Une jeune fille mineure a été violée à plusieurs reprises par un prédicateur évangélique dans l’école Domino Servite de Kaltbrunn: «Les pénétrations et autres actes sexuels étaient interprétés religieusement et présentaient une composante à la fois sadique et pédophile», peut-on lire dans le rapport d’enquête révélé par la SonntagsZeitung.
Les investigations ayant mené à ces conclusions ont été lancées par les responsables de la communauté eux-mêmes. Le branche de Kaltbrunn était liée à l’Eglise évangélique libre Kwasizabantu, fondée en 1970 par le pasteur Erlo Stegen en Afrique du Sud. Suite à des scandales de corruption et d’abus en tous genres révélés en 2019 dans des communautés de ce pays, la communauté saint-galloise s’est séparée de la mission-mère. Elle a mandaté une étude d’avocats pour enquêter sur des rumeurs de mauvais traitements qui étaient déjà dans l’air depuis un certain temps. Un bureau de signalement a été mis en place pour que les élèves puissent témoigner en toute liberté.
Le rapport final a été rendu durant l’été 2022. Accablant, il a mené à la démission de tous les dirigeants suisses de cette église ainsi que des enseignants impliqués. Il a conclu à des violences graves et systémiques dans l’établissement, dans la période allant de 1995 à 2000. Comme il s’agit de délits poursuivis d’office, le ministère public a ouvert une enquête pénale fin juillet 2022, qui est encore en cours.
«58 élèves et membres de la communauté ont décrit leurs expériences au bureau de signalement et ont témoigné, dans de longues lettres ou lors d’entretiens personnels, de la manière dont ils ont été harcelés psychologiquement et religieusement ou maltraités physiquement et sexuellement à l’école et dans la communauté», relève la SonntagsZeitung d’après le rapport. Les auteurs étaient des enseignants et des membres de la paroisse.
Le document confirme aussi que des châtiments corporels étaient tolérés avant 2002, date à laquelle l’école affirme y avoir renoncé. Un ancien élève avait expliqué dans le St. Galler Tagblatt comment il était frappé sur ses fesses nues avec une ceinture ou un bâton. Des coups de toutes sortes, des interdictions de sortie et des privations de nourriture pouvant aller jusqu’à trois jours étaient souvent justifiés en référence à l’Ancien Testament.
En 2019, l’école privée Domino Servite a changé de nom. Elle s’appelle aujourd’hui Christliche Schule Linth. La communauté a fait de même, se dénommant aujourd’hui Evangelische Gemeinde Hof Oberkirch (EGHO). La direction de la communauté évangélique avait déjà demandé en janvier 2022 aux responsables des violences de s’excuser pour le mal commis. Entre-temps, le personnel de l’école, située toujours à la même adresse, a été remplacé et un service de médiation a été mis en place. La personne ayant dirigé la paroisse jusqu’au printemps 2022 a exprimé sa «honte et son horreur» à la prise de connaissance du rapport, et «demandé une nouvelle fois pardon».
Les démarches de réforme et de communication concernant la Christliche Schule Linth et l’EGHO sont aujourd’hui coordonnées par l’Association faîtière des Églises libres et des communautés chrétiennes de Suisse. Son porte-parole, Markus Baumgartner, indique à kath.ch qu’une boîte aux lettres a été installée dans l’école, dans laquelle les enfants peuvent déposer des messages en cas de difficultés. «La prévention passe également par la visite régulière d’un spécialiste externe à l’école, et ce sans préavis», ajoute-t-il. (cath.ch/sonntagszeitung/ag/kath/rr/bal/rz)
Raphaël Zbinden
Portail catholique suisse
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