Evangile de dimanche: Entendre la Parole et la proclamer

Après la multiplication des pains Jésus a gagné le territoire païen à l’Est du lac de Tibériade, dans un monde étranger à la Loi juive, loin des arguties des pharisiens. Jésus y est reçu libre de tout préjugé. Ici, les problèmes de santé, d’intégrité physique et de vie sont plus urgents que les minuties au sujet de la vaisselle et des fréquentations du voisinage.

Il en va de la vie et de la mort, de l’insertion sociale des malheureux, de leur dignité de créatures de Dieu. Récemment, la rencontre avec une femme païenne, syro-phénicienne de naissance, a ouvert Jésus à un monde plus large que l’étroitesse religieuse des pharisiens. En guérissant son enfant Jésus a franchi une ligne rouge. Si, jusque-là, l’attente du Messie était une spécialité réservée au peuple juif, désormais l’horizon de la mission est aux dimensions du monde.

«Désormais l’horizon de la mission de Jésus est aux dimensions du monde»

On lui amène un pauvre handicapé sourd et bègue pour qu’il le guérisse, un homme littéralement prisonnier de son corps. Pour ne pas se poser en faiseur de prodiges, et ne pas se donner en spectacle sur la place publique, Jésus emmène l’handicapé à l’écart des curieux. Un soupir, un élan de compassion, une prière s’échappe du cœur du Christ, l’ardent désir de voir cet homme retrouver son autonomie et sa liberté. Le souvenir de cette exclamation est si vif que l’évangéliste l’a retenue en araméen, la langue de Jésus : Effata ! Petit clin d’œil à l’historicité de son récit.

La guérison n’est pas tombée du ciel comme par enchantement. Jésus a accompli les gestes traditionnels de la médecine de son temps ; il a touché physiquement les points névralgiques qui emprisonnaient le malheureux, ses oreilles mortes, sa langue qui s’embrouille. Le contact physique avec Jésus a libéré l’handicapé de tout enfermement et l’a réintégré dans la société.

«Finalement, c’est Jésus lui-même qui est le remède !»

Finalement, c’est Jésus lui-même qui est le remède, la source de l’intégrité de cet homme. Pour se laisser toucher par lui, il a fallu se mettre à l’écart du regard des autres, fuir l’agitation de la foule. Plus tard, après la résurrection du Christ, à l’époque où Marc écrit, le chrétien trouvera dans cette succession de gestes une allusion aux sacrements, ces rencontres quasi physiques avec le Christ, capables de redonner la santé, de libérer des handicaps et de raviver le lien communautaire.

À l’adresse de ceux et celles qui auraient encore quelques doutes, l’évangéliste cite un propos du prophète Isaïe: «Il a bien fait toutes choses ; il fait entendre les sourds et parler les muets». Avis à ceux et celles qui, à l’instar des pharisiens, font la sourde oreille au message de l’Évangile. Ils sont invités à s’ouvrir à l’action du Christ, à entendre sa Parole et la proclamer.

Pierre Emonet SJ | Vendredi 6 septembre 2024


Mc 7,31-37

En ce temps-là,
Jésus quitta le territoire de Tyr ;
passant par Sidon, il prit la direction de la mer de Galilée
et alla en plein territoire de la Décapole.
Des gens lui amènent un sourd qui avait aussi de la difficulté à parler,
et supplient Jésus de poser la main sur lui.
Jésus l’emmena à l’écart, loin de la foule,
lui mit les doigts dans les oreilles,
et, avec sa salive, lui toucha la langue.
Puis, les yeux levés au ciel,
il soupira et lui dit :
« Effata ! », c’est-à-dire : « Ouvre-toi ! »
Ses oreilles s’ouvrirent ;
sa langue se délia,
et il parlait correctement.
Alors Jésus leur ordonna
de n’en rien dire à personne ;
mais plus il leur donnait cet ordre,
plus ceux-ci le proclamaient.
Extrêmement frappés, ils disaient :
« Il a bien fait toutes choses :
il fait entendre les sourds et parler les muets. »

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