«Libérée, délivrée…» La musique du film Disney La Reine des Neiges résonne sur des airs de piano devant la maison où le journaliste de cath.ch et son groupe de jmjistes s’arrêtent, en cette heure tardive. L’hôtesse des lieux, Leonor, une petite femme aux cheveux gris, attend les arrivants, emmenés par l’abbé Cyrille Von Mandach, derrière le muret d’enceinte. Un large sourire aux lèvres, elle nous parle spontanément dans un très bon français. Et nous nous rendrons compte plus tard que son anglais est encore meilleur.
En intégrant la grande et ancienne maison, nous découvrons que la musique provenait d’un concert improvisé par les premiers jeunes arrivés sur place, qui possèdent des talents musicaux. Certains d’entre eux intégreront d’ailleurs la chorale qui animera les catéchèses «Rise Up» du matin.
Immédiatement après avoir accueilli les premiers hôtes, Leonor leur a laissé son piano pour qu’ils puissent célébrer en musique leur arrivée. Un premier signe, qui sera suivi par bien d’autres, que chez les Eiro, l’adage «mi casa e tu casa» n’est pas un vain mot. Le service aux invités n’en sera pas moins généreux. Les invités trouveront notamment chaque matin la table à manger richement achalandée pour le petit-déjeuner.
La maison de Colares, une petite station balnéaire à l’ouest de Lisbonne, hébergera finalement une dizaine de pèlerins venant de divers cantons romands. L’imposante demeure a été construite par le père de Leonor comme résidence de vacances en 1954. Elle devait être assez grande pour contenir une famille de dix enfants. Le bâtiment est ancien et sobre mais bien entretenu. C’est une option privilégiée pour les participants au grand rassemblement, dont beaucoup doivent se contenter de dormir au sol dans des établissements publics. A Colares, la caserne des pompiers et les écoles locales.
Entre 100 et 110 des 512 jeunes Romands inscrits pour les JMJ ont pu être logés dans une trentaine de familles. Pour toutes les JMJ de Lisbonne, 8’831 familles ont accueilli plus de 28’600 pèlerins.
L’avantage pour les hébergés en famille est surtout de pouvoir s’immerger dans la vie et la culture locales. Les invités de la Casa Santa Teresa font ainsi rapidement connaissance avec le mari de Leonor, Paulo, un petit homme également souriant et à l’allure dynamique, malgré ses 79 ans. Lui aussi pratique un français presque parfait. Les deux retraités l’ont appris à l’école, alors qu’à leur époque il s’agissait d’une des langues principalement enseignées.
La demeure se situe dans un très bel endroit, cerné par les pinèdes, à une dizaine de minutes de la plage. Quelques courageuses et courageux ‘jmjistes’ se seront risqués à plonger dans les eaux encore fraîches, avant que ne débute le programme de la journée.
Leonor et Paulo expriment à cath.ch leur satisfaction de recevoir les jeunes dans leurs murs. «Lorsque la paroisse nous a demandé si nous pouvions accueillir des jeunes, nous avons été tout de suite d’accord, avec toutes les pièces libres que nous avons…», souligne Paulo. D’autant plus que toute la famille est impliquée de diverses façons dans l’organisation des JMJ.
L’agitation ne leur fait aucunement peur, en ayant une habitude certaine. Les deux retraités portugais accueillent en effet régulièrement dans leurs murs leurs enfants et petits-enfants, respectivement au nombre de cinq et douze.
Le don de soi est un processus naturel dans le couple. Leonor est engagée dans la paroisse de Colares depuis de nombreuses années. Elle ne s’occupe maintenant plus que de tricoter des petites jaquettes pour les nouveaux nés. Mais avant cela, elle a eu de multiples activités caritatives, surtout auprès des plus démunis au Portugal. Paulo et Leonor ont notamment soutenu l’un de leurs fils, devenu jésuite, actuellement directeur d’une association oeuvrant pour les enfants des quartiers défavorisés de Lisbonne.
«Il est complètement dans la ligne du pape François et de la préférence pour les pauvres», affirme Leonor, avec une intonation de fierté dans la voix. «Avant qu’il ne devienne jésuite, je ne me sentais pas réellement concernée par la foi, admet la Portugaise. Mais quand il a décidé d’entrer dans les ordres, j’ai vécu une véritable conversion. Je suis la preuve que les enfants peuvent aussi amener leurs parents vers la foi», s’amuse-t-elle.
Accueillir les pèlerins allait également de soi pour les Eiro parce qu’ils ont une très grande espérance en la jeunesse d’aujourd’hui. «J’ai très peur de l’influence des smartphones et des ordinateurs sur les jeunes. Malgré cela, je suis très optimiste quand je les rencontre et je n’ai aucun doute qu’ils relèveront le défi des guerres et de la sauvegarde de la planète.» Le contact avec les jmjistes ou leurs petits-enfants les persuade également que la jeunesse se passe dans la tête. «La jeunesse pour moi, c’est garder un esprit ouvert, assure Paulo. Et nous voulons garder ouverts non seulement notre esprit, mais aussi notre maison.»
Le couple a pris congé de ses hôtes le samedi matin 5 août, alors que les pèlerins sont appelés par le pape François à participer à la veillée finale et à la messe, dans le Parque Tejo, à Lisbonne. (cath.ch/rz)
Leonor et Paulo Eiro sont nés respectivement en 1946 et 1944 à Lisbonne. Les deux sont issus de familles catholiques et de la classe aisée de la population. Leonor a eu la chance, dans sa jeunesse, de pouvoir partir un an aux Etats-Unis, où elle a appris l’anglais. Paulo a suivi une école jésuite pour devenir ingénieur civil. Le sport, et notamment le tennis, les a réunis. Tout en élevant cinq enfants, ils ont réalisé une petite carrière de tennis dans le circuit amateur. Ils se sont mariés en 1969.
Le couple a ainsi beaucoup voyagé, vivant quelques années en Angola et à Macao. Leonor a notamment été traductrice pour la télévision portugaise. Elle créait les sous-titres en portugais pour les films en français, en anglais et en espagnol.
Alors que Paulo joue encore au tennis trois fois par semaine, Leonor se concentre sur ses activités de foi. Elle se rend notamment chaque année à Fatima. Le reste du temps, ils coulent des jours «pas si paisibles» dans la Casa Santa Teresa de Colares. RZ
Raphaël Zbinden
Portail catholique suisse
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