Charles Martig, kath.ch/traduction et adaptation: Raphaël Zbinden
Action de Carême (AdC) s’engage en tant qu’œuvre d’entraide sous le le triptyque «ensemble, solidairement, équitablement». Une orientation clairement soutenue par Mgr Gmür, qui est président du conseil de fondation de l’organisation basée à Lucerne. Le président de la Conférence des évêques suisses (CES) s’exprime également en faveur du nouveau ton politique d’AdC. Depuis que Bernd Nilles en est directeur, depuis 2017, AdC est devenue plus incisive et plus offensive, assure l’évêque.
La démarche «Forum d’action» est nouvelle. AdC souhaite donner à travers cet événement un nouvel élan au réseautage. De nombreuses parties prenantes et organisations partenaires désireuses de s’impliquer sont ainsi réunies pour la première fois à l’Ancien Hôpital de Soleure. Parmi les participants, se trouvent des associations telles que la Ligue suisse des femmes catholiques, «L’Alliance catholique pour l’égalité» (Allianz Gleichwürdig Katholisch), des corporations ecclésiastiques; mais aussi des acteurs individuels, tels que des prêtres et des agents pastoraux.
Bernd Nilles profite de sa présence à Soleure pour lancer les travaux sur la nouvelle «Stratégie 2025-2030» auprès du public de l’Eglise. Il évoque les multiples crises et le fait «qu’aujourd’hui, 150 millions de personnes de plus qu’avant la crise Covid ont faim». «La terreur et la violence plongent de nombreuses personnes dans la pauvreté, entre autres dans la région du Sahel», ajoute-t-il.
Le directeur d’Action de Carême met aussi les événements météorologiques extrêmes sous les feux de la rampe. «Devons-nous appeler à manger moins de viande?»; avec une telle déclaration, il est possible de thématiser la crise climatique et de déclencher des débats. Selon lui, il est important qu’AdC déclenche de tels débats et s’implique dans la politique de développement. «Nous voulons faire pression sur la politique», dit Bernd Nilles. Il fait référence à l’initiative «Pour des multinationales responsables«. Rejeté par le peuple suisse en 2020, l’objet avait été activement soutenu par divers acteurs des Eglises, ce qui avait également suscité des critiques sur l’implication de ces dernières dans la politique.
Bernd Nilles voit un nouveau défi dans la situation de l’Eglise. «Aura-t-elle à l’avenir la force d’être solidaire?» Il évoque la forte attitude auto-référentielle de l’Eglise, notamment dans des domaines tels que la gestion des abus sexuels ou la synodalité.
«La Confédération veut détourner des fonds vers l’Ukraine. Que se passe-t-il pour les gens en Afrique?»
Bernd Nilles
Et il pose une question pointue: «Devrons-nous à l’avenir chercher les catholiques en dehors de l’Église?» Une question rhétorique qui semble justifiée au vu de l’évolution démographique et de l’augmentation des personnes sans confession.
Christophe Monnot, chargé de cours en sociologie des religions à l’Université de Lausanne, a présenté les dernières tendances dans le paysage ecclésial. «Chaque génération est moins attachée à l’Église». A cela s’ajoute le fait que «plus le temps passe, moins les valeurs de l’Eglise sont soutenues». Statistiques de l’Eglise à l’appui, Christophe Monnot a démontré que «l’augmentation des personnes sans confession est en forte hausse et inattendue». Il a conclu qu’il fallait «de la solidarité face à des bancs d’église vides».
Pour AdC, c’est au niveau de la confrontation avec la politique qu’il faut entrer dans le vif du sujet. Au niveau technique, la collaboration avec la Direction du développement et de la coopération (DDC) reste bonne. Mais Bernd Nilles critique le fait que «la Confédération ne fait pratiquement plus de travail de relations publiques sur la coopération en matière de politique de développement».
Pour le directeur d’AdC, des efforts sont actuellement en cours à l’Assemblée fédérale pour détourner à d’autres fins des fonds de l’aide au développement. «La Confédération veut détourner des fonds vers l’Ukraine. Que se passe-t-il pour les gens en Afrique?» Pour Bernd Nilles, le travail prioritaire consiste à lutter contre ce phénomène. Il estime inadmissible que le Sud pâtisse de la situation globale.
D’autres orateurs et oratrices sont intervenus lors du «Forum d’action». Andreas Missbach «d’Alliance sud», s’est notamment exprimé sur le thème «La politique de développement en temps de crise mondiale et de pression politique». «La société civile est sous pression dans de nombreux endroits, également en Suisse», a-t-il mis en garde.
Katharina Boering, qui a travaillé au secrétariat «Eglise pour la responsabilité des multinationales», a animé un atelier au «Forum d’action». Pour elle, «il ne suffit pas que les entreprises publient simplement des brochures sur papier glacé». Pour faire contrepoids, un jeune employé de la Banque cantonale d’Uri (UKB) était invité. Luca Dittli, en tant que responsable de la durabilité de la banque, a relevé: «Nous sommes en train de vivre un grand changement et nous orientons l’UKB vers la durabilité».
Lucrezia Meier-Schatz, présidente du Forum des fondations d’AdC, a souligné à Soleure: «Il faut du courage, de la force et des valeurs pour mettre en route un changement social et écologique». Elle soutient le nouveau style de l’œuvre d’entraide: «Nous sommes devenus plus bruyants. Cela ne plaît pas à tout le monde. Mais nous devons continuer dans cette voie.» (cath.ch/kath/cm/rz)
Rédaction
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