Une douzaine de personnes emboîtent le pas de Michel Galliker, professeur d’histoire à la retraite du collège de Saint-Maurice, qui les mène à travers le champ de fouilles de l’Abbaye de Saint-Maurice. La bise accentue un froid mordant, mais le petit groupe écoute religieusement les explications que donne l’érudit sur les vestiges de la première église dédiée à saint Maurice et ses compagnons. Ces touristes d’un jour participent en fait à la première formation de guides d’église que propose la commission diocésaine PASCALE (Commission pastorale de la culture, de l’accueil et des loisirs en Eglise) du diocèse de Sion.
«Je suis guide depuis 24 ans dans la ville de Sion, j’ai une formation sur les bâtiments historiques et l’architecture, mais l’aspect spirituel me manquait», indique Richard. Le Sédunois est venu approfondir ses connaissances dans le domaine religieux. «Souvent, les gens veulent aller plus loin et posent des questions auxquelles je ne peux pas répondre. Je me trouve vite limité».
Six personnes viennent de Savièse. «A l’origine, nous avons lancé le groupe ‘Eglise Dec’ouverte’, pour de l’accueil durant l’été. Ces cours nous sont très utiles pour apprendre le vocabulaire spécifique, l’architecture religieuse ou l’art sacré», raconte Brigitte. Cette formation lui permettra d’offrir ‘un plus’ aux visiteurs curieux et, pourquoi pas, d’organiser des visites. Elle a déjà reçu des demandes pour faire visiter l’église à des enfants.
Le groupe arpente ensuite la basilique dont Michel Galiker détaille rapidement les chapelles latérales, le chœur, les vitraux avant d’aborder le cours consacré, ce samedi 24 février, à l’histoire de L’Eglise en Valais. Le professeur du jour, qui fut bibliothécaire de l’abbaye, propose une bibliographie en lien avec le thème. «Il n’y a pas que l’architecture, insiste-t-il. Lorsque je rentre dans une église, je regarde les vitraux, les mosaïques, ce qu’ils représentent.» Il souligne l’importance de connaître l’histoire des saints.
La matinée passée à l’Abbaye de Saint-Maurice est la troisième des quatre demi-journées de la formation qu’ont mise sur pied Jean-Raphaël Kurmann, qui vient du milieu de la santé, et Christophe Savioz, titulaire d’un master en théologie. Au programme: la visite d’une église et une partie théorique. Les apprentis guides sont passés à la cathédrale de Sion, à l’église d’Hérémence et se retrouveront à Savièse à la mi-mars. Les élèves ont également reçu une initiation à ce que peut être un parcours type d’une visite d’église. La théorie comprend une initiation à l’art sacré, à l’architecture religieuse ou encore à l’hagiographie.
«Nous avons effectué un travail de recherche sur la formation de guides d’église, qui n’existe pas en Suisse romande». Jean-Rapahël Kurmann et Christophe Savioz se sont renseignés en France, notamment sur ce qui était proposé à Lyon et à Paris. «Nous avons trouvé une formule sur plusieurs jours et soirées. Cela nous a paru trop long et nous craignions que ce soit dissuasif pour certains», sans compter l’aspect organisationnel et logistique que cela suppose.
Les deux initiateurs de la formation ont bénéficié de l’aide de l’Eglise du Luxembourg. Les échanges avec l’institution lui ont permis de créer ce programme. «Le but était de proposer un contenu pragmatique, synthétique, abordable pour ne pas décourager les gens». Les quatre demi-journées coûtent 100 francs. «C’est une première, nous attendons des retours et nous adapterons la formation le cas échéant», précise Jean-Raphaël Kurmann. Une demi-journée lui paraît un bon compromis entre l’emploi du temps des uns et des autres et l’enseignement nécessaire à l’acquisition d’une bonne base.
Les élèves-guides rencontreront le responsable de Fully Tourisme. Les contacts avec les milieux touristiques n’ont pas été négligés, la préoccupation est même au cœur de la démarche de Jean-Raphaël Kurmann.
En 2018, à la demande de Mgr Jean-Marie Lovey, il avait effectué un audit (voir ci-dessous) sur la présence de l’Eglise valaisanne dans le secteur du tourisme. Excepté la cathédrale de Sion et l’Abbaye de Saint-Maurice, pas trace du patrimoine religieux dans les dépliants, cartes et autres brochures vantant les lieux incontournables du Valais. «Il y a eu la formation de la commission diocésaine en 2019. Nous avons prolongé la réflexion sur les pistes à suivre pour mettre ce patrimoine en valeur.» La pandémie a interrompu le processus.
La concrétisation de formation de guides d’église est un des aspects d’un projet plus large, initié par la commission diocésaine pour attirer les touristes dans les églises. Un projet de plaques descriptives est sur le point d’aboutir. «Nous y avons travaillé un an, en collaboration avec les services des monuments historiques du Valais. Une cinquantaine de paroisses ont souscrit au projet et poseront, d’ici fin d’année, leur plaque au format A4 présentant l’histoire de l’église que les lecteurs visiteront», annonce le responsable de la commission.
«Nous commençons également à réfléchir à mettre en valeur le patrimoine immatériel qu’offre l’Eglise valaisanne: la Fête-Dieu à Savièse, le carillonnage ou la fête de l’Épiphanie à Chandolin qui sont typiques de notre région.» La commission envisage également la création d’un site internet. Il évoque aussi l’idée de créer une carte touristique signalant les lieux religieux et les activités et services qu’ils proposent.
Vanessa, récemment entrée dans la commission et qui suit le parcours Théodule, est ravie de suivre cette formation. «C’est motivant, j’apprends beaucoup, c’est une vraie richesse et un beau cadeau!», lance-t-elle tout sourire. Tous se donnent rendez-vous le 16 mars à Savièse. Et qui sait? Peut-être vous feront-ils découvrir les secrets d’une église à Martigny, Sion, Sierre, Savièse ou ailleurs en Valais, cet été. (cath.ch/bh)
Bernard Hallet
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