Avec Kathpress
En 2020, la Suisse a enregistré pour la première fois moins de 1’000 cas de suicides dits «durs». Mais dans le même temps, 1’251 personnes ont eu recours à un suicide assisté. Un nouveau record a ainsi été atteint quant au nombre total de morts volontaires, souligne l’institut de bioéthique viennois IMABE, relayé par l’agence autrichienne Kathpress le 11 novembre 2022.
D’après ces données issues de l’Office fédéral suisse de la statistique (OFS), il apparaît clairement que «les organisations dites ‘d’aide au décès’ (Sterbehilfe) sapent de facto une prévention efficace du suicide», affirme Susanne Kummer, directrice de l’IMABE. Avec un total de 2’223 cas de suicides prématurés de personnes résidant en Suisse en 2020, le pays affiche en réalité un taux de suicide de 25,6 pour 100’000 habitants. C’est plus du double du taux autrichien, qui est de 12,5 (en 2021). Un tel taux mettrait la Suisse dans les dix pays au monde avec le taux de suicide le plus élevé, selon les statistiques de l’Organisation mondiale de la santé (2019).
Susanne Kummer s’étonne que ce chiffre «effrayant» ne trouve guère d’écho dans l’opinion publique. Le recul progressif des «suicides durs» est au contraire annoncé comme un succès. Ceci «en occultant le fait qu’en Suisse, le nombre de suicides avec l’aide de tiers a augmenté de plus de 350% en seulement dix ans», rappelle l’éthicienne.
La directrice d’IMABE déplore le fait qu’en Suisse, les suicides assistés ne soient pas comptabilisés dans le taux global de suicide, ce qui donne une vision biaisée de la réalité. «Un suicide reste un suicide – même si des tiers mettent à disposition les moyens de l’homicide après concertation. La prévention et non les offres doivent rester la priorité absolue», martèle Susanne Kummer.
Les chiffres suisses présentés récemment corroborent également les données internationales: les suicides dits «durs» touchent surtout les hommes de moins de 65 ans. En revanche, les femmes âgées et les seniors constituent le groupe le plus menacé par les suicides avec l’aide d’un tiers. Pour mieux atteindre ce nouveau groupe cible, les associations d’aide au suicide font pression sur la politique. Elles veulent avoir un accès direct aux maisons de retraite afin d’y faire de la publicité pour les offres de suicide et «fournir» ainsi les personnes âgées.
La polémique bat son plein en ce moment dans le canton du Valais, alors que le peuple doit décider le 27 novembre prochain du sort d’une nouvelle loi forçant notamment les maisons de retraite à accepter que les suicides assistés puissent s’effectuer dans leurs murs. En Suisse romande, les lois cantonales de Vaud, Genève et Neuchâtel font déjà primer le choix des résidents sur les convictions éthiques ou religieuses des directions d’établissements.
L’association Exit est clairement proactive dans la promotion. Elle n’hésite pas à faire de la publicité pour ses services d’aide au suicide dans les bus et les trams, à Bâle, Berne et Zurich. Face aux premières plaintes des passagers, un porte-parole de l’entreprise de transport Bernmobil a fait valoir que les surfaces publicitaires étaient louées et que l’entreprise n’était donc pas elle-même responsable des annonces. Ceci alors que, Bernmobil se réserve le droit de refuser la publicité pour l’alcool, la publicité discriminatoire ou celle allant à l’encontre d’autres dispositions légales ou des bonnes mœurs.
Le président de la Chambre médicale allemande (BÄK), Klaus Reinhardt, a récemment critiqué le fait qu’en Allemagne aussi, la prévention des suicides soit négligée dans le débat sur l’euthanasie. Le débat politique actuel est trop orienté vers la réalisation d’un désir de suicide, a-t-il expliqué dans un rapport du Deutsches Ärzteblatt.
Les causes principales des suicides ne sont pas suffisamment prises en compte, avertit la BÄK. Environ 90% des suicides et des souhaits de mourir sont dus à des maladies psychiques – en particulier à des dépressions. Des études ont montré que les dépressions et l’isolement ont une forte influence sur le désir de suicide. Pour Klaus Reinhardt, il faut s’occuper de ces personnes en leur proposant des offres régionales. A l’occasion de la prochaine réglementation légale sur le suicide assisté en Allemagne, le thème de la prévention du suicide ne doit en aucun cas passer après celui de l’assistance au suicide, estime-t-il. (cath.ch/kap/arch/rz)
Rédaction
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