(Attention, ceci n’est pas une traduction officielle mais un document de travail)
Introduction du pape François.
Bon dimanche, merci pour votre travail ces jours-ci. Cela a été un voyage œcuménique avec mes deux frères, c’est pourquoi j’ai voulu qu’ils soient aussi tous les deux à la conférence de presse. Avant tout, l’archevêque de Canterbury qui, lui, a l’histoire, depuis des années, de ce chemin de réconciliation. Il a beaucoup travaillé, avant moi, sur cela.
(À ce moment-là, le pape François laisse la parole à l’archevêque de Canterbury puis au modérateur d’Écosse. (Voir leurs introductions en bas de l’article).
Question 1: par Jean-Baptiste Malenge, de la radio & télévision catholique Elikia, de l’archidiocèse de Kinshasa.
Très Saint Père, vous avez désiré depuis longtemps visiter la RDC. Maintenant, tout le pays rayonne de la joie que vous venez de semer. Quelle importance accorderez-vous désormais à l’accord signé en 2016 entre le Saint-Siège et la RDC, accord portant sur des matières d’intérêts communs comme l’éducation et la santé. L’accord est en train d’être mis en application, maintenant que vous avez touché de vos mains diverses blessures, maintenant que le pasteur universel a senti l’odeur des brebis congolaises?
Pape François: Merci. D’abord sur l’accord, je ne connais pas cet accord, excusez-moi. Peut-être, il y a le secrétaire d’État là, il peut donner une opinion. Je sais que dans les derniers temps l’accord était en marche entre le Saint-Siège et la République du Congo. Mais je ne le connais pas. Je ne peux pas te répondre sur cela. Je ne connais pas non plus la différence entre ce nouveau qui est en marche et l’autre. Ces choses sont portées par la secrétairerie d’État, le secrétaire d’État, aussi, et d’une manière plus étroite Mgr Gallagher, qui est ici. C’est la partie politique des rapports des États avec le Saint-Siège. Ils sont braves de faire des accords, des accords pour le bien de tous.
J’ai vu ici au Congo tant d’envie d’aller de l’avant, tant de culture. J’ai eu, avant d’arriver ici, il y a quelques mois, une rencontre via Zoom avec des universitaires africains. Et certains étaient du Congo; très très intelligents, d’une intelligence supérieure, très très intelligents. Cela est une de vos richesses. Les jeunes; les jeunes intelligents. Il faut soutenir pour qu’ils étudient et aillent de l’avant. Et il faut leur faire de la place. Ne pas leur fermer les portes. Vous avez tant de richesses naturelles qui attirent des personnes qui viennent – excusez-moi la parole – : exploiter le Congo. Cette idée je l’avais formulée déjà, je l’avais dite: l’Afrique est exploitée, l’Afrique est faite pour être exploitée. Quelqu’un disait, je ne sais pas si c’est vrai que les pays qui avaient des colonies ont donné l’indépendance mais du sol, le sous-sol n’a pas reçu l’indépendance, le sol si. Ils viennent chercher des minerais. Je ne sais pas si c’est vrai. On dit cela.
Mais l’idée que l’Afrique est faite pour être exploitée nous devons la retirer. L’Afrique a sa propre dignité, et le Congo a un haut niveau.
Et en parlant de l’exploitation, le problème de l’Est me heurte douloureusement, qui est un problème de guerre d’exploitation. Au Congo, j’ai pu avoir une réunion avec des victimes de cette guerre. Terrible. Des blessés, des amputés, tant de souffrances, tant de souffrances, tout cela pour prendre les richesses. Cela ne va pas. Cela ne va pas.
Revenant à ta demande sur le Congo, le Congo a tant de possibilités.
(Le pontife laisse ensuite la parole à l’archevêque de Canterbury puis au modérateur d’Écosse.)
Question 2: Jean-Luc Mootoosamy, du Centre de Production Audiovisuel (CAPAV) du Diocèse de Port-Louis, Maurice.
Saint Père, la violence se propage en RDC et au Soudan du Sud malgré la présence, durant des décennies, de Missions des Nations Unies. Comment pouvez-vous, comme «un», aider à recommander un nouveau modèle d’intervention, connaissant la tentation grandissante de plusieurs pays africains déçus, de choisir d’autres partenaires pour leur sécurité, des partenaires qui pourraient faire fi des lois internationales, comme des organisations privées russes au Sahel par exemple. Je vous remercie.
Pape François: Le sujet de la violence est un sujet quotidien, nous l’avons vu aussi, au Soudan du Sud. C’est douloureux de voir comment on provoque la violence: un des points est la vente des armes. L’archevêque Welby vous a dit quelque chose là-dessus. La vente des armes, aujourd’hui je crois que dans le monde, c’est la peste, la plus grande peste c’est la vente des armes qui la provoque. Quelqu’un m’a dit que si on arrêtait de vendre des armes pendant un an, la faim dans le monde s’arrêterait. Je ne sais pas si c’est vrai ou pas. Mais aujourd’hui la vente des armes est au sommet, mais pas seulement entre les grandes puissances, aussi entre ces pauvres gens, et avec cela on leur insémine la guerre à l’intérieur. C’est cruel. On leur dit va à la guerre et on leur donne des armes, parce que derrière il y a des intérêts, surtout des intérêts économiques pour exploiter la terre, exploiter les minerais, exploiter les richesses.
Il est vrai que le tribalisme en Afrique n’aide pas. Sur cela, je ne sais pas bien comment est le Soudan du Sud, mais je crois qu’il y en a aussi. Il faut un dialogue entre les différentes tribus. Je me souviens quand je suis allé au Kenya, dans le stade plein, tous s’étaient levés et avaient crié «non au tribalisme, non au tribalisme». Mais il est vrai que chacun a sa propre histoire, qui ont de vieilles inimitiés, une culture différente… Mais c’est aussi vrai qu’on provoque la compétition entre les tribus avec les ventes d’armes et ensuite on exploite la terre des tribus.
C’est diabolique. Ne me vient pas à l’esprit une autre parole: cela détruit, détruit la création, détruit les personnes, détruit la société. (…) Je ne sais pas si c’est le cas au Soudan du Sud mais dans certains pays des jeunes sont pris pour faire l’armée et se battre ensuite, des très jeunes. C’est très triste. Je crois que le problème le plus grave est le fait de prendre les richesses des pays – coltan, lithium, toutes ces choses-, et à travers la guerre, pour laquelle ils vendent les armes, ils exploitent aussi les enfants.
(Le pontife laisse ensuite la parole au modérateur d’Écosse puis à l’archevêque de Canterbury. Voir leurs réponses en bas de l’article.)
Question 3: Claudio Lavanga, du média NBC News.
L’archevêque Welby a rappelé ce moment incroyable lors duquel vous vous êtes agenouillé pour implorer les dirigeants du Sud Soudan de faire la paix en 2019. Malheureusement dans deux semaines il y aura l’anniversaire d’un an de guerre en Ukraine. Seriez-vous prêt à accomplir le même geste devant V. Poutine, vu que vos appels à la paix sont restés lettre morte? Et seriez-vous prêts à faire un appel commun tous les trois à la paix en Ukraine?
Pape François: Je suis ouvert à une rencontre avec les présidents, celui de l’Ukraine et celui de la Russie. Je suis ouvert à une rencontre. Si je ne suis pas allé à Kiev, c’est parce que ce n’était pas possible pour le moment d’aller à Moscou. C’était en dialogue. Toutefois au deuxième jour de la guerre, je suis allé à l’ambassade russe pour dire que je souhaitais aller à Moscou parler avec Poutine. Pour peu qu’il y ait une petite fenêtre, pour négocier. Puis le ministre Lavrov m’a répondu que nous verrons plus tard.
Ce geste de la rencontre de 2019 je ne sais pas comment il a eu lieu, il n’a pas été pensé, et les choses qui n’ont pas été pensées, tu ne peux pas les répéter: c’est l’esprit qui te guide, cela ne peut pas s’expliquer. Et moi-même je l’ai oublié, ça a été un service, j’ai été l’instrument d’une certaine force intérieure, ce n’était pas une chose planifiée.
Mais aujourd’hui ce n’est pas la seule guerre: je voudrais être juste. Cela fait 12 ou 13 ans que la Syrie est en guerre. Plus de 10 ans que le Yémen est en guerre! Pensez au Myanmar: pauvres Rohingas, réduits à courir le monde parce qu’ils ont été chassés de leur propre patrie. Partout en Amérique latine… combien de guerres? Oui, il y a des guerres plus importantes pour le bruit qu’elles font. Mais je ne sais pas, le monde entier est en guerre. C’est une autodestruction. On doit réfléchir sérieusement. C’est une autodestruction. Arrêtons-nous à temps. Car une bombe en appelle une autre plus grande, on ne sait pas où l’escalade finira. [Gardons] la tête froide…
Son Excellence a parlé des femmes. Je les ai vues au Sud Soudan. Elles portent les enfants, et tant de fois elles restent seules, mais elles ont la force de créer un pays. Les femmes sont braves, ce sont elles qui font aller de l’avant. Les hommes vont à la guerre et ces femmes avec 2, 3, 4, 5 enfants vont de l’avant. Je les ai vues ici au Sud Soudan.
Et à ce propos, je voudrais dire un mot aux soeurs, qui se mélangent, j’en ai vu certaines au Sud Soudan. Et aussi à la messe aujourd’hui, vous avez entendu le nom de tant de soeurs tuées dans la guerre. Revenons à la force de la femme. Nous devons la prendre au sérieux, et non pas l’utiliser comme publicité de maquillage, s’il vous plaît. C’est une insulte à la femme. La femme est faite pour des choses plus grandes.
Regardez les guerres qui sont dans le monde.
(Le pontife laisse ensuite la parole à l’archevêque de Canterbury.)
Question 4: Bruce de Galzain, Radio France.
Saint Père, avant de partir pour votre voyage apostolique, vous avez dénoncé la criminalisation de l’homosexualité. C’est un délit. Au Congo, au Sud Soudan, ce n’est pas accepté par les familles. Moi, même, j’ai rencontré cette semaine à Kinshasa cinq homosexuels, chacun d’entre eux avait été refusé, sinon chassés de leur propre familles. Ils m’ont expliqué que ce refus était dû à l’éducation religieuse de leurs parents. Certains d’entre eux avaient été portés chez des prêtres exorcistes parce qu’ils croyaient qu’ils étaient possédés par des esprits impurs. Ma question, Saint Père: que dites vous aux familles du Congo Kinshasa et du Sud Soudan qui refusent encore leurs propres enfants. Que dites-vous aux prêtres, aux évêques?
Pape François: J’ai parlé de ce problème durant deux voyages. D’abord depuis le Brésil: si une personne de tendance homosexuelle et croyante cherche Dieu, qui suis-je, moi, pour la juger? Cela, je l’ai dit à ce voyage. Puis, en retournant d’Irlande. Cela a été un voyage un peu problématique, ce jour-là était sortie la lettre de cette jeune femme. Mais là, j’ai dit clairement aux parents: ils ont le droit de rester à la maison, les enfants qui ont cette orientation. Vous ne pouvez pas les chasser de chez vous. Ils ont le droit de cela. Puis récemment, j’ai dit quelque chose, je ne me souviens pas exactement quoi, dans l’interview de l’Associated Press.
La criminalisation de l’homosexualité est un problème que l’on ne doit pas laisser passer. Le calcul est, plus ou moins, que 50 pays, d’une manière ou d’une autre, criminalise l’homosexualité. Certains disent que c’est plus. Mais disons qu’ils sont 50. Et parmi eux, certains d’entre eux, je pense environ une dizaine, ils ont la peine de mort. Cela n’est pas juste.
Les personnes de tendance homosexuelle sont enfants de Dieu. Dieu les aime. Dieu les accompagne. Je vois que certains sont impliqués dans des situations diverses et non voulues. Mais condamner ainsi une personne, c’est un péché. Criminaliser les personnes de tendance homosexuelle est une injustice. Je ne parle pas des groupes… Non, non, je parle des personnes. On peut me dire: il y a des groupes, qui font des demandes.
Non, des personnes. Les lobbys, c’est autre chose. Là, je parle des personnes. Je crois que dans le catéchisme de l’Église catholique, il y a une phrase qui dit: ils ne doivent pas être marginalisés. Je crois que la chose est claire sur ce point.
(Le pontife laisse ensuite la parole à l’archevêque de Canterbury. Lire la réponse de Justin Welby à cette question, en bas de l’article.)
Question 5: par un journaliste de la télévision autrichienne.
Ces derniers jours, on a beaucoup parlé d’unité. Si [ce voyage] s’agissait de la démonstration de l’unité du christianisme au Sud-Soudan ou de l’unité de l’Église catholique elle-même. Je voudrais ensuite vous demander si vous avez le sentiment qu’après la mort du pape Benoît XVI, il a été plus difficile pour vous dans votre travail, dans votre mission, parce que les tensions entre les différentes ailes de l’Église catholique se sont renforcées.
Pape François: Sur ce point je voudrais dire que j’ai pu parler de tout avec le pape Benoît et échanger des opinions. Et lui était toujours à mes côtés, en (me) soutenant. Et s’il avait une quelconque difficulté, il m’en parlait. Et on en parlait. Et il n’y avait pas de problèmes. Une fois je parlais du mariage entre personnes homosexuelles. Le mariage est un sacrement. Et nous ne pouvons pas faire un sacrement. Mais il y a une possibilité d’assurer les biens… C’est la loi civile. Ça a commencé en France. Je ne me souviens pas comment ça s’appelle. Une loi civile qui fait que n’importe quelle personne peut faire une union civile, pas forcément pour un couple. Trois anciennes femmes à la retraite font une union civile pour acquérir des choses… (des droits?).
Une personne qui se croit un grand théologien, à travers un ami du pape Benoît, est allé le voir. Et il a porté plainte contre moi. Benoît ne s’est pas effrayé. Il a appelé quatre cardinaux théologiens de haut niveau. Il leur a dit «expliquez-moi ça». Et eux ils lui ont expliqué. Et l’histoire s’est finie comme ça. C’est une anecdote qui montre comment agissait Benoit quand il y avait une plainte.
Certaines histoires qui se racontent, que Benoît était attristé par ce que le nouveau pape a fait… ce sont des histoires chinoises. Benoît… au contraire je l’ai consulté pour certaines décisions et il était d’accord. Il était d’accord. Je crois que la mort de Benoît a été instrumentalisée par des gens qui veulent apporter de l’eau à leur propre moulin. Et les gens qui d’une façon ou d’une autre instrumentalisent une personne si bonne si pieuse («così di Dio»), je dirais même un Saint Père de l’Église, c’est un homme d’un tel niveau… ces gens-là n’ont pas d’éthique.
Ce sont des personnes de partis, pas d’Église. Et on voit partout la tendance d’utiliser les positions théologiques des partis, et ça porte à ceci… on laisse tomber: ces choses retomberont d’elles-mêmes. Ou une certaine ne retombera pas et continuera de l’avant comme ça s’est déjà produit dans l’histoire de l’Église. Mais j’ai voulu dire clairement qui était le pape Benoît: il n’était pas une personne aigrie.
Question 6: par un journaliste de la Radio nationale espagnole.
Bonjour Sainteté, nous revenons de deux pays victimes de ce que vous avez appelé la globalisation de l’indifférence, vous le dites depuis le début de votre pontificat et votre voyage à Lampedusa, pensez-vous poursuivre ces voyages et visiter d’autres pays oubliés? Où iriez-vous? Et après ce voyage si long et exigeant comment allez-vous? (et je voudrais savoir si l’archevêque et le modérateur feraient d’autres voyages? À cette dernière question qui ne lui est pas adressé le pape répond: «Cela dépend du menu!»)
Pape François: Elle est partout la globalisation de l’indifférence. Il peut y avoir dans son propre pays des gens qui oublient de regarder leurs compatriotes et les mettent de côté pour ne pas y penser. Savoir que les plus grandes fortunes du monde sont dans les mains d’une minorité et ces personnes ne regardent pas la misère, leur cœur ne s’ouvre pas pour aider!
Sur les voyages, je crois qu’il y a l’Inde l’année prochaine. Le 29 septembre [Matteo Bruni dit bien le 23, NDLR] je vais à Marseille et si c’est possible j’irai de Marseille en Mongolie. Mais ce n’est pas arrêté, c’est possible! Et puis un autre cette année, je ne m’en souviens pas (eh eh Aura Miguel me fait un geste), Lisbonne l’année prochaine [Cette année]. Mais en ce qui concerne les critères, j’ai choisi de visiter les pays plus petits de l’Europe. On me dira: il est allé en France! Mais non, je suis allé à Strasbourg. J’irai à Marseille pas en France: les plus petits, les plus petits pour connaitre l’Europe cachée qui a tant de culture mais que tout le monde ne connait pas et pour accompagner des pays comme l’Albanie par exemple qui a été le premier à souffrir de la dictature la plus cruelle de l’histoire. C’est comme cela que je choisis en évitant de tomber dans la globalisation de l’indifférence.
[Matteo Bruni lui rappelle la question sur la santé ]
Pape François: La mauvaise herbe ne meurt jamais [Il parle de lui avec cette expression typiquement espagnole, NDLR] Ma santé n’est pas la même qu’au début de mon pontificat, mon genou me gêne mais je vais de l’avant lentement et on verra…
*** FIN DE LA CONFERENCE ***
Introduction de Justin Welby, archevêque de Canterbury.
En janvier 2014, ma femme et moi avons visité le Soudan du Sud dans le cadre d’un voyage au sein de la communion anglicane. En arrivant, l’archevêque anglican nous a demandé d’aller dans une ville nommée Bor. La guerre civile était à ce moment-là au plus fort depuis cinq semaines. Une fois là-bas, nous avons pris un avion à un moteur et avons atterri dans un aéroport désert, aux portes duquel se trouvaient déjà les premiers corps, 3’000 corps non enterrés à Bor se comptaient à ce moment-là. Il y en aurait ensuite 5’000. Nous sommes ensuite allés à la cathédrale où tout le clergé avait été assassiné, leurs femmes violées avant d’être assassinées à leur tour. Au retour, ma femme et moi avons ressenti la nécessité de voir comment soutenir le Soudan du Sud. Plus tard, lors d’un des nombreux rendez-vous que j’ai régulièrement la chance d’avoir avec le pape François, nous avons beaucoup parlé du Soudan du Sud et développé l’idée de la retraite spirituelle.
À partir de 2016, mes équipes, avec celles du Vatican, ont visité le Soudan du Sud la plupart des mois et ont travaillé sur le terrain avec des leaders locaux afin d’organiser cette visite. Ma femme a vu les épouses des évêques et des leaders femmes qui eux-mêmes ont exercé une grande pression et nous avons rendu visite à des leaders en exil en Ouganda.
En 2018, il est devenu clair qu’une visite serait possible en 2019. Nous y sommes parvenus, c’est arrivé et ce fut un miracle.
Un des VP était en résidence surveillée à khartoum et je me souviens que la veille avant la visite, je prenais un vol très tôt et j’attendais sur le parvis d’une école à Nottingham et j’avais le secrétaire général de l’ONU à qui je demandais l’ouverture de l’espace aérien au-dessus du pays et qu’il donne un visa au VP. Le VP a réussi à avoir le dernier vol en sortant de Khartoum juste avant la fermeture de l’espace aérien soudanais, après le coup d’état.
Ce moment du pèlerinage de 2019, avec le moment impossible à oublier du pape qui s’agenouille pendant qu’ils tentent de l’en empêcher. Cela a été un moment clé, un tournant.
Nous avons eu des conversations intenses et à un moment le VP est allé dans son coin à une réunion importante et est revenu et a accepté de reprendre les discussions. C’était un moment clé, un tournant.
Mais un ancien entraineur de foot britannique dit toujours que l’on est bons que si on continue à l’être lors du prochain match, or avec le Covid nous avons raté le match d’après. Nous avons raté la bonne fenêtre de tir, le bon moment dans le processus de paix. Et alors que nous arrivions à cette visite, les équipes venaient mais elles étaient moins sûres d’elles qu’avant 2019. J’ai anticipé la visite avec découragement.
Pour paraphraser le pape, là le coeur a parlé au coeur, ce n’était pas à un niveau intellectuel qu’il y a eu des contacts, les coeurs ont parlé aux coeurs. Il y a eu un petit momentum à un niveau intermédiaire et les racines sont là et là nous avons besoin d’un changement dans les coeurs des politiques. Ils doivent accepter un processus, il doit y avoir une fin à la corruption et à la contrebande d’armes. Ca nécessitera du travail avec le Vatican et nous, mais aussi avec des gouvernements et la troïka pour transformer cette porte ouverte, pas aussi ouverte que je souhaiterais, et faire des progrès. Nous avons besoin de progrès pour 2023.
Introduction de Iain Greenshields, Modérateur de l’église presbytérienne
Mon expérience est évidemment très différente de celle du pape et de l’archevêque de Canterbury et c’est ma première fois au Soudan du Sud. Ce n’est cependant pas une première pour mon église au Soudan du Sud car mon prédécesseur y a voyagé vers ce qui, selon son estimation, était une situation très vulnérable. La réconciliation, le pardon sont au cœur de la conversation et du dialogue qui a eu lieu alors en 2015. Les personnes ont été invitées à rentrer en Ecosse pour réfléchir, recevoir une formation et rentrer au Soudan du Sud. Cela s’est passé dans le district du Soudan du Sud. Je vais faire écho à ce que mon ami vient de dire: des mots forts ont été dits, la vérité a été dite, aussi bien aux cœurs qu’aux esprits. Je crois que la situation aujourd’hui est clairement ainsi: les actions parlent plus que les mots. Nous avons été invités par le gouvernement et les églises pour y aller comme un ami vous inviterait à découvrir sa chambre, sa maison. Cette invitation nous a été donnée pour aider, dans la mesure de nos moyens, pour faire une différence dans cette situation. Pour rencontrer nos partenaires, essayer comme on peut, de parler à ceux au pouvoir. Cela a été fait. Maintenant c’est à ceux qui peuvent faire une différence de commencer le processus de manière urgente. Et c’est ce qui nous était demandé dans cette visite.
Réponse à la question 2 par le modérateur Greenshields
Je pense que l’une des questions à garder en tête en relation avec ceci est le fort taux d’analphabétisme qui existe dans ces pays, dans lequel cas, les personnes n’ont pas une claire compréhension de qui ils sont, d’où ils viennent et ne sont pas capables de faire des choix informés. C’est une chose. Certainement nous devons remettre en question la course aux armes avec des individus se faisant de l’argent avec cela et tout ce qu’ils peuvent. C’est à traves la persuasion que nous pourrons faire cela. Et pour surmonter la division, il faut le dialogue. Je voudrais simplement vous raconter une histoire à propos de l’Ecosse, pays d’où je viens. Un pays profondément divisé où des choses terribles se sont passées. Nous avons initié un processus de dialogue entre nous – l’Eglise d’Ecosse et l’Eglise catholique en Ecosse – qui l’an dernier a abouti à la signature d’une déclaration d’amitié où nous nous engageons à marcher ensemble dans nos différences mais aussi en accord avec les choses qui trouvent un consensus entre nous et c’est seulement lorsque vous arrivez à ce stade de dialogue d’amitié et de rencontre avec l’autre que vous commencez à abattre des murs et c’est ce que nous nous avons remarqué en Ecosse qui était très divisée quand j’étais jeune. Mais c’est en voie de changement et l’éducation aide à cela.
Réponse à la question 2 par l’archevêque de Canterbury.
Je voudrais prendre un autre angle à cela. C’était une très bonne question, qui nous aide beaucoup. Il ne s’agit pas des Nations Unies ou d’autres choses. C’est «avec» d’autres choses. C’est toujours «avec» au lieu de «ou». Ce que les églises apportent, ce ne sont pas seulement des réseaux fonctionnels qui sont pratiquement non corrompus et où lorsque vous y injectez du soutien, il parvient sur le terrain et les réseaux qui traversent les lignes de front et tout le reste. Samedi dernier, notre archevêque de Kajo Kejo a procédé à l’enterrement de 20 personnes. Il y est allé directement et était de retour samedi soir. Sa contribution sur place était grande. Ce qui compte est le changement du cœur. Et c’était la raison de cette visite. Il y a une centaine d’années, les Nuer et les Dinkas étaient constamment en guerre. Une culture de la vengeance. Les Nuer, en particulier, étaient divisés en clans. Et il y avait le vol de bétail. Le changement n’a pas été apporté par le gouvernement des colons. Il a été fait par les Eglises et le changement des cœurs lorsque les hommes y ont reçu le Christ et ont réalisé qu’il y avait une nouvelle manière de vivre. Donc ma prière à la fin de cette visite n’est pas de faire beaucoup d’activisme mais surtout que le Saint Esprit de Dieu apporte un nouvel esprit de réconciliation et de guérison pour la population du Soudan du Sud.
Réponse à la question 4 sur l’homosexualité par l’archevêque Justin Welby.
Il n’a pas totalement échappé à votre attention que dans l’Eglise d’Angleterre, on vient de parler de cela, juste un peu, récemment. Incluant un débat au Parlement. Je voudrais dire que j’aurais aimé parler avec autant d’éloquence et de clarté que le pape. Chaque mot qu’il a dit à l’instant. La criminalisation, l’Eglise d’Angleterre a adopté des résolutions (sur cela), il y a deux conférences de Lambeth sur cela, contre la criminalisation. Mais cela n’a pas vraiment changé l’esprit de beaucoup de personnes. Dans quelques jours, pour le synode général de l’Eglise d’Angleterre, c’est le principal sujet de discussion, et je vais certainement citer le Saint Père. Il l’a dit de manière très belle et pertinente. (cath.ch/imedia/hl/rz)
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