Il aurait dû être l’un des chefs d’État les plus remarqués de cette COP28 de Dubaï. Premier pape de l’histoire à avoir accepté de participer à un sommet international sur le climat, le pontife argentin a dû finalement y renoncer cette semaine pour des raisons de santé. Il a laissé au cardinal Pietro Paroli, secrétaire d’État du Saint-Siège, la mission de conduire la petite délégation du Saint-Siège (7 délégués) et de prononcer son discours à la tribune où se succèdent depuis vendredi quelque 140 chefs d’État et de gouvernement.
Dans son message long de trois pages, l’auteur en 2015 de l’encyclique Laudato si’ sur l’écologie commence par rappeler que les changements climatiques en cours sont bien causés par «l’activité humaine qui est devenue insoutenable pour l’écosystème». «Le climat devenu fou sonne comme une alarme pour stopper ce délire de toute-puissance», insiste le pape, invitant l’humanité à reconnaître «avec humilité et courage sa limite».
Fustigeant les «divisions» et les «positions rigides, voire inflexibles» qui protègent les intérêts particuliers, le pape François s’étonne du fait que le «réchauffement de la planète s’accompagne d’un refroidissement général du multilatéralisme». Citant sa dernière exhortation sur le climat, Laudate Deum, publiée le 4 octobre, le pape invite à rétablir «des règles globales et efficaces» afin d’enrayer la «défiance croissante à l’égard de la communauté internationale».
Fidèle à la ligne du Saint-Siège de porter la voix des périphéries et de défendre la vie, le pape déplore dans son message «les tentatives de faire retomber la responsabilité [du dérèglement climatique] sur les nombreux pauvres et sur le nombre de naissances (…) Ce n’est pas la faute des pauvres puisque près de la moitié du monde la plus pauvre n’est responsable que de 10% à peine des émissions polluantes, alors que l’écart entre les quelques riches et les nombreux démunis n’a jamais été aussi abyssal.»
Plutôt que de faire peser la responsabilité de la crise climatique sur les pays pauvres, le pape propose de «supprimer les dettes financières» qui reposent sur eux, «à la lumière également de la dette écologique qui leur est due». Un appel qu’il a formulé à de nombreuses reprises depuis son élection en 2013 sur le trône de Pierre.
Concernant la croissance démographie, souvent pointée du doigt comme une cause du réchauffement climatique, le pontife argentin assure au contraire que «les naissances ne sont pas un problème, mais une ressource». Il s’agace des « modèles idéologiques et utilitaristes imposés avec des gants de velours aux familles et aux populations». Il s’agit là encore de «véritables colonisations», avance-t-il.
Dans son message lu à Dubaï, le pape rappelle aussi que les questions environnementales ne sont pas éloignées des questions de paix. «Combien d’énergie l’humanité gaspille-t-elle dans les si nombreuses guerres en cours, comme en Israël et en Palestine, en Ukraine et en beaucoup d’autres régions du monde», s’indigne-t-il, avant de renouveler sa proposition de consacrer les ressources financières dédiées à l’armement à un fonds mondial contre la faim ou bien au développement durable.
«Que cette COP soit un tournant», plaide le pape qui avait fustigé dans Laudate Deum les «résultats médiocres» de plusieurs sommets précédents. Pour ce faire, la conférence de Dubaï doit accélérer la transition écologique en fixant des objectifs efficaces, contraignants et facilement contrôlables, et ce dans quatre domaines: «l’efficacité énergétique, les ressources renouvelables, l’élimination des combustibles fossiles et l’éducation à des modes de vie moins dépendants de ces derniers».
Rappelant aux responsables politiques l’essence de leur vocation qui est de «servir , le pape François les met en garde: «Il ne sert à rien de préserver aujourd’hui une autorité dont on se souviendra demain que pour son incapacité à intervenir quand cela était urgent et nécessaire.» Et de leur poser cette question: «Œuvrons-nous pour une culture de la vie ou bien de la mort?» (cath.ch/imedia/lb)
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