avec Ali Khamenei en Iran. Selon Cheikh Abdel Salam al-Koubeissi, porte-parole du Comité des oulémas sunnites, «l’Iran est entré sur la scène irakienne». Téhéran ne souhaiterait pas la collaboration entre chiites et sunnites et la fraternisation entre les mosquées sunnites et les «husseiniyeh», les lieux de culte chiites. Et de remarquer qu’en Iran, la minorité sunnite se sent discriminée et n’a pas de lieux de cultes. «Les sunnites représentent 30 % de la population en Iran mais n’ont droit qu’à une seule mosquée à Téhéran et, encore, elle se trouve dans un hôtel», lance Cheikh Koubeissi. Les oulémas craignent désormais des attaques visant des mosquées sunnites en Irak.

Moqtada Al-Sadr au centre de la polémique

Le Comité des oulémas sunnites déplore également la «purification ethnique» contre les sunnites menée par certains leaders chiites dans les villes saintes de Nadjaf et Kerbala. Ainsi, les mosquées al-Hamza et Hassan ben Ali, les seules en mains sunnites dans les villes saintes chiites de Nadjaf et Kerbala, ont été confisquées. Cheikh Koubeissi souligne que «vider Nadjaf et Kerbala de la présence sunnite, c’est quelque chose de grave qui ressemble à une purification ethnique et signifie la balkanisation de l’Irak». Les chiites sont encore accusés de s’être emparés de 16 mosquées dans le reste de l’Irak, dont 12 à Bagdad.

Le principal rival de Bakr Al-Hakim, le leader chiite qualifié de «modéré» par les médias occidentaux, était Moqtada Al-Sadr, un jeune chef religieux qui veut faire de l’Irak un Etat islamique. Ce jeune leader radical a pris des positions clairement anti-américaines. (apic/orj/bbc/be)

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