Le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) a indiqué à l’ATS à la mi-février avoir concédé – chiffres arrêtés à la fin 2024 – 4,37 milliards de francs de soutien à l’Ukraine en trois ans. La majorité de cette somme (85%) est revenue au Secrétariat d’État aux migrations et a donc été dépensée en Suisse pour l’accueil et le soutien des personnes bénéficiant du statut de protection S. Aujourd’hui, environ 68’000 Ukrainiens et Ukrainiennes ayant fui la guerre vivent en Suisse.
Le reste de l’aide financière a été utilisé, presque exclusivement, à titre d’aide humanitaire et de coopération au développement, notamment pour des projets menés par la Direction du développement et de la coopération (DDC) et par le Secrétariat d’État à l’économie: livraisons de produits de première nécessité, soutien aux systèmes de santé, à la formation professionnelle et aux PME ou au secteur agricole… Certains projets ont une dimension transnationale, précise le DFAE. Près de 50 millions de francs ont ainsi bénéficié à la population touchée par la guerre dans des pays limitrophes comme la Moldavie.
Les Œuvres d’entraide se sont elles aussi engagées auprès de la population ukrainienne dès le début de la guerre, assurant des collectes de fonds et le suivi de projets d’aide sur place. C’est ainsi que Caritas Suisse a reçu depuis le début de la guerre environ 27 millions de francs de dons pour la population ukrainienne et que l’EPER a récolté, pour la seule année 2024, 10,5 millions de francs pour l’aide d’urgence en Ukraine, et 13,5 millions en 2023.
Ce soutien à la population ukrainienne paraît plus que jamais essentiel suite à l’arrêt brutal du financement américain en faveur de la coopération internationale. Mais aussi suite aux propos alarmants – et insistants – tenus par Donald Trump ces dernières semaines. Alors que le conflit entre dans sa quatrième année, et que les perspectives de reconstruction ne sont donc pas à l’ordre du jour, le président américain a déjà déclaré vouloir «récupérer l’argent» envoyé par son pays à l’Ukraine en guise d’aide militaire et économique – soit l’équivalent de 500 milliards de dollars – sous forme de pétrole ou d’un accès préférentiel aux terres recelant des minerais.
L’EPER, sur son site, dit aussi s’inquiéter u durcissement des dispositions d’accueil en Suisse demandé en décembre 2024 par le Parlement. Les personnes réfugiées d’Ukraine ne pourront désormais voyager à l’étranger que pendant deux semaines au maximum. Si elles s’absentent plus longtemps, la protection en Suisse pourra leur être retirée. Les nouveaux arrivants se verront refuser toute protection si leur dernier domicile ne se trouvait pas dans des régions ukrainiennes entièrement ou partiellement occupées par la Russie, ou dans lesquelles des combats plus ou moins intenses ont lieu.
L’œuvre d’entraide des Églises protestantes de Suisse interroge encore les contradictions soulevées par la mise en place du statut S. Les personnes qui en bénéficient jouissent d’une «protection provisoire» axée sur le retour. Mais «parallèlement, les attentes vis-à-vis de leur insertion professionnelle sont élevées, ce qui est contradictoire, estime l’EPER. Depuis le printemps 2024, on attend d’eux qu’ils acceptent un emploi le plus rapidement possible–que le poste corresponde ou non à leurs compétences et à leur potentiel, et sans savoir s’ils pourront rester en Suisse à long terme.» (cath.ch/ag/lb)
Lucienne Bittar
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