Le pape s’est adressé samedi matin aux recteurs des seize grands séminaires de France, auxquels il faut ajouter le Séminaire français de Rome, fréquenté par des séminaristes de divers pays poursuivant leurs études dans la Ville Éternelle. En plus des recteurs de ces établissements, les recteurs des dix maisons de propédeutique françaises (cursus de discernement précédant l’entrée au séminaire) étaient présents, ce groupe étant à Rome pour un pèlerinage à l’occasion du Jubilé de 2025 afin de réfléchir à l’avenir de leur cursus de formation.
«Boussoles pour les jeunes» qui leur sont confiés, les recteurs ont reçu les conseils articulés autour de trois points du pontife pour la formation des futurs prêtres.
Dans son discours, le pape François a salué cette initiative, soulignant combien les candidats qui se présentent à la porte du séminaire aujourd’hui sont «plus que jamais très différents». «N’ayez pas peur de la diversité, c’est un don!», a-t-il insisté, affirmant que «l’éducation à l’accueil de l’autre» était une garantie de fraternité entre les futurs prêtres.
Le séminaire «ne doit pas chercher à former des clones qui pensent tous de la même façon», a déclaré le pape François aux recteurs des séminaires français. Le pontife a bien insisté sur la cohérence qui doit exister entre la pensée, le cœur et les mains qui doivent mûrir ensemble.
Il a tout d’abord relevé qu’il fallait prendre soin que le candidat à la prêtrise possède «une vraie liberté intérieure», afin qu’il sache «juger et décider avec sa propre tête, parfois à contrecourant ou en courant des risques, sans s’aligner sur des réponses pré-confectionnées ou des préconcepts idéologiques ou sur la pensée unique du moment».
Ensuite, les recteurs doivent veiller à ce que chez les candidats mûrissent «une humanité équilibrée et capable de relations humaines», car le prêtre doit être porté à «la tendresse», à la «proximité» et à la «compassion», qui sont les trois attributs de Dieu. Inutile d’insister, a concédé François, sur «le danger représenté par des personnalités trop faibles et rigides, ou par des désordres affectifs».
«L’homme parfait n’existe pas et l’Église est composée de membres fragiles et de pêcheurs qui peuvent toujours espérer progresser», a-t-il reconnu. «N’ayez pas peur des faiblesses et des limites de vos séminaristes» a-t-il encore exhorté.
Enfin, la formation du séminaire doit tendre vers «l’orientation de la vocation sacerdotale à la mission». «Un prêtre qui fait ›Monsieur l’abbé’», s’est exclamé le pontife, utilisant le français pour cette expression, «n’est pas fait pour la mission, et cela ne va pas. Le prêtre est toujours fait pour la mission». «On ne devient pas [prêtre] pour soi-même mais pour le Peuple de Dieu, pour lui faire connaitre et aimer le Christ» a-t-il insisté, précisant qu’«il est difficile d’imaginer une vocation sacerdotale qui n’ait pas une forte dimension oblative, de gratuité et de détachement de soi, de sincère humilité».
Le pape a adressé ensuite quelques mises en garde aux recteurs: «Soyez attentifs, surtout à l’argent» et «au carriérisme», à la «mondanité», à la «jalousie» et à la «vanité». «L’amour pour Dieu et pour l’Église ne sont alors rien d’autre qu’un prétexte pour l’autocélébration et c’est moche». Le pontife a ainsi ironisé sur ce genre de prêtre «qui ressemble plus à un paon qu’à un prêtre», affirmant que l’amour pour l’Église ne doit pas être un prétexte. Ce n’est pas la première fois que le pape argentin critique cette façon de s’adresser aux prêtres en France.
Il a aussi déploré que certains prêtres finissent progressivement par se «servir eux-mêmes», surtout en ce qui concerne l’argent, insistant sur la beauté d’une vie vécue dans la pauvreté. «Il est difficile d’imaginer une vocation sacerdotale qui n’ait pas une forte dimension oblative, de gratuité et de détachement de soi, de sincère humilité».
S’il n’aborde pas directement la question de la présence de personnes homosexuelles dans les séminaires, le discours du pontife intervient quelques jours après une polémique sur les consignes promulguées la Conférence épiscopale italienne sur cette question.
Dans ce texte validé par le Saint-Siège, les évêques italiens fermaient la porte des séminaires aux personnes ayant des tendances homosexuelles profondément enracinées, mais plaidaient pour un suivi plus approfondi et centré sur le discernement. (cath.ch/vaticannews/imedia/be)
Jacques Berset
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