Pouvoir bénir les couples de même sexe, c’est une bonne nouvelle?
Pascal Desthieux: ‘Bénir’ signifie ‘dire du bien’. Alors ‘pouvoir bénir’, c’est toujours une bonne nouvelle. Et c’est aussi une bonne chose pour la pratique pastorale des prêtres. Car cela fait déjà longtemps que les prêtres sont sollicités pour bénir des couples de personnes divorcées remariées qui ne peuvent célébrer un mariage sacramentel à l’église. Je n’ai pas encore été personnellement sollicité pour une bénédiction de couples homosexuels, mais avec la légalisation du mariage pour tous, ça ne saurait tarder.
Peut-on parler d’une évolution vers le ‘mariage religieux pour tous’?
Non, car la déclaration fait une distinction très claire entre mariage civil, mariage religieux, et bénédiction de personnes. Ces dernières ne peuvent pas être effectuées dans le cadre d’une cérémonie de mariage civil ou religieux, ni durant une liturgie officielle de l’Église.
«Dans certaines régions, cette déclaration est une révolution absolue»
Peut-on vraiment parler d’une avancée?
C’est une avancée d’une Église universelle qui va lentement, parce qu’elle tient compte de toutes les réalités du monde. Dans certaines régions, comme en Afrique, où la pratique de l’homosexualité est parfois illégale, une telle déclaration est une révolution absolue, et peut être considérée comme une hérésie.
Est-ce qu’avec le Centre romand de pastorale liturgique (CRPL), vous pourriez concevoir un document avec des propositions de formules de bénédictions?
Non, car la déclaration doctrinale demande justement de ne pas le faire. La formulation de la bénédiction doit être spontanée, pour éviter tout risque de ritualisation de cette pratique. Le but de cette autorisation est d’offrir une «charité pastorale», d’après les termes communiqués, c’est-à-dire favoriser l’accompagnement des personnes concernées. Mais il ne s’agit pas de créer de nouvelles liturgies, afin de ne pas semer la confusion.
«Le prêtre doit garder une attitude de bénédiction. Il est tenu de ‘dire du bien’, au nom de Dieu»
Pratiquer des formules spontanées de bénédiction n’est pas risqué?
Chaque prise de parole comporte un risque. C’est pourquoi le prêtre doit garder une attitude de bénédiction. Il est tenu de ‘dire du bien’, au nom de Dieu, même dans le cas d’un prêtre qui pratiquerait une bénédiction sur un couple homosexuel, alors qu’il n’est lui-même pas très à l’aise avec l’homosexualité. Si la formulation est spontanée, elle n’est pas pour autant précipitée. Le prêtre, avant de prononcer la bénédiction, doit se renseigner sur le couple, sur son histoire, son parcours et ses aspirations, pour que ses paroles soient ajustées au mieux aux personnes qui les reçoivent.
Le document ne le précise pas: est-ce que les bénédictions peuvent être pratiquées dans une église et en présence de public?
Oui, les bénédictions peuvent pratiquée dans une église et, pourquoi pas, avec la présence d’un cadre familial, tant que la démarche ne revêt pas de caractère rituel ou liturgique. Et le personnes présentes doivent être averties du caractère informel de la démarche.
«Accueillir la demande et chercher le bon moyen de vivre ce moment»
Concrètement, si un groupe de personnes s’annoncent auprès de vous: elles sont de passage quelques minutes samedi après-midi à la basilique Notre-Dame à Genève. Le couple est accompagné de quelque amis et ils souhaitent simplement une bénédiction pour leur couple, dans les premiers rangs de la basilique. Vous acceptez?
Oui, je vais accueillir leur demande et chercher le bon moyen de vivre ce moment avec eux. Dans le cas que vous présentez, nous sommes exactement dans le périmètre de ce que permet la déclaration. Je pourrais également – puisque nous sommes dans le temps de l’Avent – revêtir mon étole violette, par-dessus mes habits civils, pour marquer cet instant. (cath.ch/gr)
Grégory Roth
Portail catholique suisse
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