Mgr Prevost était jusqu’à présent évêque de Chiclayo, au Pérou. Il prendra ses fonctions au Vatican le 12 avril prochain. Le pape François a choisi un profil atypique et inattendu en appelant un religieux missionnaire à la tête de ce puissant dicastère chargé de sélectionner les évêques des territoires de chrétienté historique.
Né à Chicago le 14 septembre 1955, Mgr Robert Francis Prevost est issu d’une famille d’ascendance française, italienne et espagnole. Formé en mathématiques et en philosophie à l’Université de Villanova, à Philadelphie, il est entré en 1977 en noviciat chez les augustiniens, où il a prononcé ses vœux quatre ans plus tard, avant de recevoir l’ordination sacerdotale en 1982 à Rome.
Il a obtenu en 1987 un doctorat en droit canonique à l’Angelicum (Université pontificale Saint-Thomas d’Aquin) avec une thèse sur «le rôle du prieur local de l’Ordre de Saint-Augustin». Tout en préparant sa thèse, il avait mené une première expérience missionnaire au Pérou en 1985-86, en tant que chancelier du diocèse de Chulucanas et vicaire de la cathédrale.
Après un retour de quelques mois dans son Illinois natal comme responsable de la pastorale des vocations et directeur des missions pour sa province, il est retourné au Pérou en 1988 pour onze ans durant lesquels il a cumulé de nombreuses missions dans l’archidiocèse de Trujillo: il a notamment fondé une paroisse dont il fut le premier curé jusqu’en 1999, et il a aussi été prieur de sa communauté, juge ecclésiastique, directeur du séminaire augustinien, ou encore préfet des études et recteur du séminaire diocésain, où il a enseigné le droit canonique, la patristique et la morale.
Élu provincial, il est retourné à Chicago en 1999, avant d’être élu prieur général de l’Ordre de Saint-Augustin, une charge qu’il a exercé durant deux mandats de six ans, de 2001 à 2013. Après une année de transition comme directeur de la formation au couvent de Saint-Augustin à Chicago, premier conseiller et vicaire provincial, il a été appelé à l’épiscopat par le pape François en novembre 2014.
D’abord administrateur apostolique du diocèse de Chiclayo, il en est devenu en septembre 2015 évêque de plein droit. Selon l’édition 2022 de l’Annuaire pontifical, ce diocèse situé au nord du Pérou compte 90 prêtres incardinés, pour une population totale de 1,3 million d’habitants, parmi lesquels 83% de catholiques. Mgr Prevost a par ailleurs exercé la charge d’administrateur apostolique du diocèse de Callao, le grand port sur le Pacifique, de 2020 à 2021.
Sa nomination au sein de la Curie devrait lui valoir de devenir cardinal lors d’un prochain consistoire. Il est membre du dicastère pour le Clergé depuis juillet 2019, et du dicastère pour les Évêques depuis le 21 novembre 2020: ces nominations discrètes peuvent parfois constituer une premier indice en vue d’une prise de responsabilité au sein de la Curie romaine.
C’est la première fois qu’un évêque missionnaire à l’extérieur de son pays d’origine est nommé à la tête de ce dicastère stratégique, chargé de sélectionner les évêques des diocèses des pays de ‘chrétienté ancienne’, essentiellement situés dans l’hémisphère Nord. Les terres de mission demeurent sous la juridiction du dicastère pour l’Évangélisation, l’ex-congrégation pour l’Évangélisation des peuples. Mais des évêques venus des pays de l’hémisphère sud ont parfois occupé la charge de préfet du dicastère pour les évêques: ce fut notamment le cas du cardinal béninois Bernardin Gantin de 1984 à 1998 et de son successeur, le cardinal brésilien Lucas Moreira Neves, de 1998 à 2000.
Depuis que le Vatican a voulu reprendre en main les épiscopats tentés par la théologie de la libération, la présidence de la commission pontificale pour l’Amérique latine est traditionnellement liée à celle du dicastère pour les Évêques. Il fut appelé «congrégation pour les Évêques» jusqu’à l’entrée en vigueur de la nouvelle Constitution apostolique Praedicate Evangelium sur l’organisation de la Curie romaine, le 5 juin 2022.
Le cardinal Marc Ouellet se retire après un long service de près de 13 ans: alors archevêque de Québec, il avait en effet été appelé à ce poste par Benoît XVI en juin 2010, et avait été maintenu à cette charge par le pape François, dont il était proche avant le conclave. Le cardinal Bergoglio avait notamment été l’un des orateurs du Congrès eucharistique de Québec, en 2008.
Considéré toutefois comme beaucoup plus conservateur que le pontife argentin, il a vu certaines de ses propositions écartées par le pape François, qui aurait personnellement choisi certains évêques – comme l’archevêque de Chicago, le cardinal Blase Cupich -, sans tenir compte de la ›terna’ proposée par le dicastère – la procédure habituelle prévoyant une liste de trois candidats soumise au pape. Les nominations épiscopales demeurent une prérogative personnelle du pontife, qui a le droit de suivre ou non les propositions du dicastère en charge de sélectionner les évêques. Défenseur de la tradition et du célibat sacerdotal, le cardinal Ouellet était toutefois l’une des personnalités incarnant une forme de continuité entre Benoît XVI et le pape François. Il avait été l’organisateur, en février 2022, du Symposium sur le sacerdoce organisé au Vatican, ouvert par un discours du pontife argentin.
Le communiqué du Saint-Siège précise que le cardinal Ouellet se retire en raison de «la limite d’âge», ayant atteint les 75 ans le 8 juin 2019. Sa fin de mandat a été marquée par des accusations d’inconduite sexuelle lorsqu’il était archevêque de Québec. En août 2022, il avait été visé par une plainte pour gestes inappropriés de la part d’une ancienne collaboratrice de ce diocèse.
Le 13 décembre, le cardinal Ouellet a annoncé entreprendre un recours judiciaire en diffamation devant les tribunaux pour «démontrer la fausseté des allégations» et «rétablir sa réputation et son honneur». Le 18 janvier dernier, la revue Golias faisait part d’une deuxième plainte à l’encontre du cardinal Ouellet, évoquant des faits commis entre 2008 et 2009.
Selon des sources au Vatican, le retrait du cardinal Ouellet était prévu après le voyage du pape au Canada, en juillet 2022, mais la tempête médiatique a paradoxalement provoqué son maintien en poste durant quelques mois supplémentaires, le pape François ne voulant pas donner l’impression de réagir sous la pression. (cath.ch/imedia/cv/rz)
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