À l’occasion de la fête hindoue de Diwali, qui s’est déroulée le 24 octobre, le Vatican a tenu à adresser un message sur «la manière dont nous, chrétiens et hindous, pouvons ensemble promouvoir la convivialité et la coresponsabilité pour le bien de chacun», explique le site Eglises d’Asie.
Le communiqué du Vatican, daté du 10 octobre, est signé par le cardinal Miguel Ánge Ayuso Guixot (président du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux) et par Mgr Indunil Janakaratne Kodithuwakku Kankanamalage (secrétaire du Conseil). Il souligne un contexte global de «cas croissants de tensions, de conflits et de violences dans différentes parties du monde, sur la base d’identités et de suprématies religieuses, culturelles, ethniques, raciales et linguistiques – souvent alimentés par des politiques concurrentielles, populistes et expansionnistes, ainsi que par des mouvements majoritaires ou minoritaires et par l’utilisation abusive flagrante des médias sociaux», qui sont «une source de préoccupation pour nous tous».
Certains de ces traits sont particulièrement parlants à l’échelle de l’Inde; le BJP, puissant parti nationaliste hindou du Premier ministre Narendra Modi, au pouvoir depuis 2014, y promeut «l’hindutva», idéologie qui défend une suprématie et une nation hindoues, au détriment des minorités musulmanes et chrétiennes.
En octobre 2021, un rapport compilé par des groupes de défense des droits civils – United Against Hate, Association for Protection of Civil Rights et United Christian Forum – indiquait que dans 21 des 28 États du pays, les chrétiens faisaient face à des persécutions. «Les Chrétiens avaient subi 305 manifestations de violence au cours des neuf premiers mois cette année», relevait le même rapport d’enquête publié à New Delhi.
Au Tamil Nadu, dans le sud de l’Inde, un État qui n’est pas dirigé par les nationalistes hindous et leur est même culturellement et traditionnellement opposé, le BJP (Parti du peuple indien) s’efforce d’étendre sa présence politique. L’État est le théâtre de nombreuses violences commises contre les chrétiens et leurs institutions par des acteurs hindous fondamentalistes.
Dans le cadre d’une procédure d’intérêt publique introduite en août dernier auprès de la Cour suprême par plusieurs organisations chrétiennes, les chiffres présentés par l’United Christian Forum (UCF) montrent ainsi que le Tamil Nadu est particulièrement ciblé par ce type d’incidents.
En 2019, cet État indien était le deuxième État le plus visé par des attaques à l’encontre des chrétiens, avec 56 incidents répertoriés, derrière l’Uttar Pradesh qui en comptabilisait quant à lui 73. Entre 2014 et 2022, le Tamil Nadu a cumulé 227 attaques ciblant les communautés chrétiennes.
Concernant les premiers mois de l’année 2022, au cours desquels on a dénombré 26 incidents, cet État du sud de l’Inde se retrouve derrière les États à l’importante population aborigène du Jharkhand et du Chhattisgarh. L’Uttar Pradesh arrive en tête avec un record de 121 épisodes violents. La montée des groupes extrémistes dans les régions tribales survient notamment en opposition à une présence chrétienne traditionnelle.
Les chiffres avancés ont été collectés au moyen d’une ligne téléphonique gratuite de soutien aux chrétiens, mise en place par l’UCF, et cela dans un contexte où la police refuse régulièrement d’enregistrer les plaintes déposées par les chrétiens ou de poursuivre les agresseurs. La nature des incidents répertoriés varie: il peut s’agir de lieux de culte vandalisés, de messes interrompues, ou encore d’agressions à l’encontre des fidèles ou des religieux.
Ce mois-ci, le site d’information The News Minute, spécialisé dans les régions du sud de l’Inde, a publié une enquête dénonçant des «attaques systématiques» à l’encontre des chrétiens dans l’État du Tamil Nadu, qualifié de «laboratoire de l’hindutva». L’enquête fait notamment part de différents cas témoignant de l’hostilité de la police et de l’administration indienne face aux missionnaires.
L’hostilité croissante portée aux minorités chrétiennes et musulmanes dans le cadre du suprématisme hindou au pouvoir se renforce depuis ces dernières années par d’autres évolutions importantes, qui vont du durcissement des lois anti-conversion au blocage des financements étrangers en faveur des organisations religieuses non-hindoues, ou encore à la diffusion de «fake news» stigmatisant les minorités.
Les chrétiens représentaient, en 2021, 2,3% d’une population indienne de 1,3 milliard d’habitants. Les Églises sont principalement engagées dans l’éducation, les soins de santé et d’autres œuvres caritatives. (cath.ch/eda/bh)
Bernard Hallet
Portail catholique suisse
https://www.cath.ch/newsf/inde-theatre-de-violences-antichretiennes/