Silvan Beer, kath.ch/traduction et adaptation: Raphaël Zbinden
Claus Noppeney, âgé de 54 ans, vit avec sa famille à Berne, où il enseigne l’économie à l’Institut d’innovation et d’entrepreneuriat de la Haute école spécialisée bernoise. Ce catholique convaincu prend également part à des actions non-violentes en faveur de l’écologie. Engagé à titre privé dans le groupe «Renovate Switzerland», il s’est récemment mis à genoux sur l’autoroute afin d’attirer l’attention du public sur l’urgence climatique.
Alors que les dirigeants de la planète sont réunis en Egypte pour la COP27, Claus Noppeney interroge l’action de l’Eglise en Suisse dans la lutte contre le réchauffement.
Sur l’autoroute, vous sembliez être dans une posture de méditation. Votre engagement écologiste se nourrit-il de la prière, de la foi?
Claus Noppeney: La manière dont j’aborde cet engagement est effectivement liée à ma spiritualité. Notamment dans la façon dont je m’y prépare et m’y engage. Mais derrière mon engagement, il y a certainement d’abord ma connaissance des liens fondamentaux entre l’écologie et l’économie, tels que je les ai découverts il y a une trentaine d’années lors de mes études à l’Université de Saint-Gall.
La résistance sociale a-t-elle un aspect religieux?
Le jésuite Christian Herwartz, décédé récemment, participait régulièrement à des veillées de prière devant les prisons. Lors d’une conversation, il m’a troublé lorsqu’il a parlé de la prison comme d’un tabernacle: «Nous prions devant la prison. Là au moins, nous savons que le Seigneur est là». Il m’a fallu un certain temps pour me souvenir du discours de Jésus sur le retour du Fils de l’Homme: «J’étais en prison et vous êtes venus à moi».
Comment considérez-vous la manière dont l’homme traite la nature?
Avec les yeux de la raison. Ce que nous faisons avec la nature est déraisonnable et autodestructeur.
Dans son encyclique Laudato si’, le pape François met en garde contre une catastrophe écologique. Que signifie pour vous cette encyclique?
Laudato si’ évoque des thèmes très différents: biodiversité, climat, eau, pauvreté et autres. L’ouvrage ne le fait cependant pas dans le sens d’une revue scientifique qui énumère les dernières publications. Le pape sélectionne les données de différents domaines de recherche et présente une synthèse scientifiquement informée, mais également spirituellement imprégnée.
Dès les premières pages, il introduit la métaphore de la maison: la terre comme maison. Et l’on peut dire qu’il y a tout simplement des querelles entre les différents locataires de cette maison: les hommes, la nature, les animaux, les pauvres, les riches. Le troisième aspect que je vois, ce sont les nombreuses suggestions spirituelles. François propose par exemple de lire sous l’angle spirituel les rapports environnementaux et d’oser les «transformer en souffrance personnelle».
L’Eglise en Suisse fait-elle suffisamment pour le climat?
De nombreuses églises en Suisse continuent d’être chauffées à la température d’un bain. Cela ne nuit pas seulement aux orgues, mais à nous tous.
Dans l’accord de Paris, la Suisse s’est engagée en 2015 à réduire d’ici 2030 ses émissions de gaz à effet de serre de 50% par rapport à 1990. Les mesures adoptées actuellement ne permettront pas d’atteindre cet objectif. Et plus on repousse les mesures efficaces, plus rapidement le budget CO2 restant sera épuisé.
«Nous devrions nous demander si l’Eglise peut encore assumer la responsabilité écologique de son parc immobilier»
L’urgence climatique est une tâche politique. C’est pourquoi «Renovate Switzerland» demande au Conseil fédéral de s’attaquer enfin au thème de la rénovation des bâtiments. C’est un pas important. Mais Renovate Switzerland» ne pose pas de revendications concrètes à l’Eglise.
Vous avez récemment parlé de votre protestation climatique à l’église de la Trinité, à Berne. Poursuivez-vous le dialogue avec l’Église?
En tant qu’institution, l’Église dispose d’un parc immobilier considérable. On en parle surtout en terme pastoral ou financier. Pouvons-nous encore nous le permettre? Face à l’urgence climatique, nous devrions avant tout nous demander si nous pouvons encore assumer la responsabilité écologique de ce parc immobilier.
Laudato si’ se termine par deux prières. Dans l’une d’elles, on trouve la phrase: «Apprends-nous à découvrir la valeur de toutes choses et à les contempler avec admiration». De quoi avons-nous besoin pour nous réveiller et passer à l’action?
Cela commence par un pas dans la nature. Je recommande à chacun de se laisser toucher et interpeller par la nature. C’est ce que j’ai vécu à Gries (VS), où je suis allé plusieurs fois pour des cours de contemplation: des sens extérieurs vers l’intérieur. Il faut alors certainement un peu de courage et de soutien de la part des amis, des connaissances et de la famille. Mais spirituellement, cela commence par le chemin vers la nature. (cath.ch/kath/sb/rz)
Rédaction
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