6kg. C’est le poids de l’œuvre complète de Patrick de Laubier. La pensée prolifique de cet auteur, décédé en 2016, est enfin rassemblée en 5000 pages réparties en cinq volumes au sein de la collection «De la sociologie vers la civilisation de l’amour», aux éditions du Cerf (Paris).
Un événement très attendu par nombre d’admirateurs du sociologue français, ordonné prêtre par Jean Paul II vers la fin de sa vie, qui a notamment enseigné aux Universités de Genève et de Fribourg. La démarche de rassemblement des textes a été initiée par la Fondation Maria Genevensis, à Genève, qui rassemble depuis 1990 des amis proches de Patrick de Laubier, avec l’objectif de soutenir l’éthique chrétienne et œcuménique.
Pour marquer cette édition, l’Institut interdisciplinaire d’éthique et des droits de l’homme et l’Association internationale pour l’enseignement social chrétien (AIESC) ont invité le public à un colloque intitulé «Revisiter la démocratie et la durabilité dans la perspective du bien commun». L’événement a scruté, à travers des conférences ou et des tables rondes, des thématiques touchant à la doctrine sociale de l’Eglise.
La présentation de la collection «De la sociologie vers la civilisation de l’amour», le 16 novembre, a fait office de «cérémonie d’ouverture» du colloque. Des membres du comité éditorial, qui ont connu personnellement l’auteur, lui ont rendu hommage, entre anecdotes de vie et analyse de son œuvre.
Avant la profondeur et la force de sa pensée, plusieurs intervenants ont mis en avant la qualité fondamentale «d’éveilleur de vocations» de Patrick de Laubier. «Il m’a fait aimer la sociologie», se souvient Jean-Michel Bonvin. Aujourd’hui docteur en sociologie à l’Université de Paris Sorbonne et professeur ordinaire en politiques sociales et vulnérabilités à l’Université de Genève, il a été l’assistant de Patrick de Laubier dans les années 1990. Il a relevé à quel point le sociologue avait montré que «l’on peut être à la fois un scientifique engagé et bon».
D’autres orateurs ont noté la curiosité intellectuelle, l’enthousiasme et la joie de vivre contagieux de l’auteur. Ils y ont ajouté son extraordinaire érudition et son goût pour le travail, dont témoigne une œuvre particulièrement vaste.
Les intervenants ont décrit à leur manière le contenu de la collection, passant en revue les trois tomes, divisés en cinq volumes. Miroslav Novak, professeur de sociologie à l’Université de Prague, qui a collaboré avec Patrick de Laubier, a ainsi présenté le premier tome, intitulé Idées et politiques sociales. Le livre recueille les «ouvrages de jeunesse» de l’auteur, notamment sa thèse de doctorat sur la sociologie de la «grève générale». L’universitaire tchèque a relevé la finesse de jugement avec laquelle le sociologue y décryptait le message social chrétien. Un thème qui a accompagné Patrick de Laubier du début à la fin de sa carrière.
Le second tome, intitulé L’horizon de la civilisation de l’amour, regroupe des écrits assez divers, entre carnets de voyages, essais eschatologiques et textes sur le rapprochement entre l’orthodoxie et le catholicisme. Ce dernier thème lui tenait à cœur, Patrick de Laubier ayant toujours été très intéressé par l’Europe de l’Est.
Le tome trois, dénommé Floraison de la fin des temps, est l’ouvrage le plus personnel de l’auteur, a noté Paul Dembinski, ami de longue date de Patrick de Laubier. Pour le professeur d’économie à l’Université de Fribourg – et blogueur sur cath.ch – l’auteur, dans cet ouvrage, «guette la rencontre avec le Christ». Celle-ci se manifeste dans une dimension à la fois personnelle et universelle. Pour le sociologue, la civilisation de l’amour devait ainsi signifier l’étape historique avant l’épreuve finale précédant le retour définitif du Christ.
Les intervenants ont relevé à quel point les écrits de Patrick de Laubier étaient le «reflet d’une foi profonde et optimiste.» Ils ont souligné également la grande originalité de son œuvre, qui met en dialogue des auteurs de toutes les époques. «Il avait le génie de poser les grandes questions, avec amplitude et souffle, a noté Jean-Michel Bonvin. «Il a pensé nos sociétés avec davantage de hauteur et de réflexivité que ce qui avait pu être fait auparavant. Sa lecture inspire à devenir un meilleur sociologue, un meilleur citoyen, un meilleur chrétien», assure l’universitaire suisse. (cath.ch/rz)
Raphaël Zbinden
Portail catholique suisse
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