Benoît XVI est mort

Benoît XVI s’est éteint à 9h34 le 31 décembre 2022 à l’âge de 95 ans. Celui qui fut plus longtemps pape émérite que régnant a été marqué par son milieu d’origine, ancré dans la tradition catholique et hostile aux idéologies politiques extrêmes. Joseph Ratzinger a ainsi forgé sa carrière au sein de l’Eglise comme une «armure» contre les influences néfastes du monde extérieur.

Benoît XVI est revenu à la Maison du Père. La Salle de presse du Saint-Siège a annoncé que le décès était survenu à 9h34 au monastère Mater Ecclesiae, à l’intérieur du Vatican, que le pape émérite de 95 ans avait choisi comme résidence après avoir renoncé au ministère pétrinien en 2013.

Joseph Ratzinger naît le 16 avril 1927 dans le village de Marktl am Inn, en Bavière, au sein d’une famille catholique aux racines rurales. Le futur pape voit le jour la veille de Pâques et est baptisé, dès le matin, avec l’eau tout juste bénite de la nuit pascale. Son père est gendarme, d’un caractère sévère mais juste. Ses parents ont la réputation d’être des gens simples, honnêtes et très croyants.

En 1929, la famille Ratzinger déménage à Tittmoning, à la frontière avec l’Autriche. C’est là qu’il découvre sa vocation de prêtre, notamment à l’occasion de pèlerinages effectués régulièrement avec sa mère vers une petite chapelle locale. Dans son jeune âge, sa rencontre avec le cardinal Faulhaber, alors archevêque de Munich et l’impression de magnificence qu’il en ressent, le persuadera de se lancer dans une carrière ecclésiastique.

L’odeur de la peste brune

Son père, bien que conservateur, voit d’un mauvais œil la montée du nazisme. Ses positions l’obligent à déménager une nouvelle fois en 1932 près de la ville bavaroise de Traunstein.

A Pâques 1939, quelques mois avant le début de la guerre, Joseph Ratzinger entre au séminaire diocésain. Sa promotion de séminaristes est appelée en 1943 à servir dans la défense anti-aérienne, à Munich. Peu enclin à la chose militaire et opposé au nazisme, il vit cette période dans la souffrance. En 1944, il quitte la DCA pour être intégré au service obligatoire. Pour éviter son enrôlement de force dans la SS, il fait valoir son intention de devenir prêtre catholique, ce qui lui vaut le mépris des nazis fanatiques. Envoyé combattre les troupes russes à la frontière avec la Hongrie, il est finalement fait prisonnier par les Américains et libéré en juin 1945.

La paix revenue, Joseph Ratzinger commence des études de philosophie et de théologie au grand séminaire de Freising, en Haute-Bavière. Il poursuit sa formation à la faculté de théologie de Munich.

Photo non datée de Joseph Ratzinger (debout à droite) avec son frère Georg (à g.) après qu’ils aient été ordonnés. Leur sœur Maria est assise avec les parents | © Keystone/EPA/Erzbistum

Une carrière fulgurante

Il est ordonné prêtre le 29 juin 1951 en la cathédrale de Freising par le cardinal Faulhaber. A 24 ans, il prend ses fonctions de vicaire à la paroisse du Précieux-Sang de Munich. Après une année de pastorale, il est nommé professeur au grand séminaire de Freising. Il y obtient un premier diplôme de théologie sur le thème «Le peuple de Dieu dans saint Augustin». Après l’obtention de son doctorat, sa carrière de professeur de dogmatique est fulgurante. De 1959 à 1977, les facultés de Bonn, Münster, Tübingen et Ratisbonne s’arrachent cet esprit brillant.

Il devient en 1962 conseiller de Josef Frings, archevêque de Cologne, dans le cadre du Concile Vatican II. Le professeur Ratzinger est associé aux travaux préparatoires de la grande assemblée de l’Eglise. Au tournant des années 1970, il est l’un des théologiens les plus en vue de l’école issue de la période conciliaire. Cette période correspond à une intense activité intellectuelle. Il publie quelques ouvrages de théologie remarqués.

En 1977, Paul VI, qui le tient en haute estime, le nomme archevêque de Munich et Freising. Il est créé cardinal la même année.

Le «Panzerkardinal»

Fin 1981, Jean Paul II lui donne la direction de la Congrégation pour la doctrine de la foi (CDF). Il fait preuve, à ce poste d’une grande rigueur doctrinale, ce qui lui attirera des oppositions au sein de la frange dite progressiste de l’Eglise.

Son intransigeance lui apparaît comme le seul rempart contre les idéologies libertaires issues de mai 1968et contre le règne du relativisme. Cette méthode sans concession lui vaut le surnom de «Panzerkardinal». Le gardien de la doctrine s’oppose notamment à la théologie de la libération, à l’indépendance prise par les conférences épiscopales, aux nouvelles méthodes de catéchisme et aux initiatives trop avant-gardistes.

Il impose ainsi la fermeture des centres de conseil pré-avortements, en Allemagne, gérés de 1998 à 2002 par les institutions catholiques. En août 2004, un texte de la CDF sur la place de la femme dans l’Eglise provoque un tollé dans les milieux féministes catholiques.

Les «progressistes» reprochent également au gardien de la doctrine son manque d’engagement en faveur de l’œcuménisme. Son texte Dominus Iesus, écrit en 2000, choque en refusant de reconnaître les communautés protestantes comme des «Eglises».

Malgré ces oppositions, il est l’un des principaux papabili lors du Conclave qui s’ouvre en avril 2005, suite à la mort de Jean Paul II. Joseph Ratzinger est élu après seulement 24 heures de débat, un très fort consensus s’étant manifesté parmi les cardinaux. (cath.ch/rz)

> Cath.ch reviendra sur les différents aspects d’un pontificats hors norme dans les heures à venir. <

Raphaël Zbinden

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