Homélie du 12 janvier 2025 (Lc 3,15-16 et 21-22)

Chanoine Olivier Roduit – abbaye de St-Maurice

Homélie pour la fête du Baptême du Seigneur.
«J’attendrai le jour et la nuit. J’attendrai toujours ton retour. J’attendrai car l’oiseau qui s’enfuit vient chercher l’oubli dans son nid.»

Pourquoi donc citer ces paroles de la belle chanson de Dalida créée en 1976 déjà? L’Évangile nous dit que le peuple venu près de Jean-Baptiste était en attente. Si Dalida attendait le retour de son bien-aimé, nous ne savons ce qu’attendaient les gens rassemblés, autour de Jean, au bord du Jourdain.

Attendre est difficile et pénible, surtout lorsque l’on ne connaît pas la durée de cette attente. Pensez à l’attente du résultat d’une épreuve ou d’un examen, à la venue des prochaines vacances, à la fin d’une période de vie difficile. Même si elle est parfois emplie de joie, comme lorsqu’un enfant est en espérance, l’attente est toujours une sourde inquiétude… Comment cela va-t-il se passer en réalité? Et l’on s’aperçoit que la réalisation est toujours différente de ce que nous avions imaginé. Attendre est parfois paralysant, car on ne sait quoi faire…

Dalida le chantait si bien: «Le temps passe et court en battant tristement dans mon cœur si lourd.» Mais elle ajoute: «Et pourtant j’attendrai ton retour.» La vie nous apprend qu’il ne faut pas rester sans rien faire, qu’il nous faut vivre le temps présent, ouvert à l’inconnu.

Dans cette page d’Évangile, le peuple pressent bien que la prédication de Jean le Baptiste n’atteint pas la plénitude. Les gens se demandent en eux-mêmes si Jean n’est pas le Christ.

Et résonnent à nos oreilles les paroles du livre d’Isaïe, dans la première lecture. «Dans le désert, préparez le chemin du Seigneur… Tracez une route pour notre Dieu… Alors se révélera la gloire du Seigneur, et tout être de chair verra que la bouche du Seigneur a parlé.»

Jean se situe bien dans cette ligne prophétique lorsqu’il dit qu’il «baptise avec de l’eau; mais il vient, celui qui est plus fort que moi.» Va venir celui qui apporte la plénitude, tout en bouleversant nos certitudes, nos rêves et nos imaginations.

Faut-il craindre, faut-il faire confiance? Pourquoi douter de notre Dieu? Il ne veut que notre bien. Lorsque j’entends: «Il vient, celui qui est plus fort que moi», je pense à la publicité. Vous savez: «Omo lave plus blanc!» Il vient celui qui baptise non pas seulement avec de l’eau, mais dans l’Esprit saint et le feu. Jean fait du marketing pour Dieu.

Et je pense aussi aux mises à jour qu’il faut installer sur nos ordinateurs et autres appareils électroniques. Jésus serait-il le prophète 2.0?

Le Seigneur nous invite à franchir une étape dans la foi, à passer de la prédication du Baptiste à celle de Dieu, à nous laisser toucher par la divinité! Ou encore, à passer de l’espoir, très humain, à l’espérance, très divine. Le philosophe peut écrire: «L’espérance n’est pas la conviction que quelque chose ira bien, mais la certitude que quelque chose a un sens indépendamment de son résultat» (Byung-Chul Han, El espíritu de la esperanza [L’esprit de l’espérance], Herder, Barcelona 2024, p. 18).

" Le Seigneur nous invite à passer de l’espoir, très humain, à l’espérance, très divine»

Par son baptême, Jésus a voulu vivre ce rite ancien de purification et de conversion, se montrant solidaire de notre humanité, permettant au Père et à l’Esprit Saint d’attester publiquement, devant tout le peuple rassemblé au bord du Jourdain, qu’il est bien le Fils de Dieu, Dieu né de Dieu, fait homme et envoyé comme Sauveur du monde. C’est une nouvelle épiphanie.

Au début de la messe, nous avons demandé au Seigneur — nous qui avons reçu par le baptême la nouvelle naissance de l’eau et de l’Esprit —, de pouvoir être toujours fidèles à ce qui lui plaît.

Faire ce qui plaît au Seigneur. Voilà donc un beau programme pour ce début d’année, période où beaucoup prennent de bonnes résolutions… très humaines. Nous sommes invités à cheminer en confiance et en espérance, à faire un saut dans la foi, à vivre un nouveau baptême, à entrer pleinement dans l’année jubilaire de l’Espérance.

Si nous ne pourrons pas tous aller en pèlerinage à Rome pour faire le passage symbolique d’une porte sainte du jubilé, nous pouvons tous transformer notre attente en une vie nouvelle et divine. (cath.ch/lb)

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