Les journalistes catholiques francophones réunis à Rome pour le Jubilé

Les 28e Rencontres internationales Saint François de Sales ont coïncidé cette année avec le Jubilé des médias, organisé à Rome du 24 au 26 janvier. Les journalistes francophones se sont interrogés sur l’identité et la mission de leur profession.

Avec Vatican News

La corporation des journalistes catholiques, rapporteurs du réel dans sa vérité nue et parfois crue, est appelée à «espérer contre toute espérance» (Romains, 4,18).  Et  «l’espérance n’est pas un algorithme», a indiqué le préfet du dicastère pour la Communication du Saint-Siège, inaugurant ces rencontres organisées par la Fédération des médias catholiques. Selon Paolo Ruffini, «le journalisme qui fige le mal sans voir les étincelles du bien trahit la vérité», selon les mots du romancier Italo Calvino.

Rechercher la vérité, chemin pavé d’embûches

Le préfet laïc propose ainsi aux médias catholiques de répondre aux maux de la profession -crise de la presse, IA générative- et à ceux du monde -guerres, climat, migrations, démocratie- par une mise en réseau renforcée. «Nous pourrons être un point de référence pour le débat culturel et gérer le conflit potentiel entre liberté et responsabilité. Saisir les opportunités d’étendre le réseau participatif et créatif du monde catholique», 

Sans tomber dans le piège «d’un optimisme béat» ou «d’un lâche angélisme», Paolo Ruffini a invité les journalistes catholiques du monde francophone «à prendre le risque d’aller à contre-courant» sans «se laisser intimider par les nouveaux conformismes». Sans oublier la vertu de la charité, à l’ère des cris, piloris ou boucs émissaires.

L’Église doit s’exposer, mais ne pas s’imposer

Dans cette même veine, Mgr Bruno Valentin,  présidant le Conseil pour la communication de l’épiscopat français a rappelé qu’«aujourd’hui moins que jamais, l’Église ne peut s’imposer, mais plus que jamais, elle doit s’exposer».

Après la session inaugurale de ces journées romaines, cinq tables rondes se sont succédées, explorant chacune les ressorts de la vocation du média catholique, de sa mission à son avenir, en passant par son positionnement particulier: jusqu’où relayer, accompagner ou interroger la parole de l’Église.

La dialectique entre fidélité et liberté

L’exigence de l’information et le professionnalisme font des médias catholiques des médias «comme les autres», voire porteurs du désir de «faire mieux que les autres», a estimé Karem Bustica, rédactrice en chef de Prions en Église. «On n’achète pas un journal pour sauver son âme, mais pour savoir ce qui s’est passé dans le monde», a rapporté le père Michel Kubler, citant l’un de ses prédécesseurs rédacteur en chef de La Croix dans les années 1950.

Pour leprêtre assomptionniste, l’identité catholique d’un média doit être assumée, qu’elle soit affichée ou non. L’ancien journaliste prône en cela le juste recul, la conjugaison de la lucidité et de l’espérance, le respect sacré des personnes, le refus de la pensée unique ou encore la valorisation d’initiatives de justice, de solidarité et de paix, soulignant aussi le droit au dissensus dans l’Église même.

Des histoires providentielles

Une méthode appliquée par Le Verbe médias, représenté aux journées Saint François de Sales par le journaliste québécois, frère Simon Lessard. Créé il y a cinquante ans à Montréal en réponse à l’appel du Pape Paul VI demandant aux chrétiens de s’impliquer dans les moyens de communications sociales, Le Verbe a opéré une mutation accélérée tant face à la disparition de ses lecteurs pour raisons d’âge qu’au contexte sécularisé, voire anticlérical de la province francophone canadienne. Équipe rajeunie, changement de cible en direction «des chercheurs de sens», ligne éditoriale centrée sur l’espérance, et non plus la critique, ont transfiguré l’identité et la mission du Verbe, fort de plus deux millions de personnes rejointes cette année.

Ligne éditoriale et respect du magistère

Anne Ponce, directrice de la rédaction de La Croix, résume ainsi le rôle d’un média catholique: «Ne pas être un relais de la doctrine, mais l’incarner dans l’événement, mettre en évidence des hommes et des femmes qui sont témoins de l’élan évangélique, être à l’écoute des aspirations contemporaines, et chercher la vérité à travers la complexité du monde». Son homologue de l’hebdomadaire français Famille chrétienne, Antoine-Marie Izoard, y répond à l’aide d’une citation du fondateur des Assomptionnistes: «Toujours travailler pour Rome, quelquefois sans Rome, mais jamais contre Rome». Ces interrogations s’accentuent à l’ère de l’intelligence artificielle, bouleversant les pratiques éthiques des éditeurs de presse. Sollicitée par Mgr Bruno Valentin, taquin, l’un de ses agents génératifs les plus connu a ainsi répondu favorablement à la possibilité d’un avenir pour les médias catholiques. Argumentant d’une sobriété aussi juste que mécanique: «Ces médias peuvent offrir une voix unique et alternative dans un environnement médiatique souvent dominé par des approches séculières. L’enjeu sera de rester fidèle aux principes religieux tout en étant innovant et attractif.» (cath.ch/newsva/mp)

Maurice Page

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