Vietnam: au nord, les habitants reviennent à la foi

Plusieurs centaines d’habitants du nord du Vietnam, anciens catholiques ou sans religion, rejoignent l’Église locale depuis quelques années. La région, où la pratique religieuse a longtemps été interdite, compte 13 paroisses et plus de 100 antennes paroissiales et centres missionnaires. L’activité religieuse reste toutefois strictement encadrée par les autorités.

Paul Tran est né dans une famille catholique, mais il a cessé d’aller à l’église jusqu’en 2021. Aujourd’hui, âgé de 76 ans, il est l’un des paroissiens les plus actifs dans son village de Chieng Pha Phong Lai, une station missionnaire de la province montagneuse de Son La. «J’ai trouvé beaucoup de joie dans ma vie de foi depuis que j’ai rencontré mon curé pour la première fois il y a deux ans», confie Paul, un fermier.

Comme lui, plusieurs centaines de personnes, qui reviennent à la foi ou sont sans religion, rejoignent l’Église tous les ans dans la région où la pratique religieuse était autrefois interdite, explique le site Eglises d’Asie.

Le fermier attribue son retour à la foi à une visite pastorale du curé de la paroisse locale, le Père Joseph Nguyen Van Thanh, en 2021. Il explique que lorsqu’il s’est installé dans la région depuis la province de Nam Dinh en 1971, après son mariage, les gens ne pratiquaient plus aucune religion à cause des restrictions du gouvernement. D’autant qu’il n’y avait pas d’église ni de prêtre sur place.

16’000 catholiques pour une vingtaine de prêtres

La majorité des catholiques actifs dans la mission locale sont dans la même situartion que Paul Tran. Selon le Père Thanh, qui a commencé un travail de réévangélisation à Son La, beaucoup ont cessé de pratiquer il y a plusieurs décennies. Jusqu’à il y a 10 ans, les chrétiens étaient interdits de pratiquer dans les trois provinces de Dien Bien, Hoa Binh et Son La. Les prêtres catholiques ont pu revenir seulement en 2015. Mais, selon des chiffres de l’Église locale publiés en 2022, de nouvelles communautés qui se sont établies dans ces provinces se développent rapidement,

Actuellement, les trois provinces comptent 13 paroisses et plus de cent antennes paroissiales et centres missionnaires, pour un total d’environ 16’000 catholiques pour une vingtaine de prêtres. Chaque année, près de 500 nouveaux catholiques rejoignent l’Église locale malgré les restrictions toujours en vigueur. Par exemple, le gouvernement n’a approuvé qu’une seule paroisse dans chaque province.

Des restrictions toujours en vigueur

D’autres paroisses restent «non reconnues» et ne peuvent organiser des activités religieuses que sous certaines conditions, en termes d’espace et de participation. Leurs activités sont censées se dérouler dans leurs lieux de culte avec une liste de participants communiquée au gouvernement. Ils doivent aussi signaler leur programme annuel aux autorités locales. De plus, l’Église locale n’est pas autorisée à posséder ses propres biens immobiliers.

Malgré tout, le nombre de catholiques continue d’augmenter, en particulier à Son La, la troisième plus grande province du pays, frontalière avec le Laos. La province compte aujourd’hui près de 9’000 catholiques pour huit paroisses et douze prêtres. Près de 300 nouveaux baptisés rejoignent l’Église à Son La tous les ans.

Le Père Thanh, qui a été assigné dans la province en 2021, explique que durant les années 1970, le gouvernement a envoyé plusieurs centaines d’habitants dans ces régions peu peuplées afin de les développer, tout en interdisant les activités religieuses, ce qui a forcé beaucoup de personnes à abandonner la foi. En 2005, les autorités ont autorisé la présence d’un seul prêtre (le Père Joseph Nguyen Trung Thoai) après une permission obtenue par Mgr Antoine Vu Huy Chuong, évêque de Hung Hoa, auprès du gouvernement local. Plus tard, d’autres prêtres ont été autorisés.

Aide matérielle et spirituelle

Le Père Thanh, responsable de la Commission pour l’évangélisation du diocèse de Hung Hoa, explique qu’il visite les gens à domicile, qu’il leur offre une aide matérielle et spirituelle. L’évangélisation et la ›réévangélisation’ des provinces où les gens vivent dans la pauvreté, où ils manquent d’infrastructures et d’accès aux activités pastorales, font partie des priorités de l’Église locale, ajoute le prêtre.

De son côté, le Père Joseph Nguyen Ngoc Ngoan, premier curé de la paroisse dans la province voisine de Dien Bien, explique que la province compte environ 3’000 catholiques pour quatre paroisses, mais que le gouvernement local ne reconnaît qu’une seule paroisse. «Notre priorité est de leur offrir de nombreuses opportunités de participer aux activités religieuses», confie le Père Ngoan, qui est établi dans la province depuis 2016.

Selon lui, les prêtres installés dans la région doivent beaucoup voyager le long de routes difficiles d’accès afin d’atteindre les zones les plus reculées, dont certaines se trouvent à plus de 200 km de la paroisse. «Nous essayons d’échanger directement avec les autorités locales pour les convaincre que nous travaillons aussi dans le but de sauver les gens de la drogue, de la traite des êtres humains, du mariage précoce et d’autres fléaux sociaux», ajoute le Père Joseph Nogan. (cath.ch/eda/bh)

Liberté religieuse: réformes modestes
Le Vietnam compte près de 8 millions de catholiques (env. 7% de la population), c’est la deuxième religion après le bouddhisme. Selon l’œuvre d’entraide catholique «Aide à l’Eglise en détresse», le Vietnam continue de mettre en œuvre des réformes modestes et progressives, accordant aux communautés religieuses enregistrées auprès de l’État une plus grande liberté de posséder des biens et de poursuivre des activités religieuses. Toutefois, les groupes non enregistrés, en particulier les bouddhistes indépendants continuent d’être victimes de harcèlement et de discrimination graves, en particulier au niveau local. BH

Bernard Hallet

Portail catholique suisse

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