Israël: Le grand rabbinat prêt à accepter le mariage civil «dans certains cas» très limités

Le poids des religieux ultra-orthodoxes décisif à la Knesseth

Jérusalem, 6 janvier 1999 (APIC) Le grand rabbinat d’Israël est prêt à accepter le mariage civil «dans certains cas», en fait seulement pour les couples dont les deux partenaires ne peuvent être mariés selon les prescriptions légales juives de la «halakah». En Israël, le mariage ne peut se faire ailleurs que devant un rabbin orthodoxe, ce qui provoque des problèmes insurmontables pour des milliers de couples, notamment parmi les immigrants.

«Le grand rabbinat ne s’opposera pas à un système de mariage civil dans des cas où aucun des partenaires n’est reconnu par le rabbinat comme juif ou les partenaires ne peuvent être mariés selon la halakah», a déclaré aux députés de la Knesseth le grand rabbin sépharade Eliahu Bakshi-Doron.

Dans une rencontre avec le chef de file du parti des immigrants russes Yisraël Ba Aliya, Roman Bronfman, et le président de la Commission des lois Hanan Porat, du Parti National Religieux, Bakshi-Doron a reconnu qu’il y avait des cas «pénibles» pour lesquels le mariage civil pourrait être pris en considération. Un projet de loi du député Bronfman sur le sujet est passé en première lecture et est maintenant devant la Commission des lois pour être préparé pour la seconde et la troisième lecture.

«L’approbation du grand rabbinat est une percée sans précédent et prouve qu’il est possible de trouver un accord même sur des sujets controversés, quand nous parlons des problèmes réels concernant les gens» a déclaré Bronfman. «Le projet de loi a pour but de trouver une solution au problème de milliers de couples qui ont immigré ces dernières années et n’ont pas de possibilité de se marier en Israël.» Roman Bronfman a précisé que le problème vient du fait que tous les mariages in Israël sont contrôlés par l’establishment religieux. Ainsi, par exemple, si un couple de nouveaux immigrants n’est pas reconnu comme un juif selon la «halakah», par le grand rabbinat, il n’y a toujours pas moyen à l’heure actuelle d’obtenir un mariage reconnu par une autre institution.

Des couples toujours interdits de mariage

Zvi Rosen, porte-parole du grand rabbinat, a précisé qu’un tel accord sur le mariage civil valait uniquement pour les couples où les deux partenaires sont considérés comme non juifs selon la «halakah», la loi religieuse. Le grand rabbin Bakshi-Doron a exclu d’étendre cette possibilité aux couples où l’un des partenaires est considéré comme juif ou à un couple juif incapable de se marier selon la «halakah». Ces couples interdits de mariage incluent le «cohen» (membre de la caste des prêtres) qui n’a pas le droit de marier une femme divorcée ou convertie, la femme divorcée pour cause d’adultère, ou toute personne considérée comme un «mamzer», l’enfant ou le descendant d’une relation interdite, qui ne peut marier personne d’autre qu’un autre «mamzer» ou un converti. Le projet du député Bronfman étendrait le mariage civil tant aux non-juifs qu’à ceux qui sont interdits de mariage par la «halakah». Le rabbin Uri Regev, directeur du Centre pour l’Action religieuse du Mouvement des juifs réformés en Israël, a rejeté tant le projet de loi plus large du député Bronfman que la version plus restrictive que le grand rabbin Bakshi-Doron est prête à accepter.

Création d’une «sous-caste d’intouchables»

«Dans les deux cas, a affirmé le rabbin Regev, la loi va créer une sous-caste d’intouchables, seulement autorisés à se marier entre eux». Cette loi, a-t-il insisté, va contre les intérêts des immigrants de l’ancienne Union soviétique et contre le principe des droits de l’homme, contre les idéaux de la liberté religieuse». Au cours de la rencontre avec les députés, Bakshi-Doron a également répété l’opposition du grand rabbinat à s’ouvrir aux courants non-orthodoxes. Pas question notamment de permettre à d’autres tendances que celles des rabbins orthodoxes – par ex. aux membres du mouvement de la réforme ou aux rabbins conservateurs – de faire partie des instituts préparant les convertis en vue de leur conversion au judaïsme.

Un juge dans le collimateur des ultra-orthodoxes: protection policière

Bakshi-Doron, cependant, ne serait pas opposé à l’idée de biffer l’inscription de la nationalité/religion sur les cartes d’identité israélienne, une source permanente de discriminations pour les Israéliens non juifs ou non reconnus comme tels, dénoncent les organisations de défense des droits de l’homme. La polémique a rebondi la semaine dernière après que le président de la Cour de district de Jérusalem, Vardi Zeiler, a jugé que 23 convertis par des rabbins de la Réforme et du mouvement conservateur peuvent être reconnus comme juifs pour des besoins civils. Ce juge a reçu une protection policière et la police de Jérusalem monte la garde devant sa maison, a révélé la presse israélienne, car sa décision a soulevé la colère dans les milieux fanatiques ultra-orthodoxes.

Les médias israéliens ont révélé mercredi que le grand rabbinat a entre-temps ordonné aux conseils religieux où siègent désormais – après un arrêt de la Cour suprême israélienne qui a suscité l’ire des ultra-orthodoxes – des représentants «réformés» et «conservateurs» de ne pas se réunir. Ainsi, les rabbins orthodoxes n’auront pas à travailler avec des non-orthodoxes.

Les manœuvres des milieux religieux: une gifle à la Cour suprême israélienne

Le rabbin Simcha Hacohen Kook, qui siège au Conseil national du grand rabbinat, en a informé mardi la Commission de la Constitution, de la loi et de la justice de la Knesseth. Le ministre des Affaires religieuses Eli Suissa, du parti orthodoxe sépharade Shass, appuie cette démarche qualifiée par Yossi Sarid, leader du parti de gauche laïque Meretz, de «laide» et «antisémite». Le député travailliste Ophir Pines-Paz l’a qualifiée de claque à la figure de la Cour suprême israélienne.

Les milieux religieux cherchent ainsi par tous les moyens à contourner la décision de la Cour suprême. Grâce à leur poids déterminant à la Knesseth, ils ont réussi à faire passer cette semaine en première lecture une loi imposant aux membres des conseils religieux – qui gèrent toutes les affaires de culte en Israël: bains rituels, cimetières, synagogues, etc. – de prêter serment de fidélité à la doctrine orthodoxe prêchée par le grand rabbinat, une promesse que les rabbins non-orthodoxes auront, selon les observateurs, de la peine à faire, en tous cas à tenir. (apic/jpost/haar/be)

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