Le droit à la vérité sur St. Jean du Désert

Israël: Mise au point de la Custodie de Terre Sainte après l’évacuation forcée des melkites

Jérusalem, 14 mars 2001 (APIC) «Faire la charité dans la vérité»: c’est ce qu’entend faire la Custodie de Terre Sainte (1) après l’écho donné dans la presse et les lettres envoyées par le Père Jacques Langhart aux communautés religieuses de Jérusalem suite à l’expulsion forcée de sa communauté du monastère de St-Jean du Désert. «Qu’il faille porter les différends des communautés religieuses devant les tribunaux non chrétiens, c’est triste, conviennent les franciscains. (…) Mais le droit canon en vigueur exige que les contrats passés entre les différentes communautés soient formulés selon les lois civiles du pays où l’on se trouve».

Les franciscains de Terre Sainte, a-t-on pu lire dans la presse israélienne (»Haaretz» et «Jérusalem Post») ont fait évacuer par la police israélienne le monastère St-Jean du Désert, à l’ouest de Jérusalem, loué par la petite communauté des moines grecs-catholiques de la Théophanie, un nouveau mouvement religieux venu de France. Après une longue querelle devant les tribunaux, les moines melkites – catholiques de rite oriental unis à Rome – ont dû en effet quitter ce couvent, où aurait vécu Jean-Baptiste selon la tradition, qu’ils louaient depuis 1975. Le bâtiment, rénové et bien entretenu par ses locataires, recevait de nombreux visiteurs israéliens – près de 30’000 personnes l’an dernier, selon le prieur du monastère. «C’est comme l’Inquisition», avait lancé ce dernier lors de l’évacuation forcée.

Sans faire de polémique, la Custodie entend porter à la connaissance des chrétiens «scandalisés» par son attitude les faits tels qu’ils se sont déroulés.

Un contrat qui n’est pas respecté

C’est en 1978 que la Custodie a confié sa propriété de St-Jean du Désert (6,1 hectares) à trois membres de la Théophanie, dirigée par le Père Jacques Langhart, pour la somme symbolique de 200 dollars. En 1980, le patriarcat grec melkite catholique y érige un monastère qui de soi est perpétuel, ce dont la Custodie ne sera informée qu’indirectement par le tribunal israélien en 1994. Les locataires marquent leur volonté de s’emparer de la propriété, notamment en faisant disparaître le blason de la Custodie et l’inscription «Patriarcat Grec Melkite Catholique de Jérusalem». A la suite des protestations du Père Custode, une nouvelle inscription est placée: «Monastère Grec Melkite Catholique St-Jean du Désert».

En 1984, le Custode demande au Père Langhart de rédiger un nouveau contrat limitant à 0,5 hectares le terrain à disposition des locataires. Ce n’est qu’en 1988 que le contrat est signé. Aucune mention n’est faite du Patriarcat Grec Catholique ni d’un institut quelconque. Le loyer reste inchangé.

En 1992 la Custodie constate que le contrat n’est pas respecté. Non seulement les locataires ont repris possession des 6 hectares, mais des changements ont été effectués dans la propriété – la croix de Terre Sainte a été enlevée de l’entrée – et dans le couvent. La Custodie décide alors d’augmenter le loyer en fonction des lois civiles du pays. Les locataires refusent le nouveau contrat, déclarant qu’ils ont le droit de propriété et que leur contrat est protégé. Ils refusent aussi de recevoir un représentant de la Custodie envoyé au monastère. Une invitation à rencontrer le Custode reste sans réponse. Et quand, après un silence inexpliqué, l’avocat de la Custodie exige que la Croix de Terre Sainte retrouve sa place à l’entrée, la réponse négative est suivie d’une autre prise de position. Un nouvel écriteau portant l’inscription «Monastère Grec Melkite Catholique Jean du Désert – Protégé par le Patriarcat Grec Catholique» est placé à l’entrée du couvent.

Une décision du tribunal

Pareille attitude amène la Custodie à faire appel à la Justice en 1994 pour exiger le respect du contrat. Au juge d’instance, les locataires répondent que la Custodie n’ayant pas une personnalité juridique, elle n’est pas en mesure d’intenter un procès. Enfin, les locataires ne sont pas les trois membres de la communauté qui ont signé le contrat initial, mais une Association de grecs melkites.

Le 18 octobre 1995, les locataires reconnaissent que le tribunal civil est compétent pour juger le différend. Le 3 juillet 1996, le tribunal civil prononce une sentence invitant les locataires à quitter le couvent dans les 45 jours. En mars 1999, ceux-ci vont en appel, affirmant qu’ils sont locataires protégés et qu’en cas d’abandon de la propriété, ils exigent une indemnisation de 300’000 dollars. Le 17 juin 1999, la cour d’appel confirme le verdict du juge d’instance. L’avocat du Père Langhart signe le document du tribunal, qui a valeur de décision, à savoir qu’il faudra quitter les lieux avant le 31 décembre 1999.

En décembre 1999, une dernière tentative est organisée pour résoudre le problème. Dans le contexte de l’année jubilaire, il est décidé que les locataires resteront sur la propriété jusqu’au 31 décembre 2000. En septembre, octobre et novembre, ceux-ci sont avisés par lettres qu’ils devront quitter les lieux pour la fin de l’année. En décembre 2000, les locataires font un nouveau recours en justice et exigent une indemnité d’un million de dollars pour les dommages moraux encourus; au surplus, la propriété n’appartiendrait pas à la Custodie.

Le 25 décembre 2000, le tribunal enjoint les locataires de quitter les lieux le 31 décembre. En janvier 2001, un huissier porte une lettre à la connaissance des moines les sommant de quitter les lieux le 28 février. Le Père Jacques Langhart mobilise alors la presse locale pour «provoquer le scandale».

En procès également en France

Après avoir énuméré ces faits «qui ne demandent pas de grands commentaires», la Custodie dit avoir usé de patience avec le Père Jacques Langhart. Elle signale que ce dernier est en procès également en France: l’association «Les Théophanes», qu’il a «dépouillée abusivement de ses biens», a gagné le procès qu’elle lui a intenté en décembre 1996 au tribunal de Carcassonne. Le Père Langhart a été en appel et le jugement sera prononcé le 11 avril par la cour d’appel de Montpellier. Affaire à suivre… (apic/cip/bb)

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