Le document La formation des prêtres dans les églises d’Italie. Orientations et normes pour les séminaires, a été approuvé par la 78e Assemblée générale de la Conférence épiscopale italienne, qui s’est tenue à Assise du 13 au 16 novembre 2023.
Le texte, qui a obtenu la confirmation du Saint-Siège par décret du Dicastère pour le Clergé, présente un processus de formation au sacerdoce divisé en deux étapes: une première phase de nature initiatique est consacrée à la construction d’une cohérence intérieure. La seconde est dédiée à la découverte du Peuple de Dieu et «à une plus grande implication de la communauté chrétienne dans la formation des candidats au sacerdoce», indique la CEI sur son site.
Le texte, lancé ad experimentum pour trois ans, serait sans doute passé inaperçu sans une phrase affirmant que «le discernement ne doit pas se réduire aux tendances homosexuelles, mais s’inscrire dans une vision globale de la personnalité du candidat». La CEI rappelle toutefois que «la chasteté dans le célibat est une condition indispensable». Les candidats sont également censés ne pas soutenir la «culture gay».
Une ouverture qui n’a pas manqué de provoquer des controverses, notamment dans la presse, en Italie et au-delà. Certains médias saluent une évolution jugée positive, allant dans le sens d’une plus large inclusion au sein de l’Église. Beaucoup critiquent cependant les «conditions» posées pour les candidats homosexuels, les considérant comme «hypocrites ».
«Des règles qui rappellent la politique du ‘don’t ask, don’t tell’ ‘ne demandez pas, ne dites rien’) appliquée pendant des années par l’armée américaine, qui contraignait les soldats gays à vivre dans la hantise d’être chassés des rangs de l’armée si découverts», note ainsi le journal français Le Monde (10 janvier 2025).
Le site d’information italien ilsussidiario.net note ironiquement que «le problème, en fait, n’existe pas: depuis des temps immémoriaux, des homosexuels sont devenus prêtres et ont occupé des postes importants dans la communauté chrétienne sans que personne ne sourcille.» Une réalité confirmée par le pape François à l’occasion d’un trait d’humour inapproprié (pour lequel il s’excusera plus tard) faisant allusion au fait qu’il règnerait au Vatican «une atmosphère de ‘frocciagine’», un terme insultant pour parler des homosexuels.
«Ainsi, ce que nous trouvons aujourd’hui sur la table de la Conférence épiscopale italienne n’est certainement pas nouveau, tout en étant – radicalement nouveau», souligne ilsussidiario.net, puisque le document de la CEI considère «une déclaration explicite d’orientation sexuelle» comme compatible avec le ministère sacerdotal.
Cela alors qu’en 2006, la Congrégation pour l’éducation catholique, avec l’aval de Benoît XVI, avait stipulait que «si un candidat pratique l’homosexualité ou présente des tendances homosexuelles profondément enracinées, son directeur spirituel, ainsi que son confesseur, ont le devoir de le dissuader, en conscience, de procéder à l’ordination». Des déclarations qui peuvent donc sembler se contredire et qui attiseront encore certainement de nouvelles controverses au sein de l’Église.
«Face à ces interrogations, les fidèles, mais aussi les prêtres eux-mêmes, attendent des clarifications», martèle ainsi le site français Tribune chrétienne. Car derrière ces nouvelles normes se joue l’avenir non seulement de la formation sacerdotale, mais aussi de la perception de l’Église dans un monde en quête de repères.» (cath.ch/ag/arch/rz)
En Suisse, des directives similaires à celles de l’Église en Italie ne sont pas à l’ordre du jour, assure l’abbé Nicolas Glasson à cath.ch. Le vicaire épiscopal pour les vocations dans le diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg (LGF) est conscient qu’il s’agit d’un problème délicat, à traiter au cas par cas. Le principe, pour les responsables de séminaires, consiste à exercer un discernement en considérant avant tout la personne sur la base du document de la Congrégation pour l’éducation catholique de 2006. «Le point d’attention est de déterminer ce que peuvent être des ‘tendances homosexuelles profondément enracinées’, comme le décrit le texte du document de la Congrégation pour l’éducation catholique de 2006, note Nicolas Glasson. Est-ce que la personne peut vivre avec ses tendances sans mettre en péril sa vocation?»
Le prêtre fribourgeois souligne qu’il ne s’agit pas ici de stigmatiser l’homosexualité. «Il faut discerner indépendamment de l’orientation sexuelle. Une personne hétérosexuelle peut également avoir une sexualité non assumée qui posera problème. La question est de savoir si le candidat possède un équilibre humain, relationnel, affectif qui lui permettra d’être un prêtre heureux.» RZ
Raphaël Zbinden
Portail catholique suisse
https://www.cath.ch/newsf/italie-controverses-sur-ladmission-des-homosexuels-a-la-pretrise/