A l’affirmation des évêques selon laquelle les célébrations ne sont pas un terrain d’expérimentations, Monika Schmid répond que la liturgie a toujours changé au cours de l’histoire, et ce, non pas d’en haut, mais en partant de la base.
Selon l’agente pastorale zurichoise, la réforme liturgique du Concile Vatican II est arrivée parce que des communautés et des paroisses avaient déjà éprouvé de nouvelles formes: «Célébrer la liturgie dans la langue maternelle, se tourner vers le peuple, formuler de nouvelles prières. Ils ont vécu la liturgie non seulement comme un mystère de foi, mais aussi comme une célébration de la communion les uns avec les autres en Jésus, le Christ.»
«La réforme liturgique n’est pas tombée du ciel pendant le Concile, comme le montre par exemple De l’esprit de la liturgie de Romano Guardini, paru pour la première fois en 1918.»
Les servantes de messe ou les femmes comme lectrices se sont aussi imposées par la base, argumente la théologienne. «Pour les paroisses, cela va de soi depuis longtemps. L’Église officielle reste en retrait par rapport aux fidèles.»
«Les fidèles ont droit à une liturgie conforme aux règles de l’Église catholique, écrivent les évêques. Les fidèles n’ont-ils pas également droit à une célébration liturgique qui aille chercher les gens dans leur quotidien, dans leur langue et dans leur compréhension d’eux-mêmes?», s’interroge-t-elle.
«De nombreuses femmes, mais aussi des hommes, aspirent à des cultes d’égal à égal. Ils ne veulent pas d’un homme-médecine à l’autel, mais des personnes qui accompagnent un service religieux à partir de leur propre spiritualité profonde, qui ouvrent des espaces pour leur propre expérience de Dieu», juge-t-elle.
Concernant son comportement, notamment lors de sa messe d’adieu à Effretikon (ZH), Monika Schmid précise : «Je n’ai jamais caché que je célébrais la Cène au sens biblique du terme. Mais si on m’avait demandé: ‘Célèbres-tu une eucharistie catholique romaine?’, j’aurais répondu par la négative. En tant que femme, je ne peux pas».
«La messe d’adieu était une eucharistie catholique romaine parce qu’un prêtre l’a célébrée et a impliqué toute l’équipe de manière merveilleuse. Il n’a jamais été et il n’est jamais question pour moi de provoquer avec un service religieux. Une célébration est une terre sainte. Ma préoccupation était et est de célébrer avec les gens le profond mystère du Christ: ne faire qu’un avec le Christ dans un seul amour. Toucher les gens, voilà ce qui me motive.»
Et l’agente pastorale de rappeler ses 40 ans d’engagement dans l’Église, reprenant à son compte la déclaration du Concile Vatican II Gaudium et Spes: «Les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps, des pauvres surtout et de tous ceux qui souffrent, sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des disciples du Christ».
Monika Schmid poursuit son plaidoyer en soulignant: «La messe d’adieu était elle aussi une magnifique célébration d’une grande profondeur spirituelle et cela m’attriste, ainsi que toute la paroisse, que ce culte soit à ce point déchiré en public. Des personnes qui n’ont aucune idée de cette paroisse, qui n’ont aucune idée de la profondeur de la foi de cette célébration eucharistique, se permettent de commenter cette messe.»
«Souvent, ils se contentent de bavarder et de répéter le mot ‘concélébration’ comme un mantra, alors que la plupart d’entre eux n’ont aucune idée de ce qu’est réellement une concélébration. Sur la base d’un extrait de vidéo que kath.ch a mis en ligne à l’insu de tous les participants, tout le monde pense avoir son mot à dire. Et certains voient déjà rouge lorsqu’ils aperçoivent une femme à l’autel sur une photo.»
De fait, la vidéo la montre bien, en civil, à l’autel, entourée de deux prêtres et prononçant avec eux, en étendant les bras, le texte de la consécration du pain et du vin et de la prière eucharistique.
Selon Monika Schmid, ils et elles «sont nombreux à faire de même, à célébrer l’eucharistie de la même manière ou de manière similaire, ou à organiser une Célébration de la Parole et du Pain comme nous le faisons à Effretikon, à célébrer l’onction avec les mourants et les personnes gravement malades dans les maisons de retraite et les hôpitaux, car elles et ils ont établi une relation avec ces personnes. Nombreux sont celles et ceux qui, ici et là, dépassent les limites des directives de l’Église pour des considérations pastorales, mais qui n’osent pas l’assumer ouvertement. Mot-clé: culture de la peur dans l’Église!»
«J’aurais aimé que l’évêque vienne dans la paroisse et échange avec des personnes qui étaient présentes lors de cette célébration, des personnes qui marquent de leur vie la paroisse Saint-Martin.»
Monika Schmid conclut en estimant que «la lettre est probablement plutôt une preuve à l’adresse du Vatican: regardez, nous avons la situation en main, nous respectons les règles.» (cath.ch/com/mp)
Maurice Page
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