Le mercredi 29 mars s’annonce tendu dans la laure de Kiev, ce lieu saint de la religion chrétienne orthodoxe, classé au patrimoine de l’Humanité et dirigé par le métropolite de Kiev Onuphre. Les 500 personnes qui y résident, dont 200 moines, tous historiquement affiliés au patriarcat de Moscou, ont reçu l’ordre par le gouvernement ukrainien de partir d’ici «à la fin de la journée, à 23h59», dernier délai.
Les mouvements, à l’entrée du domaine sont déjà filtrés depuis plusieurs semaines par les forces ukrainiennes, rapporte le site Franceinfo. Quelques camionnettes de déménagement ont été aperçues ces derniers jours. Mais plusieurs moines, comme le métropolite Pavlo, appellent à résister. Et ils ont demandé aux fidèles de venir les soutenir pour «défendre les lieux saints». Il n’est donc pas exclu que des affrontements se produisent, et que les prêtres finissent par être expulsés manu militari.
L’avocat de la Laure, l’archiprêtre Nikita Chekman, a déposé une plainte auprès du tribunal de commerce de Kiev concernant l’absence de motifs de résiliation unilatérale du contrat de location. Une demande de mesures provisoires, qui pourrait permettre d’éviter l’expulsion illégale des moines de la Laure, a également été déposée auprès du tribunal.
L’avocat a déclaré que le monastère et ses résidents ont contacté à plusieurs reprises les autorités et se sont enquis des résultats des travaux d’un groupe interinstitutionnel qui aurait constaté que le monastère ne respectait pas les termes du contrat. Il leur a été répondu que les informations demandées étaient réservées à un «usage officiel» et qu’elles ne pouvaient pas être fournies.
«En conséquence, la Réserve nationale accuse le monastère d’avoir enfreint les termes de l’accord, tout en le privant de la possibilité de fournir des explications formelles. Cette injustice a servi de base à la demande de protection juridique», a déclaré le Père Nikita.
L’action en justice affirme que la résiliation unilatérale illégale de l’accord priverait les moines de la Laure de leurs droits de résidence dans un contexte de loi martiale. Ils sont officiellement enregistrés comme résidents de la Laure.
«La restauration et la construction d’édifices et de structures religieuses ont été réalisées grâce aux dons de croyants de l’Église orthodoxe ukrainienne, dont le droit de culte sera violé en cas de destruction ou de détérioration des biens, de leur transfert à des tiers ou de l’octroi d’autorisations à d’autres organisations religieuses pour la célébration du culte», a déclaré le prêtre.
Le pouvoir ukrainien reproche aux religieux d’être des agents de Moscou, une Cinquième colonne sur le sol ukrainien. En novembre dernier, les services ukrainiens ont mené une perquisition dans les lieux. Ils affirment y avoir trouvé des passeports russes, de l’argent liquide et des ouvrages pro-russes.
Kiev soupçonne le monastère d’être une base arrière pour des activistes pro-russes et de servir de plateforme de propagande pour Moscou. Les moines contestent totalement cette version des faits. Officiellement, ils ont même coupé les ponts avec Moscou. Même si certains relaient toujours le discours russe sur la responsabilité occidentale dans la guerre. En tout cas depuis cette perquisition, le pouvoir ukrainien a progressivement pris le contrôle de l’accès à la Laure des Grottes de Kiev.
Les nombreux appels lancés par des personnes ordinaires et des célébrités auprès des Nations unies et d’autres grandes organisations n’ont pas fait changer d’avis Kiev, comme l’ont rapporté les médias. Lors de l’audience générale du 15 mars, le pape François avait demandé «aux parties en guerre de respecter les lieux religieux» en soulignant que les personnes occupant le monastère sont «consacrées à la prière» et «de quelle confession qu’elles soient, sont un soutien au Peuple de Dieu». (cath.ch/ag/bh)
Bernard Hallet
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