Cristina Uguccioni, catt.ch/traduction et adaptation: Raphaël Zbinden
Giorgio Marengo, missionnaire de la Consolata, est originaire du Piémont. Son élévation au cardinalat par le pape François, lors du consistoire d’août dernier, a été un sujet d’étonnement. Autant du fait de la jeunesse de l’évêque, âgé de seulement 48, que de la «modestie» de son apostolat. Arrivé en Mongolie en 2003, il a la charge d’une communauté de seulement 1’400 baptisés, dans un pays dont les trois millions d’habitants sont en grande majorité bouddhistes.
L’Église de Mongolie fête, en outre, seulement 30 ans d’existence en 2022. Les premiers missionnaires y sont arrivés en 1992 à la demande du gouvernement, qui venait d’établir des relations diplomatiques avec le Saint-Siège. Entretien.
Quelle a été votre réaction en apprenant votre nomination en tant que cardinal?
Giorgio Marengo: Cette nomination m’a en même temps stupéfié et rempli de gratitude. Pour moi, c’est une expression de l’attention et du soin que le pape François porte aux églises plus petites et minoritaires dans le monde. L’annonce a été accueillie avec joie par les catholiques locaux et avec satisfaction par l’État mongol, dont les relations avec le Saint-Siège ont culminé en juillet, lorsque le président de la République a officiellement invité le pape à visiter la Mongolie.
Vous avez écrit un livre intitulé Murmurer l’Evangile dans le Pays du ciel bleu éternel (Sussurrare il Vangelo nella terra dell’eterno Cielo blu-2018, Urbaniana University Press). Pourquoi avez-vous choisi cette image du chuchotement?
L’expression «murmurer l’Évangile au cœur de l’Asie» a été lancée par l’évêque indien Thomas Menamparampil. Lorsque je l’ai entendue il y a quelques années, elle m’a beaucoup frappé. J’ai trouvé qu’elle illustrait bien la nature de l’action missionnaire en Mongolie et en Asie.
«Ma plus grande joie est de pouvoir exercer mon ministère dans un pays où le Christ est peu connu»
Le murmure est une image appropriée. Il renvoie en effet à la fois à la relation, puisqu’on ne murmure qu’à ceux que l’on connaît déjà, et au contenu de ce que l’on annonce, puisqu’on murmure qui est Celui qui nous envoie et qui nous fait vivre: le Christ, le Fils de Dieu, à rencontrer dans notre cœur. L’image du murmure décrit une annonce proposée avec délicatesse, discrétion, respect et humilité aux peuples asiatiques, si différents des Occidentaux.
Quelle est la plus grande joie que vous ayez éprouvée au cours de ces années en Mongolie?
Celle de pouvoir exercer mon ministère dans un pays où le Christ est peu connu et de pouvoir amener les gens à Le rencontrer. Je suis toujours très ému de voir l’action du Seigneur dans le cœur des gens et de constater leur étonnement lorsqu’ils commencent à connaître ses paroles, ses actes de délivrance du mal, son pardon, sa mort et sa résurrection.
Ce qui frappe peut-être le plus les gens, c’est la miséricorde du Seigneur, qui relève les gens de leur chute et leur rouvre le chemin de la vie. Le sacrement de la réconciliation est particulièrement populaire ici. Les confessions peuvent facilement durer une heure. Accompagner un peuple qui ne connaît pas le Christ, soutenir ceux qui commencent à le suivre, demande d’aller à l’essentiel de sa foi et cela aussi, pour moi, est une grâce.
Quelles actions l’Église a-t-elle lancées en Mongolie?
Au cours de ces 30 ans, l’Église a œuvré dans les domaines du social, de l’éducation et de la santé. Quatre écoles ont été ouvertes, trois jardins d’enfants, une clinique médicale qui dispense des soins gratuits aux plus démunis, un centre d’assistance aux handicapés et deux instituts qui hébergent des personnes âgées pauvres et seules.
Nous avons également fondé deux centres culturels: l’un consacré à la promotion du dialogue interreligieux, l’autre à l’étude du riche patrimoine culturel de la Mongolie. Des services extrascolaires, des cours d’artisanat et divers projets caritatifs (par exemple, des cantines et des douches publiques) ont été encouragés dans les paroisses.
Quels sont les projets pour les années à venir?
Un me tient particulièrement à cœur: ici, dans la capitale Oulan-Bator, j’ai repris un bâtiment laissé par une congrégation féminine. Après en avoir discuté avec les autres missionnaires, j’ai décidé qu’après une rénovation exigeante, elle serait transformée en une structure que j’ai provisoirement appelée «Maison de la Miséricorde».
«En Occident, les chrétiens souffrent d’être devenus minoritaires»
Ce sera un lieu où les personnes qui vivent un moment de grande difficulté pourront être accueillies pendant quelques jours et recevoir une première assistance (y compris des soins de santé), où elles seront écoutées, suivies et, si nécessaire, orientées vers les structures et les services les plus adaptés dans la région. Alors que toutes les autres œuvres catholiques présentes en Mongolie sont menées à bien de façon séparée par les congrégations, l’organisation et la gestion de cette Maison seront effectuées en commun par toutes les congrégations, sous la coordination de la préfecture apostolique.
Que peut apporter la jeune Église mongole à l’Église universelle?
Elle peut amener une forme de fraîcheur des origines, la joie simple et reconnaissante de personnes qui viennent de rencontrer Jésus et commencent à vivre en se confiant à Lui. La beauté et l’élan de leur jeune foi, le fait qu’ils vivent naturellement le fait d’être un petit troupeau, peuvent, je l’espère, soutenir et encourager ces communautés. En Occident, les chrétiens souffrent d’être devenus minoritaires, se replient parfois sur eux-mêmes et regrettent les grandes affluences du passé. Un aspect qui, en réalité, n’est pas et n’a jamais été la spécificité du christianisme dans le monde. (cath.ch/catt/cu/rz)
Rédaction
Portail catholique suisse
https://www.cath.ch/newsf/le-cardinal-giorgio-marengo-murmure-levangile-au-coeur-de-la-mongolie/