Rome: Le Saint-Siège est bel et bien intervenu en faveur de l’ex-dictateur Pinochet
Rome, 19 février 1999 (APIC) Le Vatican est bel et bien intervenu auprès du gouvernement britannique en faveur de l’ex-dictateur chilien Augusto Pinochet. Le Saint-Siège a confirmé vendredi 19 février 1999 «qu’il y a eu une démarche diplomatique du Saint-Siège auprès du gouvernement anglais» concernant le général Pinochet. Rome a réagi aux déclarations en ce sens faites le 18 février à Londres à la Chambre des Lords par la Baronne Symons de Vernham Dean. Le Ministère britannique des Affaires étrangères, le «Foreign Office», a refusé de révéler la nature de la demande.
La presse britannique écrit vendredi que le pape Jean Paul II aurait demandé la libération de l’ex-dictateur chilien «pour des raisons humanitaires». Le quotidien «The Daily Telegraph» précise que le pape a mis l’autorité de l’Eglise catholique derrière la campagne pour le retour de Pinochet au Chili. Selon le journal, le pape a demandé au gouvernement britannique l’indulgence pour Pinochet, qui est âgé de 83 ans, en relevant que cela serait dans l’intérêt de la réconciliation de la société chilienne.
Le gouvernement de Londres a confirmé avoir reçu une lettre du Vatican concernant Pinochet, tandis que le Ministère chilien des Affaires étrangères se refuse à tout commentaire. Actuellement, 7 lords-juges délibèrent pour savoir si l’ex-dictateur et sénateur à vie bénéficie de l’immunité diplomatique comme ancien chef d’Etat ou s’il doit être livré à la justice espagnole pour crime de génocide, terrorisme, tortures et enlèvements. C’est le juge espagnol Baltasar Garzon qui mène l’enquête contre l’auteur du sanglant putsch militaire de 1973. La Suisse a également déposé une demande d’extradition du général Pinochet pour la disparition de l’étudiant genevois Alexis Jaccard.
Selon le quotidien «The Times», Lord Lamont of Lerwick a laissé entendre que la démarche vaticane a été entreprise «au plus haut niveau». Rome aurait ainsi reconnu «la grande contribution du général pour protéger la liberté durant la guerre froide.» Selon le Lord britannique, le pape aurait compris «la raison de sauver un pays d’une dictature marxiste». «Le pape est un homme qui comprend l’importance de chaque vie individuelle, mais il comprend aussi la perte de la liberté sous le communisme dont l’Amérique du Sud était menacée». Une opinion qui a déjà fait bondir les défenseurs des droits de l’homme et les familles des victimes de la dictature, la qualifiant de «cynique».
La nature de la démarche vaticane reste pour l’instant secrète
Indiquant vendredi que cette démarche avait eu lieu «il y a à peu près un mois», le porte-parole du Saint-Siège a affirmé «ne pas pouvoir en révéler pour l’instant le contenu», vu son caractère «diplomatique». «Le gouvernement britannique ne le peut pas non plus», a-t-il ajouté, précisant que les informations données dans la presse à ce sujet restent des «spéculations» de la part des journalistes.
La nature de cette démarche pourra «être rendue publique en temps opportun», a encore signalé le porte-parole, «en accord avec le Gouvernement du Royaume Uni», selon «la pratique internationale». Un temps opportun, qui pourrait-être, a-t-il précisé, «à l’issue de l’affaire en question».
Le porte-parole du Saint-Siège a néanmoins indiqué que «l’intérêt du Siège Apostolique» pour cette question «a eu pour origine la demande de l’actuel gouvernement chilien, composé d’une coalition démocrate-chrétienne et socialiste», qui «revendique sa souveraineté territoriale dans les différentes instances internationales et dans le domaine judiciaire».
Le 2 novembre 1998, le Saint-Siège avait déjà confirmé que le Sous-secrétaire des Affaires étrangères du Chili, Mariano Fernandez, avait demandé à pouvoir lui donner des informations sur la question de l’arrestation du général Pinochet le 16 octobre précédent. Mariano Fernandez avait rencontré la veille le cardinal Angelo Sodano, Secrétaire d’Etat du Vatican, lui-même ancien nonce apostolique au Chili. (apic/kna/imed/tim/dt/be)
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