Les spots éclairent chaleureusement le bois des étagères et des vitrines où sont exposées des crèches en provenance du monde entier. Délicatement posés dans ces écrins, Jésus, Marie, Joseph et les rois mages côtoient toutes sortes d’ouvrages sur le jardinage, la littérature, le sport ou encore la médecine. Et les décorations très soignées, créent une atmosphère de Noël qui surprendra les clients en quête d’un livre rare ou de seconde main. Bien qu’harmonieusement réparties, toutes ces crèches donnent l’effet d’un kaléidoscope.
«Nous retirons des livres de la vente, ce qui nous permet d’aménager ces espaces pour exposer nos crèches», précise Astrid Meyer, gérante de la librairie avec son mari Philippe. Le couple expose chaque année, depuis 31 ans, plus d’une centaine de crèches. «Nous en possédons environ 250 que nous avons dénichées un peu partout lors de nos voyages, en Suisse comme à l’étranger.» Elle cite, avec une fierté à peine voilée, une crèche acquise en catimini à Saint-Pétersbourg à une époque où seules les visites en groupe encadrées étaient autorisées. Les Meyer ont récupéré des crèches et en ont reçu en cadeau. Astrid s’attarde sur cette crèche du Cameroun (voir encadré) en laiton, entièrement confectionnée à la main.
«Le fait que nous ayons plus de crèches que nous ne pouvons en montrer nous permet de varier les expositions», sourit la gérante. Les clients devenus des fidèles visiteurs contemplent ainsi chaque année une exposition différente. «’Contempler’. Je cherchais le mot! Il n’est pas rare de voir des visiteurs prendre une chaise, s’assoir devant une crèche et la contempler un long moment.»
Tissu, bois, terre cuite, verre, faïence, paille, métaux divers… Faits à la main ou moulés, la Sainte famille, les animaux et les bergers sont de toute facture. Le visiteur attentif trouvera même une crèche d’origine anglaise, enchâssée dans une boîte à musique. Les rois mages tournent autour de la nativité dès qu’on soulève le couvercle. «Il y a des pièces uniques. Souvent des visiteurs veulent nous acheter des crèches de l’étage, mais elles ne sont pas à vendre. Il y a en a tout de même plus d’une cinquantaine au rez que nous vendons pour nous permettre de financer cette exposition gratuite.»
Il est aimablement demandé au clients-visiteurs de laisser leurs sacs au rez-de-chaussée pour ne pas risquer d’endommager les œuvres exposées. Certaines crèches, rarissimes, sont présentées dans des vitrines verrouillées. «Les gens sont plutôt respectueux.» Même si l’enfant Jésus a disparu de l’une des crèches confectionnées par les Petites Sœurs de Jésus. «Je préfère dire que Jésus est parti en voyage et que nous espérons qu’il rentrera bientôt», sourit Astrid.
«La naissance de Jésus dans cette étable reste quelque chose qui a chamboulé le monde! Aucun sujet n’est autant partagé à travers la planète! C’est universel!», lance Astrid. Le couple mixte, elle est catholique d’origine des Grisons, son mari, né à Lausanne, protestant d’origine, s’est pris de passion pour les crèches à son adolescence. Les Meyer ont souhaité partager la représentation de cet événement. «Une exposition nous a semblé la meilleure manière de faire vivre Noël».
Les mercredis et samedis, Astrid se mue en guide à l’occasion des visites qu’elle organise pour les classes, les particuliers ou les groupes qui s’annoncent. Elle estime que 6’000 visiteurs viennent de toute la Suisse et ailleurs admirer les crèches. «Environ 30% d’entre eux sont des chréltiens pratiquants». Il s’agit de raconter ces crèches, leur provenance, «mais pas de faire du prosélytisme. Les personnages parlent d’eux-mêmes», assure-t-elle.
Le nombre de classes a diminué. La place de la crèche dans la société pose problème admet-elle. Le débat fait rage en France, il est moins prégnant en Suisse. Cela permet de voir la manière dont la nativité a été interprétée selon les pays et les cultures où le christianisme s’est implanté, précise-t-elle.
Astrid et Philippe Meyer ont observé qu’une partie des visiteurs viennent par nostalgie. «C’est un peu paradoxal. Ils repensent, en contemplant ces crèches, à l’époque où Noël était avant tout une fête familiale et surtout moins consumériste. Certains nous ont confié leur écœurement devant tout ce matérialisme.» (cath.ch/bh)
Crèche en laiton du Cameroun
Cinq ans ont été nécessaires à l’artiste qui a fabriqué cette crèche. C’est le temps qu’il a fallu au créateur et à ses proches pour rassembler le cuivre et le zinc nécessaires à la fabrication des personnages. Les figurines ont été sculptées dans de la cire. De la paille et de la terre ont permis de réaliser les moules dans lesquels le laiton fondu a été coulé. BH
Exposition de crèches
Librairie La Clef de Sol – Rue du Conseil 25, Vevey.
Entrée libre, selon les heures d’ouverture. Jusqu’au 11 janvier 2025.
Bernard Hallet
Portail catholique suisse
https://www.cath.ch/newsf/vevey-un-kaleidoscope-de-creches-a-contempler/