Lausanne: Accompagnement des parents de foetus décédés
Lausanne, 1er avril 1999 (APIC) Au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV), à Lausanne, les bébés morts in utero et laissés aux soins de l’hôpital seront inhumés. C’est la mesure prise depuis quelques semaines une équipe interdisciplinaire chargée de réfléchir au meilleur accompagnement des familles en deuil à cause d’une fausse couche ou d’un avortement thérapeutique. Dorénavant, les corps seront enterrés au cimetière du Bois-de-Vaux dans des tombes personnelles. L’équipe interdisciplinaire espère par là favoriser le travail de deuil des parents.
A l’avenir, le CHUV fera enterrer tous les corps des foetus et des bébés mort-nés de plus de vingt semaines de grossesse. La perte d’un enfant in utero laisse souvent les parents groggy. L’attente extraordinaire de l’éclosion de la vie heurte l’iceberg de la mort. Le choc est si rude que le couple ne se préoccupe pas du devenir du corps du bébé. Pour Laurence Corbaz, sage-femme à la maternité du CHUV, cette initiative «permettra aux parents qui n’ont pas voulu sur le moment s’occuper du corps de leur enfant, de terminer leur travail de deuil». Après quelques semaines ou quelques mois, certains parents reviennent en effet à la maternité. Ils s’enquièrent du sort du bébé et souhaitent connaître l’endroit où il a été inhumé. Jusqu’à maintenant, on les renvoyait à la tombe du souvenir du cimetière lausannois du Bois-de-Vaux, l’endroit où sont entreposées les cendres de tous les corps laissés au CHUV par les familles. Mais cette solution ne satisfait pas les professionnels.
Les corps des bébés mort-nés seront donc inhumés dans de petites tombes personnelles. Un numéro permettra à l’administration d’indiquer le nom de famille de l’enfant enterré à cet endroit. L’équipe interdisciplinaire à l’origine de cette démarche s’est aussi souciée de la bonne santé psychique du personnel hospitalier. «Nous nous occupons des bébés vivants comme des morts. Pour nous, il est important de savoir où vont ces corps et qu’ils sont traités dignement», relève Laurence Corbaz.
En maternité, la mort n’est plus escamotée
«L’enfant à venir est à la fois inconnu, mais aussi très investi parce qu’il représente pour les parents un support de toutes les potentialités. Dans le ventre de la mère, il n’est pas limité par un corps, un sexe, un prénom… comme après la naissance», commente Carole Müller-Nix. Pour cette pédopsychiatre du CHUV, il est important de donner une réalité psychique à la perte. «Le corps est le point d’ancrage de cette réalité. Si ce corps mort n’a pas été vu, les parents peuvent passer à côté de ce qui s’est passé, et demeurer incapables d’accueillir sans difficulté un autre enfant». Néanmoins, ajoute la doctoresse Carole Müller-Nix, il ne s’agit pas d’introduire une sorte de passage obligé. «Certains parents peuvent, sans voir le corps, donner une réalité à ce décès d’une autre manière… par une discussion profonde, par un voyage, par une cérémonie». L’essentiel consiste à marquer l’événement.
Même son de cloche du côté d’un des aumôniers protestants de la maternité du CHUV. Nicolas Long attache une grande importance au rite pour marquer une telle perte. Un rite qui soit en accord avec les convictions des parents. Personnellement, il n’a jamais conduit de service funèbre pour un enfant mort-né de moins de 24 semaines. Depuis peu, il évoque toutefois cette possibilité avec les parents endeuillés. «Des histoires comme celles-là ne se pensent pas seulement. Elles se passent dans le concret. Et nous avons besoin d’endroits où poser nos pieds, où déposer une fleur, où verser une larme…»
Des lois cantonales parfois plus souples que la loi fédérale
Pour pouvoir enterrer les corps des bébés mort-nés laissés à l’hôpital par les parents, le CHUV a obtenu une autorisation de la ville de Lausanne. Au cimetière du Bois-de-Vaux, ces bébés mort-nés seront enterrés dans le secteur des enfants de 0 à 3 ans. Les bébés de moins de 24 semaines pourront l’être grâce au règlement cantonal sur les inhumations qui ne fixe aucune limite pour l’inhumation des foetus. Contrairement à d’autres cantons romands où, en conformité avec la loi fédérale, il est impossible d’inhumer des enfants de moins de 24 semaines parce qu’ils ne sont pas inscrits à l’état civil.
L’an dernier, une famille genevoise a dû attendre neuf mois avant de pouvoir inhumer deux foetus. A cause de ses convictions musulmanes, ce couple ne pouvait envisager une incinération. Dans le canton de Genève la situation vient toutefois de changer. Depuis le 20 mars, une nouvelle loi autorise l’inhumation de tous les enfants mort-nés. Sans limite d’âge ni de grandeur. (apic/spp/pr)
webmaster@kath.ch
Portail catholique suisse
https://www.cath.ch/newsf/lausanne-accompagnement-des-parents-de-foetus-decedes/