Une quinzaine de tables soigneusement préparées avec nappe blanche, rose rouge et chandelle, éclairage tamisé et musique d’ambiance attendent les convives, dans une salle du restaurant du Jura à Fribourg. Le décor pour un repas de saint Valentin en amoureux est planté. Mais au-delà de la romance, aimer est une décision, relèvent Chantal et Charles Cottet, actuels responsables du mouvement pour la Suisse romande. «Aujourd’hui cette réalité a parfois de la peine à être reconnue.»
«Vivre et aimer» entend offrir aux couples des outils de communication destinés à améliorer leur relation. «La méthode consiste à aller chercher, au fond de nous, nos sentiments sur notre vie de couple. Qu’est-ce ce que je ressens lorsque que ma femme, mon mari, me dit telle ou telle chose, se comporte de telle manière?», note Charles.
«Pour ne pas déraper sur: ‘c’est toujours, la même chose, c’est toi qui…’, la méthode ‘Vivre et aimer’ propose un schéma basé sur la communication écrite», poursuit Chantal. «Il s’agit d’abord de voir plutôt chez soi ce que l’on peut faire pour améliorer les choses et ne pas répéter les erreurs. C’est comme un garde-fou pour éviter de tomber dans la récrimination.»
A partir des trois mots clés de la pédagogie jésuite: «Merci, pardon, s’il-te-plaît», chacun va coucher sur le papier une brève «lettre d’amour». «Qui n’est pas une lettre d’amoureux», précise Charles. La lettre commence toujours par un merci qui ne doit pas être forcément en lien avec l’objet du message.
Écrire permet non seulement d’approfondir, mais aussi de ne pas trop réagir à chaud et de porter un regard plus neutre sur une situation. Il s’agit de toujours écrire en ‘je’ et de dire son ressenti. Il n’y a ni jugement, ni justification, mais accueil de la parole de l’autre. La résolution du conflit n’intervient pas à ce moment-là.
«Cela vaut aussi pour des situations belles. Cela nous permet de nous redécouvrir même après des années. On ne connaît pas forcément l’autre ‘par cœur’», remarquent Aline et Jean-Marie Hirt, un couple animateur qui a rejoint la discussion.
La démarche est aussi encadrée dans la durée: 10 minutes d’écriture et 10 minutes d’échange, pas plus. «Un temps que l’on peut normalement trouver dans une journée».
«On ne peut pas commander les sentiments qui nous arrivent comme la tristesse ou la colère. En soi, ils ne sont ni bons ni mauvais. C’est ce que nous en faisons qui compte», reprend Charles.
Pour Jean Marie, «nous mettons des attentes élevées sur la relation de couple, nous imaginons que cela va être un paradis. Mais ce n’est pas l’autre qui va résoudre mes problèmes». «C’est un chemin que nous faisons ensemble», enchaîne Aline.
«La société actuelle manque trop souvent de communication authentique qui malheureusement ne s’apprend pas à l’école, note Jean-Marie. Or l’amour dans le couple est une alliance et pas seulement un contrat donnant-donnant. Pour durer dans le temps, il faut décider de continuer de s’aimer. Un dîner d’amoureux à la Saint-Valentin c’est très bien, mais si cela ne dure qu’une soirée avant de retomber dans une routine, ce n’est pas gratifiant».
«Tout se dire, ne viendra pas forcément tout de suite. Cela peut prendre du temps. Mais garder enfouis en soi des ressentis, n’est jamais une bonne idée», insiste Chantal. «Communiquer sur ses sentiments sans agresser, ni culpabiliser l’autre s’apprend.»
La méthode veut que la lettre se termine toujours par une prise de responsabilité. ‘Qu’est-ce que je peux faire moi, pour régler, améliorer la situation vécue?’. Avoir écrit, avoir parlé, avoir été écouté dénoue déjà bien des tensions. On peut alors trouver une solution ensemble.
«Vivre et aimer» n’est pas une thérapie conjugale, avertit Charles. «Nous essayons plutôt de travailler en amont avec des gens qui vont bien. C’est une démarche d’abord individuelle, l’aspect communautaire vient ensuite. Outre la formation de base «Vivre et aimer» propose des rencontres, où nous reprenons ensemble des éléments de la pédagogie ou une réflexion sur la spiritualité du mariage par exemple. La démarche «Vivre et aimer» est aussi ouverte aux prêtres, aux religieux et religieuses, ou encore aux jeunes fiancés qui envisagent de s’engager. (cath.ch/mp)
«Vivre et aimer»
La méthode «Vivre et aimer» trouve son origine dans l’expérience d’un jeune prêtre espagnol, le Père Calvo, expliquent Hedwige et Flavio Castro Baldo. En 1960, il est sollicité pour accompagner un couple en tant que tel et non pas individuellement. Il organise des réunions pour les couples qu’il appelle ‘Encontro Matrimonial’. En 1967, le Père Galagher, un jésuite américain reprend l’expérience du Père Clavo et construit une trame de session pour aider les couples à améliorer leur communication. C’est là que naît le mouvement international «World Wide Marriage Encounter». Il est présent aujourd’hui dans plus de 135 pays et plus de 2,5 millions de couples ont suivi une des formations proposées.
En 1973, la méthode débarque en Europe avec les premières rencontres en France et à Genève. En 1996, en Suisse et en France, le mouvement prend le nom de «Vivre et aimer».
Le mouvement se fonde sur le bénévolat. Le recrutement connaît des hauts et des bas, la difficulté consiste surtout à trouver des couples prêts à s’engager comme formateurs ou responsables. Entre la Suisse et la France on compte une cinquantaine de sessions par an. MP
50 ans, ça se fête
Cette année, le mouvement «vivre et aimer» fête les 50 ans de sa présence en Europe. Outre les weekends de formation habituels «Amour et engagement pour les jeunes» et «Aimer dans la durée» pour les couples mariés, l’anniversaire sera marquée par une rencontre festive le 6 mai dans un lieu qui reste à déterminer.
Le 11 novembre, les couples romands sont invités pour une rencontre et une célébration internationale à Paris. Renseignements sous: vivre-et-aimer.org MP
Maurice Page
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