Abus: le Conseil national accusé de stigmatiser l’Église

Plusieurs motions exigeant un concept de protection standardisé et contraignant dans les structures accueillant des jeunes et des enfants ont été acceptées, le 11 septembre 2024, par le Conseil national. Des voix critiques estiment que la manœuvre vise en réalité l’Église catholique.

Six motions émanant de six partis politiques, ainsi qu’un postulat, ont été acceptés par une large majorité du Conseil national. Les textes demandent que le Conseil fédéral mette en place un concept de protection standardisé et contraignant afin de prévenir les abus sexuels, psychiques ou physiques dans les structures travaillant avec des jeunes, des enfants ou toutes personnes vulnérables. Sont concernées, notamment les Églises, les écoles, les associations ou les organisations sportives.

Les cantons accusés de «ne pas en faire assez»

Les motionnaires souhaitent que toutes ces organisations appliquent de bonnes pratiques pour prévenir les abus: les structures devraient notamment mieux savoir comment s’y prendre en cas de problème, notamment pour le soutien aux victimes.

La socialiste Tamara Funiciello, l’une des chevilles ouvrières de la démarche, évoque la création de guides expliquant «clairement ce qu’il est bien de faire ou de ne pas faire», rapporte le journal Le Courrier. Il est question d’un protocole du bon comportement quand un abus est soupçonné ou dénoncé ou d’un document qui indique la personne à informer en cas d’abus, signale les conséquences possibles pour la victime et l’agresseur et la bonne manière de mettre en sécurité une personne touchée.

Le but avoué était de mettre la pression sur le Conseil fédéral, alors que les cantons, desquels ce genre d’affaires est du ressort, sont accusés de passivité. Ainsi, pour Tamara Funiciello, «les cantons ont certes des prérogatives importantes dans le domaine des abus, mais la majorité ne fait rien ou pas assez. Il est trop facile de dire que la sécurité des enfants ou des personnes vulnérables est du ressort des cantons quand ceux-ci ont failli à leur tâche.»

Pour une vision plus large

Mais, pour certains élus, principalement de l’UDC, les motions avaient comme but sous-jacent d’attaquer l’Église catholique. Le fait est qu’à l’origine de cette démarche collective, était une initiative parlementaire de la vert’libérale Kathrin Bertschy qui visait l’Église uniquement.

Mais la Commission des affaires juridiques a jugé préférable d’adopter une vision plus large. Elle a ainsi déposé son propre postulat, qui charge le Conseil fédéral d’un rapport sur la nécessité de légiférer. «Le Conseil fédéral doit pouvoir recenser le nombre et le type de cas, comprendre comment ils ont été traités et quelles mesures ont été prises. Sur cette base, nous devrions obtenir des pistes concrètes pour avancer efficacement», relève le président de la commission, le centriste genevois Vincent Maitre.

Faire porter la responsabilité à tous les catholiques?

Ancien membre de la Garde suisse pontificale et conseiller national UDC, Nicolas Kolly qualifie, dans Le Courrier, la proposition de Kathrin Bertschy de «scandaleuse». La motion «voulait faire porter la responsabilité des actes commis au sein de l’Église catholique par l’institution, soit par l’ensemble des catholiques». Et le Fribourgeois de défendre les mesures prises par les évêques. «Depuis des décennies, le message de l’Église est pourtant clair: tout acte doit être dénoncé à la justice des hommes. C’est ce que l’Église doit légalement faire, comme toute institution, et elle le fait», assure Nicolas Kolly.

Le conseiller national rappelle en outre que les cantons doivent tout simplement appliquer la loi, «qui est déjà claire». Il relève qu’il y a, dans les cantons, des situations très différentes, rendant irréaliste une réglementation au niveau fédéral. Il souligne que les Églises sont reconnues de droit public dans certains cantons et pas dans d’autres. (cath.ch/courrier/arch/rz)

Raphaël Zbinden

Portail catholique suisse

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