Force de vivre

Une amie me disait récemment sa tristesse d’entendre son aîné ne pas vouloir d’enfant en raison de la situation du monde. Celui-ci semble désespéré. Comment espérer aujourd’hui?

Quand je suis devenu assistant, en 1973, j’avais choisi comme sujet de mon premier séminaire la crise énergétique (nous étions en plein choc pétrolier) et comme sujet de thèse, l’inflation (provoquée à l’époque par les Etats-Unis). On revit les mêmes problèmes aujourd’hui. Mon patron de thèse m’a alors dit que, comme enseignant, je devais toujours veiller à ne pas désespérer les étudiant·es. Cette phrase m’a profondément marqué et je la fais toujours mienne.

Pour l’inscrire dans la réalité, nous pouvons nous rappeler que nous avons toutes et tous une force de vie intérieure, qu’elle soit physique, mentale ou spirituelle. Celle-ci nous a été donnée à notre naissance et notre devoir est de l’entretenir. Nous admirons à juste titre les témoignages des personnes qui, ayant traversé de grandes épreuves, font l’éloge de la vie. Elles ont compris que leur plus grande richesse se trouvait à l’intérieur d’elles-mêmes.

«Dans une période tragique, la tentation est grande de prendre une position défensive et de fermer notre cœur»

Les aléas de l’existence m’ont conduit plusieurs fois dans la salle de perfusion d’un service d’oncologie. J’ai pu y mesurer cette force de la vie à travers le combat que les personnes engageaient contre le cancer. Ce combat est autant physique que mental et spirituel. Cela m’a donné une sacrée leçon de vie et paradoxalement cela m’a aidé à mieux accepter la mort.

Cette force de la vie est signe de la présence dans nos existences de l’Esprit Saint. Récemment j’ai participé à une cérémonie de confirmation et j’ai prié pour que les jeunes présents sachent entretenir cette force de vie. Celle-ci, d’où vient-elle? Le Pape François nous en rappelé la source dans une homélie récente.

A l’occasion de la messe anniversaire pour le commencement du concile Vatican II, le Pape François a commenté cette phrase qui clôt l’Evangile de Jean: «Simon, fils de Jean, m’aimes-tu?» (Jean, ch. 21, verset 17). L’amour est un flux que le Christ nous donne en premier. Ce n’est pas un stock qui risque de s’épuiser en l’utilisant. C’est un flux qui s’enrichit en le transmettant. Dans une période tragique, la tentation est grande de prendre une position défensive et de fermer notre cœur. Il faut au contraire rassurer ce cœur comprimé par l’angoisse, lui parler comme une grand-maman qui prend tout contre soi le petit enfant s’éveillant d’un mauvais rêve. Il faut lui dire notre confiance dans sa force afin qu’il se détende et ose se déployer quelles que soient les circonstances.

Jean-Jacques Friboulet

19 octobre 2022

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