«Nous traversons l’une des périodes les plus difficiles et les plus douloureuses de notre histoire récente. Depuis plus de deux semaines, nous sommes inondés d’images d’horreur qui réveillent d’anciens traumatismes, ouvrent de nouvelles blessures, font exploser en chacun de nous la douleur, la frustration et la colère. Beaucoup semblent parler de mort et de haine sans fin. Tant de «pourquoi» se superposent dans nos esprits, ajoutant à notre sentiment de perplexité», s’attriste le patriarche de Terre Sainte.
Dans sa lettre, le cardinal condamne l’attaque sanglante du Hamas: «Ma conscience et le devoir moral m’obligent à dire clairement que ce qui s’est passé le 7 octobre dans le sud d’Israël n’est en aucun cas acceptable et que nous ne pouvons que le condamner.» Le Hamas a libéré quatre des 222 otages qu’il détient depuis le 7 octobre.
Le patriarche latin de Jérusalem condamne également le bombardement de la bande de Gaza par Israël: «Les bombardements intensifs et continus qui frappent Gaza depuis des jours ne feront que causer la mort et la destruction, ils ne feront qu’accroître la haine et le ressentiment, et ne résoudront aucun problème mais en créeront plutôt de nouveaux. Il est temps d’arrêter cette guerre, cette violence insensée.» «Ce sont des tragédies, ajoute-t-il, qui dépassent l’entendement et que nous avons le devoir de dénoncer et de condamner sans faille».
Alors que le cardinal Pizzaballa exhorte à la fin des hostilités et que l’armée israélienne continue de bombarder la bande de Gaza, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens (UNWRA – United Nations Relief and Works Agency), évoque sur son site «une situation alarmante» dans la bande de Gaza. «Sans lui [le carburant], les camions ne peuvent pas circuler et les générateurs ne peuvent pas produire d’électricité pour les hôpitaux, les boulangeries et les usines de désalinisation de l’eau», a déclaré, le 24 octobre, Tamara Alrifai, porte-parole de l’UNWRA.
À ce jour, les convois d’aide humanitaire qui ont été autorisés à entrer dans l’enclave palestinienne contenaient de la nourriture, des fournitures médicales et des articles non alimentaires, mais pas de carburant, précise l’ONG. À titre de comparaison, la porte parole a souligné qu’avant le conflit, 500 camions entraient chaque jour à Gaza, dont des camions commerciaux et au moins 100 camions d’aide, 45 d’entre eux apportant du carburant.
«Nous sommes à genoux pour demander des opérations humanitaires soutenues, renforcées et protégées», a déclaré de son côté Rick Brennan, médecin et directeur des urgences de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour la région de la Méditerranée orientale. Il a souligné, lors d’une conférence de presse tenue au Caire, les conséquences désastreuses du manque d’accès à l’eau potable, aggravé par la surpopulation. Entre un et trois litres par jour par personne sont disponibles à Gaza, alors que le minimum est de 15 litres, a-t-il précisé.
Les gens sont poussés à consommer de l’eau contaminée et la propagation de maladies infectieuses n’est «qu’une question de temps». L’OMS a souligné l’extrême gravité de la situation sanitaire dans la bande de Gaza, soumise aux bombardements israéliens depuis plus de deux semaines.
Un hôpital sur trois et deux cliniques sur trois ne fonctionnent pas, et les établissements et le personnel de santé sont submergés par un nombre élevé de cas de traumatismes, dont beaucoup sont des blessures complexes dues à des explosions. Rick Brennan a cité l’exemple de l’hôpital Al-Shifa de la ville de Gaza, qui compte 1,5 patient par lit.
Côté Israélien, le traumatisme des survivants et le «fardeau psychologique collectif» provoqué par la crise des otages au cours de laquelle plus de 220 Israéliens et ressortissants étrangers étaient toujours retenus captifs à Gaza ont fait monter en flèche les besoins en matière de santé mentale, a déclaré Michel dit Thieren, représentant spécial de l’OMS en Israël.
Lors de sa visite à l’hôpital d’Ashkelon, dans le sud d’Israël, qui soigne un grand nombre des 4’600 personnes blessées lors des attaques, Michel dit Thieren a déclaré que «presque tous ces survivants avaient vu quelqu’un d’autre mourir avant d’être eux-mêmes blessés». Le responsable de l’OMS a souligné que la santé mentale des médecins et infirmiers qu’il a rencontrés en Israël avait été fortement affectée par les récits des survivants et les blessures qu’ils soignaient.
António Guterres, secrétaire général de l’ONU, a déclaré que rien ne justifiait l’assassinat, les blessures et l’enlèvement délibérés de civils, ni le lancement de roquettes contre des cibles civiles. Il a réclamé que les otages du Hamas soient traités avec humanité, libérés immédiatement et sans conditions.
Le secrétaire général de l’ONU a reconnu que les attaques du Hamas s’étaient produites dans le contexte «d’une occupation étouffante» de 56 ans. «Le peuple palestinien a vu ses terres régulièrement dévorées par les colonies et en proie à la violence, son économie étouffée, ses habitants déplacés et ses maisons démolies. Ses espoirs d’une solution politique à sa situation se sont évanouis. Mais les griefs du peuple palestinien ne peuvent justifier les attaques effroyables du Hamas. Et ces attaques effroyables ne peuvent justifier la punition collective du peuple palestinien».
Réagissant aux propos d’António Guterres, l’ambassadeur israélien à l’ONU Gilad Erdan a appelé le secrétaire général à «démissionner immédiatement» dans un message sur la plateforme X (ex Twitter). Devant les journalistes, le diplomate a argumenté que le chef de l’ONU «justifiait le terrorisme» en soulignant que les attaques du Hamas se produisaient dans le contexte de l’occupation par Israël de territoires palestiniens. Gilad Erdan a également annoncé que les visas seraient refusés aux responsables de l’ONU.
Lors de l’audience générale du 25 octobre, le pape François a exhorté le Hamas à libérer ses otages. Le pontife a rappelé à la foule présente place Saint-Pierre la tenue d’une journée de jeûne, de prière, de pénitence, le 27 octobre. À 18h en la basilique Saint-Pierre, le pontife présidera une prière «afin d’implorer la paix dans le monde». (cath.ch/onu/unwra/plj/ag/bh)
> Vers la «Lettre au Diocèse» de Mgr Pierbattista Pizzaballa
Bernard Hallet
Portail catholique suisse
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