Le bénévolat: se faire plaisir et se former en aidant les autres

«Les premières motivations des bénévoles réside dans la joie de l’engagement et d’’être ensemble’ dans l’activité», explique à cath.ch Isabelle Jonveaux, sociologue des religions au bureau romand du SPI. A la suite des portraits de bénévoles que cath.ch a publié ces dernières semaines, elle fait le point sur les motivations qui animent les bénévoles.

Auparavant, le bénévolat se situait dans la durée alors qu’il est aujourd’hui plus ponctuel. Comment expliquez-vous cela?
C’est une tendance générale de la société qui a plus de mal à s’engager d’une manière longue. Globalement, cela correspond au principe des options: «si j’ai une meilleure option qui se présente, je la favorise et je change mon engagement.» L’engagement ne sera plus régulier, parce que les gens veulent ménager leur liberté de choisir ce qui leur va le mieux. Les gens veulent pouvoir essayer: «Est-ce que ça me plaît ou pas?» L’idée d’en retirer quelque chose pour soi a remplacé la notion de sacrifice. Nous ne sommes plus dans la perspective: «donner sans attendre d’autre récompense que elle de savoir que je fais sa sainte volonté» (saint Ignace), mais d’en récupérer quelque chose de personnel.

«L’idée d’en retirer quelque chose pour soi a remplacé la notion de sacrifice.»

La crise des abus a-t-elle eu une influence sur le bénévolat?
L’enquête sur l’Eglise catholique de Saint-Gall a montré qu’il n’y a pas eu d’influence sur le bénévolat. Il y a un recul du nombre de servants de messe, mais qui n’est pas un effondrement. La pandémie a en revanche eu une incidence plus grande. Moins de gens sont revenus après le covid et ce n’est pas propre à l’Eglise.

Le bénévolat implique une notion de gratuité par opposition à une rémunération. Est-ce qu’on ne parlerait pas plutôt de service en Eglise?
Selon l’enquête effectuée à l’échelon de la Suisse, on constate que le remboursement de frais ou l’obtention d’une contrepartie ne jouent pas dans l’engagement des bénévoles, qui souhaitent donner un sens à leur engagement.

En Eglise, le bénévolat concerne-t-il plus la paroisse, l’aide aux personnes âgées, les festivals ou les activités pour les jeunes?
Globalement, l’engagement bénévole concerne plus le fonctionnement de la paroisse en tant que telle, puis les jeunes et l’aspect social de l’Eglise. L’engagement est moindre pour la santé car il faut une formation. Des événements particuliers, telles qu’une fête patronale ou un festival, vont mobiliser un grand nombre de bénévoles ponctuellement le temps d’un week-end.

«Globalement, l’engagement bénévole concerne plus le fonctionnement de la paroisse en tant que telle.»

Comment voyez-vous le bénévolat des plus jeunes?
Les 16-18 ans, ont plus de mal à s’engager, faute de moyen et d’autonomie. Mais les étudiants plus âgés ou les jeunes adultes, moins liés à la structure familiale, apprécient qu’on leur confie des responsabilités. Ils ont le souhait d’acquérir des compétences qui pourront être valorisées dans un engagement professionnel. Le bénévolat participe à leur formation. Ils en retirent quelque chose de personnel. Être bénévole «ensemble», avec des amis compte aussi beaucoup à leurs yeux, parce qu’ils auront plus de plaisir dans leurs activités.

Les jeunes peuvent plus facilement se former en Eglise… Avec la formation «Jack» dans le canton de Vaud ou le parcours «JB» (Jeune bénévole) dans le diocèse de Sion. C’est une manière pour l’Eglise pour motiver ses bénévoles?
Oui, il est important pour eux d’acquérir des compétences, de le marquer sur leur CV, de mettre en avant des compétences d’animation de groupe, de gestion de projet. Autant d’activités qu’ils peuvent valoriser dans le monde du travail. Ils y trouvent donc aussi un intérêt.

Dans la structure de la pastorale des jeunes, il y a peu d’employés, les jeunes ont été assez tôt appelés à prendre des responsabilités.
Oui comme à Genève par exemple, ce qui fonctionne bien. Mais quand ils grandissent, ces jeunes aimeraient proposer leurs propres compétences pour faire évoluer l’Eglise en y apportant quelque chose. Le problème, c’est que les compétences attendues de l’Eglise sont essentiellement des compétences estampillées «religieuses/pastorales» et qui ne sont pas toujours ce que des jeunes aimeraient apporter. Ce sont plutôt, par exemple, des compétences techniques, informatiques qui sont jusque-là peu valorisées.

«Ces jeunes aimeraient proposer leurs propres compétences pour faire évoluer l’Eglise.»

Un phénomène de tradition familiale qui peut jouer, lorsque la famille est pratiquante, on se tournerait plus naturellement vers un bénévolat en Eglise?
Cela ne ressortait pas particulièrement dans mon étude sur les jeunes en Eglise, mais il apparaît qu’ils s’engagent dans le bénévolat pour prendre des responsabilités. Plutôt que de rester dans la frustration, ils s’engagent pour faire évoluer le monde.

L’Eglise est-elle le plus gros «employeur» de bénévoles en Suisse?
Je pense que les Eglises arrivent en tête, en particulier l’Eglise catholique qui est très présente en tant qu’organisation dans la société. En revanche, dans les domaines d’engagement, le sport, qui se subdivise en une multitude de petites associations, arrive en première position. Les organisations culturelles et de temps libre (ou de «hobby») suivent en deuxième et troisième position. L’Eglise se place au quatrième rang devant les domaines du social et du caritatif. (cath.ch/bh)

Bernard Hallet

Portail catholique suisse

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