En 2021 déjà, cinq des dix pays les plus touchés par la violence et le terrorisme se trouvaient en Afrique (Somalie, Burkina Faso, Nigeria, Mali et Niger), observe Portes Ouvertes. Depuis, en particulier dans les pays d’Afrique subsaharienne, la violence n’a fait que s’aggraver. À tel point qu’en janvier 2023, le bureau des Nations-Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, lors d’un conseil de sécurité des Nations-Unies, a estimé que les défis sécuritaires dans la région étaient «sans précédent».
«À travers l’Afrique, une multitude de groupes islamistes affecte le ‘vivre-ensemble’ pacifique, constituant l’une des principales sources de persécution. Cette persécution violente concerne toutes les communautés religieuses minoritaires et plus particulièrement les chrétiens», alerte Illia Djadi, expert des Droits humains, spécialiste de l’Afrique de l’Ouest pour Portes Ouvertes International.
À titre d’exemple, le mois dernier, l’État islamique a revendiqué une attaque au cours de laquelle au moins onze chrétiens ont été tués dans le nord du Mozambique. Le groupe extrémiste islamiste Ahlu-Sunnah wal Jama’ah mène une insurrection dans la province septentrionale de Cabo Delgado, riche en ressources naturelles, depuis 2017. Les militants se sont affiliés à l’État islamique en 2019. Selon les partenaires de terrain de Portes Ouvertes, ce genre d’attaque survient presque quotidiennement.
Le Nigeria est particulièrement touché par l’augmentation des violences religieuses. Dans ce pays, un peu plus de 5’000 chrétiens ont été tués en raison de leur foi en 2022.
Les conflits ont fait plus de 15 millions de déplacés. «La conséquence directe est une précarisation généralisée de la population, déjà souvent très fragilisée économiquement», relève Philippe Fonjallaz, directeur de Portes Ouvertes Suisse. «De plus l’impossibilité de scolariser les enfants et le manque de perspectives pour la jeunesse (plus de 50% de la population de la région a moins de 25 ans) créent les conditions propices à l’augmentation de la délinquance, aux trafics en tous genres, voire aux recrutements par les groupes terroristes.»
Avant le début du 21e siècle, la religion n’était pas un facteur qui contribuait à l’instabilité politique à l’échelle des pays. Les tensions existant.es se concentraient localement autour de groupes aux intérêts opposés, comme par exemple entre les groupes sédentaires et les groupes nomades, ou entre l’État et une jeunesse désinsérée socialement.
Cependant, au début des année 2000, des fissures ont commencé à apparaître entre le modèle laïc de l’État promu par les élites politiques et les modèles islamiques fusionnés avec les idées propagées par certains érudits et religieux musulmans. L’émergence de groupes islamistes liés à Al-Qaïda (AQMI) et à l’État islamique dans le Grand Sahara (ISGS), qui propagent la violence, a ajouté de nouvelles dimensions à ces tensions.
Pour tenter de lutter contre la montée de la violence et des conflits, les Nations unies, l’Europe, la France, les États-Unis et les États de la région (Cameroun, Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger, Nigéria et Tchad) ont tous initié ou contribué à plusieurs initiatives et déploiements antiterroristes dans la région.
Mais suite à la recrudescence des coups d’État depuis 2021 (des interventions militaires ont eu lieu au Tchad, au Mali, en Guinée, au Soudan et au Niger), suivies par d’autres tentatives en 2022, dont deux coups d’État réussis au Burkina Faso, les observateurs internationaux ont enregistrés une augmentation de l’instabilité dans plusieurs pays du Sahel et le retrait des forces armées internationales.
Bien que l’on puisse affirmer que les régimes autoritaires peuvent offrir un vernis de stabilité, cette stabilité se fait souvent au prix de la suppression des libertés civiles et des droits des minorités. De plus, cette situation a laissé une grande marge de manœuvre aux combattants affiliés à l’Etat islamique, que les États n’arrivent aujourd’hui plus à juguler. (cath.ch/com/bh)
Bernard Hallet
Portail catholique suisse
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