Mgr Nicola Zanini: l’Année sainte peut se vivre à Rome mais en Suisse aussi

Le 24 décembre 2024, le pape François lancera officiellement l’Année sainte, avec le rite d’ouverture de la Porte sainte de la basilique Saint-Pierre. Vicaire général du diocèse de Lugano, Mgr Nicola Zanini décrypte le sens de cet événement articulé sur l’espérance et la transformation intérieure, du point de vue de la foi chrétienne.

Cristina Vonzun, catt.ch, traduction et adaptation Lucienne Bittar

Le Jubilé 2025 a pour thème principal l’espérance. Qu’est-ce que l’espérance chrétienne et dans quelle mesure en avons-nous besoin dans l’Église et dans le monde?
Mgr Nicola Zanini: Il me semble que nous ressentons tous aujourd’hui une vraie difficulté à garder espérance, que nous soyons chrétiens ou non, croyants ou non. L’avenir est si incertain! Comment espérer face aux catastrophes naturelles, à l’aggravation des inégalités, aux migrations forcées, aux courses aux armements, aux guerres qui n’en finissent pas et qui se multiplient? Comment espérer alors même que nos esprits sont fragilisés, de plus en plus marqués par la lassitude et l’inconfort?

En annonçant un autre monde, la parole de foi ouvre une brèche dans cet univers. Pour le pape François, que nous avons appris à connaître un peu mieux au-cours des onze ans de son pontificat, l’espérance n’est pas seulement une résistance passive, un «Espérons!» qui permet de poursuivre son chemin comme avant. Ses deux grandes encycliques Laudato Si’ et Fratelli tutti nous engagent à habiter le monde autrement. Elles interpellent le cœur – comme le suggère aussi le Dilexit nos récemment publié – c’est-à-dire nos décisions. Espérer, c’est commencer à changer.

L’Année sainte comprend des gestes de foi: indulgence, confession, pèlerinage et autres. Quelles sont leurs significations?
Ces gestes marquent et soutiennent la décision de changer. Ils nous font passer de la parole aux actes. C’est pourquoi ils impliquent le corps. Rappelez-vous ce qu’était le pèlerinage dans les siècles passés, cette marche de plusieurs semaines que beaucoup redécouvrent! Bouger, en somme, c’est «sortir», pour reprendre un verbe cher au pape François et radicalement biblique: Abraham doit sortir, Israël doit sortir. L’espérance, comme la vie, c’est le renoncement à l’immobilisme, qui penche du côté des morts. Or en tant que chrétiens, nous ne pouvons admettre l’immobilisme, car Dieu nous appelle à marcher ensemble.

Concernant la confession, elle est une manière d’indiquer que je suis conscient d’avoir ajouté ma lourdeur et mes péchés au monde, mais aussi que je suis capable de vivre différemment, de faire le bien, de croire à nouveau. Quant à l’Indulgence, elle indique la patience de Dieu, qui invente l’impossible pour nous remettre sur les rails et nous rendre plus indulgents envers nous-mêmes et les autres.

Le Jubilé ne se déroulera pas seulement à Rome, mais aussi en Suisse, comme dans le diocèse de Lugano. Toutefois, ce n’est qu’à Rome qu’il sera possible de franchir la Porte sainte, d’où l’organisation de voyages pour Rome. Quel est le sens de ce geste?
Chacun est lié à la terre qui l’a engendré et qui lui est confiée. Mais Rome nous rappelle qu’aucune Église ne peut se refermer sur elle-même, qu’aucune n’existe sans les autres. Les apôtres Pierre et Paul, qui ont donné leur vie à Rome, venaient de l’extérieur de la ville. Ils ont apporté une nouvelle logique au cœur de l’Empire, et elle a changé le monde. En tant que pèlerins, nous sommes nous aussi amenés à sortir de nous-mêmes, à franchir la porte, qui est le Christ, pour entrer dans un monde qui défie le nôtre, afin que la terre ressemble de plus en plus au ciel.

Mgr Nicola Zanini | © catt.ch

Au Tessin, l’année sainte s’ouvrira le 29 décembre dans la cathédrale. Le 12 janvier, elle se marquera aussi dans les vicariats, sur une échelle plus locale. Pourquoi?
Il me semble important de souligner les liens entre l’universel et le local. Rapprocher le Jubilé, c’est faire entrer l’espérance du monde dans chaque vicariat, donc dans chaque maison.

Comment ceux qui restent dans leur paroisse peuvent-ils vivre l’Année sainte?
En prenant conscience que la paroisse n’est pas le tout. Elle est ce lieu familier où l’on fait l’expérience d’une Église diocésaine et universelle, dont il est important de prendre soin. Dieu ne s’enferme pas dans un village, dans une église. Il peut se faire beaucoup plus petit encore, mais c’est toujours pour élargir au maximum nos horizons. Si cet aspect vient à manquer, il n’y a plus de christianisme. (cath.ch/catt.ch/cv/lb)

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