Bernard Litzler pour cath.ch
Esther Solari est ravie: la formation Théophilos a trouvé son public. «Les jeunes sont enthousiastes, souligne la jeune théologienne responsable de ce nouvel outil. Ils sont plus d’une vingtaine, de toute la Suisse romande, un samedi par mois. En plus du contenu, il y a l’esprit de fraternité et de convivialité qui prend de plus en plus forme».
Dans le nouvel Espace Maurice Zundel (EMZ) de Lausanne, ils sont venus en ce samedi de décembre, la Bible sous le bras. Ils ont entre 20 et 45 ans et sont étudiants ou jeunes actifs. «Certains sont catholiques engagés dans leur foi depuis toujours, d’autres sont dans un parcours de foi ou reviennent à la pratique et se posent des questions, ou veulent rencontrer d’autres avec qui prier, échanger, réfléchir. Tous ont soif d’être nourris, intellectuellement et spirituellement.»
Etudiante à la Haute Ecole de Pédagogie, Reyhan, d’Allaman, est d’origine turque: «Théophilos m’a paru attirant. Je suis intéressée à la théologie et à la philosophie dans différentes cultures. Et j’aime cette ambiance de formation».
«Le matin est consacré aux apports théologiques, détaille Esther Solari. Puis, il y a le repas: ça permet de souffler, de reprendre du carburant, et surtout de créer et d’approfondir de nouvelles amitiés. L’après-midi est consacré à une thématique éthique qui comporte un aspect pratique et touche à des questions de la vie quotidienne ou de la vie en société. C’est l’occasion pour les jeunes de faire résonner les enseignements dans leur vie pratique: cela se passe sous forme d’exposés, d’ateliers ou d’animations. Et c’est plus léger, tout en gardant une exigence dans l’apport.»
Début de matinée amical: les jeunes se connaissent déjà un peu, le rendez-vous de décembre constituant le troisième du parcours de neuf rencontres. Café et croissant pour démarrer la journée. Puis, après un moment de prière, place à la théologie. La pasteure luthérienne Elisabeth Parmentier, professeure à Genève, et le théologien catholique Grégory Solari entrent en jeu, sur le thème: l’Église comme «milieu» de la communauté témoin de la Révélation.
La Révélation est mise en perspective. «Nous partons de l’événement Jésus vers l’institution Eglise, et non l’inverse», indique Grégory Solari qui oriente le regard vers le pontificat de Benoît XVI, aux accents luthériens. Car Martin Luther était animé par la question d’un Dieu miséricordieux. Membre du Groupe œcuménique des Dombes, Elisabeth Parmentier acquiesce: «Les grandes religions naissent d’expériences fondatrices. Et le chemin de la foi au Christ passe par des témoins». La question de la transmission se pose donc dès les débuts du christianisme.
On plonge dans le Nouveau Testament: l’étude de la première épître aux Corinthiens, aux chapitres 10 et 11, vient cautionner les propos de la théologienne genevoise. L’Eglise des débuts dépasse les classes sociales et s’inscrit dans une dynamique de communion, neuve pour les Israélites, appelés à s’ouvrir à de nouveaux croyants.
«Théophilos renforce ma foi car j’y trouve des outils et des approfondissements»
Nicolas
Nicolas, de Morges, chef de cuisine, est satisfait de la matinée: «Il faut s’accrocher pour suivre, mais ça reste compréhensible. Je trouvais qu’on manquait de formation en Eglise après le catéchisme. Théophilos renforce ma foi car j’y trouve des outils et des approfondissements.»
«J’ai souhaité que le contenu soit sérieux, dense et nourrissant, précise Esther Solari. Et, en même temps, qu’il soit clair et le plus adapté possible pour des personnes qui n’ont pas fait d’études de théologie. Parfois, c’est un peu une langue étrangère pour certains termes. Mais on demande aux intervenants de faire attention.»
«Il faut trouver l’équilibre. Certains jeunes se sentent parfois un peu dépassés, mais dans l’ensemble, le groupe est plus que satisfait: on leur ouvre des portes et ça leur donne de la matière pour approfondir par la suite.»
Le repas canadien prolonge les échanges matinaux. A table, le Neuchâtelois Ryan, du Locle, explique: «Je fais Théophilos pour avoir un espace à moi. Je suis très engagé dans la paroisse comme sacristain, aide à la liturgie, catéchiste. Ici j’apprends la profondeur de ce que j’enseigne.»
Plats variés, desserts pour tous les goûts, les échanges fusent dans l’espace vitré de l’EMZ. Arrive l’intervenant de l’après-midi. Jean-Claude Huot, agent pastoral vaudois, aumônier du monde du travail, va traiter du thème «Bien commun et écologie». Le groupe se réinstalle dans la salle du bas.
Jean-Claude Huot, membre de la Plateforme Dignité et Développement (PDD), soucieux de la diffusion de la doctrine sociale de l’Eglise, invite les jeunes à jouer l’épisode du Bon Samaritain. Cinq volontaires vont mimer les actes successifs du récit: l’agression, l’indifférence des religieux, puis la compassion du Samaritain.
L’espace vitré sert de scène improvisée. Après le jeu, une question: «Duquel des personnages vous vous sentez le plus proche?». La discussion s’engage. Et les enjeux surgissent: «Fallait-il intervenir ou pas pour aider le blessé?» «Auriez-vous fait comme le Samaritain?». L’après-midi va se poursuivre avec, pour toile de fond, les responsabilités face au bien commun, donnée essentielle de la doctrine sociale chrétienne.
La journée se termine dans la douceur. Léon, aide-infirmier à Prilly, se dit «très heureux. J’ai soif d’approfondir ces contenus. Je reste marqué par la manière dont les intervenants ont parlé de la Révélation. Cela m’aide dans ma vie quotidienne». (cath.ch/bl)
Théophilos n°2
Pour Esther Solari, «la formation prend racine. C’est encourageant. Au moment du lancement, j’avais des questions et une crainte car on ne sait jamais par avance quel public on va toucher et si la proposition va parler à tout le monde. Et les intervenants ont des profils variés: des universitaires, des agents pastoraux, des personnes engagées dans différents domaines professionnels en lien avec l’éthique chrétienne.
Pour 2023-24, il n’est plus possible d’intégrer la formation. Une deuxième édition de Théophilos sera proposée à partir de septembre 2024, «les inscriptions devraient ouvrir à partir du mois de mai. En fonction des appréciations des participants actuels, le programme pourrait subir quelques retouches», précise la théologienne responsable, ravie de cette première expérience. BL
Rédaction
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