«Nous sommes en train de préparer une rencontre pour 2025». Le pape a glissé quelques mots sur la préparation du 1700e anniversaire du premier Concile de Nicée aux jésuites congolais qu’il a rencontrés à Kinshasa.
En 325, ce concile rassembla à Nicée (aujourd’hui Iznik, à 130 kilomètres au sud-est d’Istanbul) plus de 300 évêques d’Orient et d’Occident, issus de différents Patriarcats et Églises. La profession de foi – le Credo – qui fut constituée à ce moment-là est très semblable à celle récitée encore aujourd’hui dans la liturgie. Elle affirme notamment que Jésus partage la «même nature que le Père» contrairement à ce que prétendait l’arianisme. C’est pour s’opposer à ce courant que ce concile avait été convoqué.
«Avec le patriarche Bartholomée, nous voulons arriver à un accord sur la date de Pâques», a expliqué le pape François, alors que cette question reste un sujet sensible dans le monde chrétien, où les catholiques et les protestants suivent le calendrier grégorien et les orthodoxes le calendrier julien. En 2025, les deux calendriers coïncideront. «Voyons si nous pouvons nous mettre d’accord là-dessus pour l’avenir», a ajouté le pape François.
Bartholomée et François se sont rencontrés une quinzaine de fois depuis 2013 et ont tissé une relation d’amitié. En 2014, le patriarche de Constantinople avait annoncé leur souhait de se retrouver à Nicée en 2025, pour marquer le 17e centenaire de ce concile qui rassembla dans cette ville l’ensemble des Églises chrétiennes.
Le pape a été interrogé sur le fait qu’il avait un jour accepté d’être évêque, puis pape, alors que les jésuites font normalement le vœu de ne pas rechercher de rôles d’autorité dans l’Église. En effet, le fondateur de la Compagnie de Jésus, Ignace de Loyola, s’était résolument opposé à la nomination comme évêques de membres de sa communauté. Le pape François a répondu avoir refusé à deux reprises d’être évêque, d’abord comme auxiliaire dans le diocèse argentin de San Miguel, puis dans une région du nord de l’Argentine, dans la province de Corrientes. «Le nonce, pour m’encourager à accepter, m’a dit qu’il y avait là les ruines du passé jésuite. J’ai répondu que je ne voulais pas être le gardien des ruines, et j’ai refusé», a raconté le pape aux jésuites.
«Nous devons prier immergés dans la réalité»
Pape François
Finalement, le nonce, avec le consentement du supérieur général des jésuites de l’époque, lui a transmis sa nomination comme évêque auxiliaire de Buenos Aires, en 1992. «Pour cela, j’ai accepté dans un esprit d’obéissance», a-t-il confié, soulignant qu’il croit encore à cette singularité jésuite au sujet de ce vœu. Et d’assurer: «J’ai fait mon possible pour ne pas accepter l’épiscopat».
Un peu plus loin dans l’entretien, le pape a expliqué sa façon de procéder lorsqu’il doit nommer un évêque. Quand il reçoit les noms des trois candidats pour un diocèse et que le premier nom de la terna (liste de trois noms soumise au pape) est celui d’un jésuite, alors il privilégie le deuxième si son profil convient aussi.
Dans ses conversations avec les jésuites, le pape a expliqué que les chrétiens devaient apprendre à avancer dans un contexte païen où l’argent, la réputation et le pouvoir prédominent dans un environnement «qui n’est pas différent de celui des premiers siècles». Pour cela, il ne s’agit pas de favoriser l’émergence d’une culture du «parti uni». «La culture et la foi sont en dialogue et doivent l’être», a insisté le pape François.
Aux jésuites du Soudan du Sud, le pape a confié qu’ils ne pouvaient vivre en chrétiens à Djouba de la même manière qu’à Paris. «Il faut annoncer l’Évangile à chaque culture spécifique, qui a son insuffisance et sa richesse», a-t-il détaillé. Il a aussi mis en garde contre une forme de paganisme qui touche les chrétiens, prenant l’exemple de ceux qui se rendent à la «messe le dimanche exclusivement parce qu’il le faut, c’est-à-dire sans âme, sans foi». Revenant à ses fondamentaux, il a rappelé que l’Église devait être un «hôpital qui va là où il y a des blessés». Elle n’est donc pas «une multinationale de la spiritualité».
Interrogé sur sa façon de prier, le pape François a répondu aux jésuites qu’il célébrait la messe et récitait l’office. «La prière liturgique quotidienne a sa propre densité personnelle», a-t-il assuré. Il a aussi confié prier parfois le chapelet ou bien lire un passage d’Évangile et le méditer. «Cela dépend beaucoup de la journée», a avoué le pontife, expliquant que sa prière pouvait aussi varier selon les événements rencontrés.
«À Kinshasa, lorsque j’ai rencontré des personnes victimes de la guerre dans l’est du pays, j’ai entendu des histoires terribles de blessés, mutilés, abusés… Ils racontaient des choses indicibles. Bien sûr, après je n’ai certainement pas pu prier avec le Cantique des Cantiques», a ainsi rapporté le pape. Il faisait référence à ce chant d’amour poétique entre un homme et une femme contenu dans la Bible.
«Nous devons prier immergés dans la réalité. C’est pourquoi j’ai peur des prédicateurs de prière qui font des prières abstraites, théoriques, qui parlent, parlent, parlent, mais avec des paroles vides. La prière est toujours incarnée», a encore insisté François qui avait consacré en 2020 et 2021 tout un cycle de catéchèses sur la prière. (cath.ch/imedia/hl/rz)
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