La tradition biblique des grandes fêtes chrétiennes

Les périodes de fête chrétiennes sont aujourd’hui encore marquées par les traditions bibliques et le calendrier juif des fêtes. Trois principes guident l’organisation du temps de celui-ci: le rythme de sept jours; des fêtes qui débutent toujours la veille du jour J et incluent donc la nuit; une durée des grandes fêtes étendues sur huit jours, le premier et le dernier occupant des places prépondérantes.

Christian M. Rutishauser sj / kath.ch, traduction et adaptation Lucienne Bittar

Ainsi la Pâque printanière, qui commémore l’exode de l’esclavage d’Égypte, commence par la soirée du séder et dure huit jours. Et la fête des Tabernacles, qui commémore la traversée du désert et qui s’ensuit en automne, se termine le huitième jour par la fête de la Torah.

La tradition chrétienne et la culture de la fête

La célébration publique et liturgique ainsi que le repas en commun font classiquement partie de la fête. Il s’agit également de se souvenir de sa propre histoire, d’en tirer des enseignements et d’insuffler un esprit communautaire. L’obligation de construire ensemble l’avenir est donc inhérente à chaque jour de fête.

Le jésuite Christian M. Rutishauser est professeur de judaïsme et de théologie et directeur de l’Institut de recherche judéo-chrétienne à l’Université de Lucerne depuis l’été 2024. Il est également depuis 10 ans conseiller permanent du Saint-Siège au sein de la Commission du Vatican pour les relations religieuses avec le judaïsme.

La tradition chrétienne connaît tous ces éléments de la culture de la fête et les a façonnés de manière spécifique. Le dimanche est une interprétation du shabbat. La semaine de Noël s’ouvre sur la nuit de Noël et le huitième jour est consacré au Nouvel An.

L’entrée dans l’alliance

Aussi laïque que soit la célébration, les années sont comptées globalement après la naissance du Christ et c’est justement ce huitième jour qui est le plus important. Les églises donnent la bénédiction pour la nouvelle année, on se souhaite le meilleur, on prend des résolutions.

Pour Jésus le juif, le huitième jour signifiait la circoncision. La tradition juive n’y voit pas une mutilation corporelle, mais l’entrée dans l’alliance et l’engagement à vivre selon la Torah. L’Église catholique romaine a supprimé cette fête dans les années 1960, mais elle est encore célébrée dans l’Église orientale et dans le rite ambrosien du nord de l’Italie.

«Le souvenir de la circoncision de Jésus est presque entièrement refoulé, et avec lui Jésus en tant que juif.»

Friedrich Nietzsche a décrit l’enfant de manière romantique comme un nouveau départ, une roue qui roule sur elle-même, un «oui» sacré. Hannah Arendt parle plus sobrement de la naissance comme de la possibilité d’un nouveau départ donnée à chaque nouvel être humain. Elle se rattache ainsi aux pensées d’Augustin. Et Emmanuel Levinas souligne que l’avenir n’est pas un simple prolongement du passé et du présent. À partir de l’Autre, quelque chose de nouveau, d’inattendu, voire de messianique, entre dans la vie. De nombreuses personnes peuvent adhérer à ce contenu séculaire qui sous-tend le premier jour de Noël.

Cependant le fait que la vie d’un nouveau-né, corps et âme, soit dès le début déterminée par son environnement est difficile à accepter pour nos contemporains, qui aspirent à la plus grande autonomie possible. Dans nos sociétés hypersensibilisées par les abus, le rituel de la circoncision est d’autant plus ressenti comme difficilement supportable. C’est pourquoi le souvenir de la circoncision de Jésus est presque entièrement refoulé, et avec lui Jésus en tant que juif.

La fête de la circoncision et celle du baptême

La visée d’un rituel est de rendre conscient et de conduire à la Vie. Il est toujours à la fois symbolique et réel. Ainsi la circoncision est-elle pratiquée sur les garçons par procuration. Elle revêt un caractère initiatique, inscrit dans le développement de la masculinité. L’acte de circoncision dit que l’être humain n’existe pas en soi, qu’il est toujours marqué par le sexe et donc aussi par la culture. Or la Torah veut engager l’homme dans une culture de la liberté et de la responsabilité éthique.

Pour les chrétiens, le baptême a remplacé la circoncision. Dans l’Église réformée, la prédication du premier janvier portait traditionnellement sur le baptême. L’Église catholique ferait bien d’approfondir anthropologiquement le mystère de l’incarnation de Dieu le huitième jour de Noël. Faire des jours de fête des jours de culture commune pourrait être une résolution de nouvelle année appropriée pour tous. (cath.ch/kath.ch/cr/lb)

Rédaction

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