La pratique religieuse décline d’année en année

Pays-Bas: Regard sur l’évolution religieuse depuis 40 ans

Utrecht, 10 août 2001 (APIC) Au cours des quatre dernières décennies, le nombre des catholiques aux Pays-Bas a légèrement augmenté (de 5 à 5,2 millions), mais la proportion des catholiques par rapport à la population globale a baissé de 40 à 33 %. Les 2,7 millions de fidèles qui participaient régulièrement à l’eucharistie en 1960 n’étaient plus que 500’000 en 1996, soit une baisse de 81%. La pratique religieuse chute: participation à la messe, mariages, baptêmes, premières communions et confirmations en baisse. Seules les funérailles échappent à cette chute.

Cette évolution ne surprend pas tellement les spécialistes. Dans un rapport qu’ils viennent de publier à ce sujet, le professeur José Sanders de l’Institut catholique de statistiques religieuses (KASKI) et le professeur Theo Schepens de la Faculté de Théologie de Tilburg rappellent que les chiffres de la pratique religieuse déclinent depuis des années aux Pays-Bas, comme d’ailleurs dans plusieurs autres pays européens.

La participation à la messe dominicale n’est pas le seul indice d’une baisse dans la pratique religieuse. Entre 1960 et 1996, le nombre annuel des baptêmes est passé de 108’000 à 43’000 (- 62%), celui des premières communions de 98’000 à 43’000 (-54%), celui des confirmations de 79’500 à 31’500 (- 60%) et celui des mariages à l’église de 35’500 à 12’000 (- 66%).

Seul un rite religieux a connu une augmentation significative: les funérailles religieuses sont passées de 33’500 à 39’000, soit une hausse de 17%, que des sociologues expliquent en partie par l’absence de véritables propositions «alternatives» de célébration en dehors de la sphère religieuse.

Puisqu’il y a proportionnellement moins de catholiques et surtout moins de catholiques pratiquants, il y a aussi moins de vocations à la prêtrise. Entre 1960 et 1965, c’est-à-dire à l’époque même du Concile Vatican II, pas moins de 278 prêtres ont été ordonnés dans les diocèses des Pays-Bas. Entre 1996 et 1998, le nombre des ordinations n’était plus que de 31, soit une baisse de 89%. Il est vrai que, dans ces mêmes décennies, les diocèses néerlandais ont connu une hausse spectaculaire d’autres engagements durables au service de l’Eglise: alors que le nombre des prêtres séculiers passait de 4’175 à 1’625(-61%), le nombre des diacres permanents bondissait de 28 à 245 (+775%!) et celui des animateurs ou animatrices en pastorale augmentait de 143à 775 (+441%).

Vieillissement

Dans cette évolution, souligne le rapport conjoint du KASKI et de la Faculté de Théologie de Tilburg, tout ne s’explique pas par des facteurs religieux. Ainsi, les communautés catholiques à l’époque de Vatican II étaient formées de fidèles qui étaient entrés, comme tous leurs compatriotes, dans les «glorieuses années soixante» à la faveur du renouveau d’après la guerre. La bonne santé du catholicisme de l’époque n’est pas un indice de foi supérieure: elle doit beaucoup au «boom» de la natalité, à la reprise économique et à leurs répercussions dans l’essor des constructions familiales et des institutions paroissiales. La moyenne d’âge des catholiques néerlandais, il y a quarante ans, était d’ailleurs légèrement inférieure à celle de la population du pays. Aujourd’hui, la proportion s’est nettement inversée. Le catholicisme néerlandais a d’une certaine manière vieilli.

Mais au fait, en quoi aurait-il vieilli par rapport aux aspirations des jeunes générations qui se sont éloignées de l’Eglise? «La perte de membres qu’enregistre l’Eglise catholique n’est pas un phénomène isolé, expliquent les auteurs du récent rapport. Il fait partie d’un changement de société à grande échelle et qui s’explique par un recul de l’attachement aux institutions. Les gens ont de moins en moins tendance à se considérer comme membres d’une grande institution sociale; que ce soit une Eglise, un parti politique ou un syndicat, les gens sont beaucoup moins portés à s’y inscrire. C’est un changement qu’on observe dans toute l’Europe. L’Eglise n’y échappe pas et elle ne peut pas y faire grand-chose».

Au vu des grandes tendances observées sur quatre décennies, les professeurs Sanders et Schepens notent d’ailleurs que «l’évolution en cours n’est pas terminée». Il faut donc s’attendre encore, préviennent-ils, à un léger déclin de la fréquentation régulière de l’église: elle concerne encore 14% de la population du diocèse de Groningen, mais elle n’atteint plus 10% dans le diocèse de Breda.

Recul général

Ces données s’appuient sur un recensement officiel et réguliers des catholiques. Qu’en est-il des autres Eglises? On ne dispose pas ici de statistiques tirées d’un recensement, mais de résultats d’une enquête menée en 1996 sur la base d’un échantillon représentatif de 1300 personnes. Pour l’ensemble des Eglises des Pays-Bas, le principal enseignement du sondage portait sur un net recul de l’adhésion institutionnelle: en 1966, 63% des Néerlandais déclaraient encore se rattacher à une Eglise; ce pourcentage n’était plus que de 43% trente ans plus tard.

Sur les 1300 répondants de 1996, 270 (21%) se déclaraient catholiques: une proportion moindre que celle des baptisés enregistrés par l’Eglise catholique. Or, parmi ces catholiques, seuls 17% (contre 61% trente ans plus tôt) ont affirmé une foi en un Dieu personnel, la plupart (58%, contre 35% en 1966) exprimant désormais leur adhésion à une force supérieure impersonnelle. Dans la foulée, la foi en une vie après la mort est tombée de 71% à 45%. Plus spectaculaire encore est l’évolution suivante: en 1966, 83% des catholiques des Pays-Bas se disaient convaincus «qu’il est important d’annoncer l’Evangile»; ils n’étaient plus, en 1996, que 32% à partager cette conviction.

Qu’en sera-t-il dans cinq ou dix ans? Les chercheurs du KASKI se refusent à toute prédiction. L’évolution, observent-ils, réclame plutôt une sage adaptation: «Il en va toujours autrement qu’on ne l’a prévu». (apic/cip/ksk/pr)

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