En doutant ouvertement de la validité des ordres conférés au sein de l’Église catholique et en demandant à Mgr Williamson de le reconsacrer évêque ‘sous conditions’, Mgr Vigano a choisi de s’éloigner définitivement de l’Eglise catholique romaine, relève le site traditionaliste italien La Nuova Bussola Quotidiana. Il se dirige vers le sédévacantisme, qui considère que le pape régnant n’est pas légitime. Selon le droit canon, l’ordination d’un évêque sans l’autorisation de Rome vaut l’excommunication latae sententiae (sans qu’un jugement ne soit nécessaire), tant pour le consécrateur que pour le consacré.
Ce faisant, Mgr Vigano double par la droite, pour ainsi dire, la Fraternité Saint-Pie X (FSSPX) de Mgr Lefebvre qui a toujours défendu la validité des ordinations épiscopales selon le nouveau rite de 1968. Elle n’a ainsi pas reconsacré les quelques évêques qui ont accepté de la rejoindre.
Mgr Richard Williamson, l’évêque anglais négationniste de l’Holocauste, ordonné illicitement par Mgr Lefebvre puis expulsé de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X en 2012, s’est consacré depuis à la création d’un réseau appelant à la résistance contre toute tentative de normalisation des relations avec l’Église-romaine.
Selon La Bussola, après avoir procédé à des ordinations sacerdotales illicites dans toute l’Europe, Mgr Vigano serait en train de monter une structure à Viterbe, en Italie, pour y rassembler ses adeptes, comme l’avait fait Mgr Lefebvre à Ecône dans les années 1970. Plusieurs sources ont confirmé cette démarche schismatique de Mgr Viganò. Lui-même, interrogé par La Bussola, il n’a pas voulu démentir la nouvelle, se déclarant seulement étonné de l’intérêt porté à ses affaires personnelles.
De fait, pour les observateurs, cette démarche de Mgr Viganò n’est pas vraiment une surprise. Devenu soudainement célèbre en août 2018 par sa dénonciation publique contre le pape François, accusé d’avoir couvert le cardinal Theodore McCarrick, auteur de multiples abus sexuels, Mgr Viganò a progressivement élargi l’horizon de ses critiques à l’ensemble du pontificat de François, jusqu’au rejet du concile Vatican II.
Il s’est aussi profilé sur des questions politiques et économiques proche des thèses complotistes dénonçant pêle-mêle, les vaccins, le mondialisme ou le Forum de Davos avec un ton de plus en plus vif et apocalyptique voyant partout des ‘suppôts de Satan’.
Mgr Viganò a tissé un réseau de relations autour de ses thèses qui a culminé en mai dernier avec l’annonce officielle de la naissance de l’association Exsurge Domine. [Exsurge Domine (lève-toi Seigneur) tire son nom de la bulle de 1520 par laquelle le pape excommuniait le réformateur Martin Luther NDLR ] Objectif affiché: apporter une aide financière et matérielle aux prêtres et religieux victimes de harcèlement de la part de leurs évêques ou supérieurs à cause de leurs positions traditionalistes.
En réalité, selon la Bussola, derrière cette façade se cacheraient des manœuvres économiques et immobilières impliquant également une ancienne Société de vie apostolique, la Familia Christi, dissoute par la Congrégation pour la doctrine de la foi en décembre 2019, et les bénédictines de Pienza en conflit avec l’archevêque de Sienne, le cardinal Augusto Paolo Lojudice. Exsurge Domine serait donc une tentative d’institutionnalisation de ce réseau de résistance anti-François.
Mgr Viganò, qui a eu 83 ans le 16 janvier, ressent manifestement le besoin d’agir rapidement pour consolider son œuvre. Le 2 décembre dernier, il a annoncé qu’une maison de formation pour les prêtres allait s’établir sous le nom de Collegium Traditionis au monastère de l’Eremo della Palanzana à Viterbe, actuellement en rénovation. Ce couvent abrite toujours aujourd’hui quatre clercs de l’ancienne Familia Christi. Viterbe pourrait ainsi devenir un nouvel Ecône. (cath.ch/bu/mp)
Maurice Page
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