Ces cardinaux, aujourd’hui tous à la retraite, avaient écrit au pape François une première fois pour exprimer leurs craintes concernant les orientations que pourrait prendre le Synode sur la synodalité. Mais, assurent-ils, la lettre du pontife reçue le 11 juillet «ne suivait pas la pratique habituelle des responsa ad dubia [réponses aux questions]». Ils ont alors décidé d’adresser un nouveau courrier au pape le 21 août pour demander une réponse «par ‘oui’ ou par ‘non’» à chacune de leurs cinq questions.
Ils expriment en préambule le caractère «urgent» de leur requête, «à la veille du prochain Synode, alors que beaucoup souhaitent utiliser celui-ci pour contredire la doctrine catholique». Mercredi s’ouvre en effet la première session romaine du Synode lancé il y a deux ans dans le monde entier et qui aborde des thématiques sensibles pour l’Église catholique – inclusion des personnes LGBT, personnes divorcées et remariées, diaconat féminin, etc.
Les cinq cardinaux interrogent par exemple le pape François sur l’enseignement de l’Église concernant les couples homosexuels. «Est-il possible que, dans certaines circonstances, un pasteur puisse bénir des unions entre personnes homosexuelles, laissant ainsi entendre que le comportement homosexuel en tant que tel ne serait pas contraire à la loi de Dieu et au cheminement de la personne vers Dieu?», questionnent-ils.
Ils demandent aussi à avoir une réponse claire concernant la sexualité en dehors du mariage catholique, et en particulier sur les actes homosexuels. «[L’enseignement de l’Église] est-il toujours valable?», s’interrogent-ils, après avoir rappelé que ces actes constituaient «un péché objectivement grave contre la loi de Dieu».
Sur les questions de morale, les cinq cardinaux – dont 3 ont plus de 90 ans et ne sont plus électeurs en cas de conclave – formulent une autre demande au pape: «Est-il possible que l’Église enseigne aujourd’hui des doctrines contraires à celles qu’elle enseignait auparavant en matière de foi et de morale?».
Sur un autre sujet qui pourrait être évoqué lors du Synode, les cardinaux désirent savoir si l’Église pourrait à l’avenir «avoir la faculté de conférer l’ordination sacerdotale à des femmes». Ils expliquent dans leur argumentaire n’avoir pas été rassurés par la réponse du pape envoyée le 11 juillet. «Dans le dernier point de votre réponse, vous ajoutez que la question peut encore être approfondie. Nous craignons que certains n’interprètent cette déclaration comme signifiant que la question n’a pas encore été définitivement tranchée», s’inquiètent-ils.
Parmi les dubia, un autre porte sur l’autorité même du Synode convoqué ce mois-ci à Rome. En tout, 464 clercs, religieux et laïcs se réunissent à huis clos pour discuter de l’avenir de l’Église catholique, après deux ans de réflexion aux niveaux local et continental.
Ce Synode «exercera-t-il, au sujet des questions doctrinales ou pastorales sur lesquelles il sera appelé à s’exprimer, l’autorité suprême de l’Église, qui appartient exclusivement au pontife romain et […] au collège des Évêques?». Ils assurent préalablement que «le Synode des évêques est un organe consultatif du pape, il ne représente pas le Collège des évêques et il ne peut pas résoudre les questions qui y sont traitées ni émettre des décrets à leur sujet», sauf dans des cas particuliers.
Enfin, les cardinaux se concentrent sur les conditions établies pour recevoir le sacrement du pardon, qui «requiert le repentir du pécheur, ce qui inclut l’intention de ne plus pécher». Sans pointer du doigt une situation particulière, ils se demandent si un pénitent pourrait «validement recevoir l’absolution sacramentelle si, tout en avouant un péché, il refuse de prendre d’une quelconque manière la résolution de ne pas le commettre à nouveau».
Si les cardinaux ont décidé de publier leurs interrogations, c’est parce qu’ils assurent ne pas avoir eu de réponse du pape François depuis le 21 août, soit plus de quarante jours. «Nous estimons qu’il est de notre devoir de vous informer, vous les fidèles, afin que vous ne soyez pas sujets à la confusion, à l’erreur et au découragement», argumentent-ils, appelant notamment à prier pour le pape.
En 2016 déjà, quatre cardinaux – Walter Brandmüller, Raymond Burke, Carlo Caffarra et Joachim Meisner – avaient rendu publique une lettre adressée au pape François dans laquelle ils formulaient leurs doutes quant à l’interprétation de l’exhortation apostolique Amoris laetitia sur la famille. Ils souhaitaient notamment savoir si une personne divorcée et remariée civilement pouvait recevoir la communion. Le pape François n’a jamais répondu à ces questions. Les cardinaux Caffara et Meisner sont aujourd’hui décédés.
On retrouve encore parmi les cinq cardinaux qui formulent ces nouveaux doutes le cardinal allemand Walter Brandmüller (94 ans) et le cardinal américain Raymond Burke (75 ans), vif critique du processus synodal en cours. Le cardinal guinéen Robert Sarah (78 ans) et l’ancien archevêque de Hong Kong Joseph Zen (91 ans) signent également la lettre, aux côtés du cardinal Sandoval Iniguez (90 ans), ancien archevêque de Guadalajara, au Mexique. (cath.ch/imedia/hl/rz)
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